Intervention de Ambroise Fayolle

Commission des affaires européennes — Réunion du 21 novembre 2019 à 8h35
Institutions européennes — Audition de M. Ambroise Fayolle vice-président de la banque européenne d'investissement

Ambroise Fayolle, vice-président de la Banque européenne d'investissement (BEI) :

S'agissant du Brexit, nous sommes partis de l'accord avec le Royaume-Uni qui a été négocié par Michel Barnier et entériné par les États membres. La situation est simple : cet accord prévoit un remboursement, étalé dans le temps, de la contribution payée à la BEI par ce pays. Cet accord fait d'ailleurs débat dans la presse britannique, qui le considère comme étant trop favorable à l'Europe. Bien évidemment, la question se reposera en cas de Bexit sans accord.

La BEI est une banque d'ingénieurs. Les ingénieurs aiment vérifier, ex ante, qu'un projet répond aux caractéristiques de l'éligibilité. Ils aiment aussi exercer un suivi attentif des projets. Ce suivi sera évidemment encore plus important quand la BEI deviendra une banque du climat, parce que nous aurons besoin de pouvoir nous assurer et de pouvoir démontrer que les investissements que nous aurons financés répondent bien aux objectifs climatiques européens.

C'est, d'ailleurs, l'un des objectifs de la taxinomie. Il s'agit d'un sujet d'experts, qui sera validé par le pouvoir politique. Le référentiel aura vocation à évoluer dans le temps. Il ne sera jamais gravé dans le marbre. Ces trois dimensions sont importantes.

Nous pensons que nous avons maintenant les bases pour devenir la banque du climat. Cet enjeu est tellement important pour l'Europe que nous devons y consacrer à la fois notre énergie et nos financements. Au demeurant, cela ne veut pas dire que nous ne ferons que cela, puisque, pour 50 % des projets que nous financerons, il s'agira toujours de soutenir les PME ou l'innovation.

La durée de nos prêts dans le domaine du climat dépend beaucoup de ce que l'on finance. En général, la durée des prêts que nous consentons aux entreprises est de cinq à dix ans. Dans le domaine de la lutte contre le changement climatique, l'un des gros projets que nous sommes en train de financer est la construction, en Suède, d'une usine de batteries électriques, Northvolt. Nous finançons également les projets de recherche visant à préparer la prochaine génération de batteries, en espérant que la compétitivité européenne sera alors mieux affirmée dans ce domaine et que l'on recourra moins aux terres rares. C'est l'un des objectifs que nous cherchons à atteindre dans le soutien que nous apportons à la recherche en faveur des énergies vertes.

La réalisation des projets que nous finançons dans le domaine de l'efficacité énergétique est très longue - tellement longue, du reste, que nous en finançons assez peu.

Les institutions financières financent assez facilement la rénovation thermique des appartements et des maisons au moment de leur achat. Il est beaucoup plus compliqué d'obtenir un financement pour une rénovation thermique indépendamment d'un achat, les travaux effectués n'étant rentables que sur la longue durée. La BEI a financé, en France, un certain nombre de sociétés régionales de tiers-financement. Ces sociétés ont pour objet exclusif de financer la rénovation thermique des logements des particuliers. Leur bilan est extrêmement positif, non seulement parce qu'elles ont réussi à toucher un public qui n'a pas forcément facilement accès aux réseaux bancaires classiques, mais aussi parce que les économies d'énergie permettent de rembourser 70 % du prêt. On a pu le constater notamment en Picardie.

La mobilité rurale est un enjeu très important. La BEI doit également travailler sur ce sujet dans le cadre de la mise en place de sa nouvelle politique en faveur du climat. Nous devons essayer d'identifier les bons outils et les caractéristiques des financements que nous pouvons apporter.

Nos investissements évoluent dans le temps. Il y a une vingtaine d'années, on avait besoin de la BEI pour financer des projets d'éoliennes. Aujourd'hui, pour le financement des éoliennes terrestres, on se passe de nous dans la plupart des cas. Cela montre que nous avons rempli notre rôle. En revanche, on nous soumet de plus de plus de projets d'éoliennes offshore, pour lesquels les financements sont assez importants. Étant beaucoup plus risqués, les projets d'éoliennes offshore flottantes nécessitent un soutien de la BEI. Cela renvoie au débat sur l'additionnalité : sommes-nous bien mobilisés sur les projets pour lesquels on a vraiment besoin de nous ?

Concernant la politique de voisinage, nous avons accompagné de nombreux projets d'infrastructures, mais aussi des projets en matière agricole, notamment en Ukraine et, récemment, en Moldavie. Nous soutenons des projets de nature à favoriser la croissance économique. Les règles d'éligibilité sont les mêmes que pour les pays de l'Union européenne.

La question sur la connaissance des dispositifs est tout à fait pertinente, y compris à l'intérieur de l'Union européenne. Comme la Commission européenne, nous devons progresser pour que nos instruments soient plus simples et mieux connus, de manière à ce qu'ils soient plus utilisés. Comme je l'ai dit tout à l'heure, le pays qui a le plus bénéficié du plan Juncker, compte tenu de la taille de son économie, est la Grèce. C'est aussi parce que nous y avons envoyé une équipe qui a rencontré les porteurs de projets pour leur expliquer nos règles de présentation.

Comment pouvons-nous accompagner des projets visant à améliorer l'efficacité énergétique dans les nouveaux États membres de l'Europe de l'Est ? C'est l'un des grands enjeux de la période actuelle. C'est aussi un enjeu pour la réussite de la banque du climat.

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