Intervention de Corinne Lepage

Commission d'enquête Incendie de l'usine Lubrizol — Réunion du 12 novembre 2019 à 9:5
Audition de Mme Corinne Lepage avocate spécialiste du droit de l'environnement

Corinne Lepage, avocate spécialiste du droit de l'environnement :

Il les avait déjà demandés le 19 juillet, en donnant un délai d'un ou deux mois, selon les documents. À la date de l'incendie, Lubrizol n'était pas en règle avec l'arrêté de juillet 2019. Or, avant juillet 2019, Lubrizol aurait déjà dû avoir un POI et un règlement de sécurité corrects, et n'aurait pas dû stocker dans de telles conditions des produits chez Normandie Logistique.

Deuxième problème : la communication de crise. Nous comprenons tous la difficulté de l'exercice. Et le préfet avait des mesures urgentes à prendre pour savoir s'il fallait évacuer Rouen ou non. Cela a été bien géré. Mais pourquoi n'a-t-il pas pris des instructions strictes de confinement ? C'est le patron du SDIS qui a dit : « Je rappelle que toute fumée de ce genre est une fumée toxique. » Les gens ont eu le sentiment d'être totalement abandonnés, de ne pas savoir quoi faire : certains sont partis, d'autres sont restés ; certains services publics ont fonctionné - les conducteurs d'autobus ont été obligés d'aller prendre leur service à six heures du matin -, mais des fonctionnaires ont été dispensés de service. Et le suivi n'est pas assuré, notamment pour les questions alimentaires. Je comprends très bien que les agriculteurs aient eu envie de revendre leurs produits, mais ils se sont tirés une balle dans le pied. On les a autorisés à revendre le lait le 14 octobre, et leurs autres productions, le 16 octobre. Personne n'a acheté et ils ne vont pas être indemnisés pour cette partie du préjudice.

Puis, certains producteurs, dont personne n'a ramassé le lait pendant quinze jours, alors qu'ils n'ont qu'une capacité de stockage correspondant à deux jours de production, l'ont répandu sur les champs. Et que se passera-t-il après ? Si les champs ont été pollués, qui va les indemniser ? Le rapport de l'Anses commence par préciser qu'il n'y a pas d'évaluation du risque sanitaire, et indique que si le Gouvernement autorise les produits, il faut mettre en place un suivi. Résultat : personne n'achète les produits ! C'est dommage pour les agriculteurs.

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