Intervention de Hugues Fulchiron

Commission spéciale sur la bioéthique — Réunion du 28 novembre 2019 à 10h15
Audition commune sur les conséquences de l'extension de l'assistance médicale à la procréation sur le droit de la famille

Hugues Fulchiron, professeur de droit privé à l'Université Jean Moulin Lyon 3 :

Il faut différencier les cas où la loi permet quelque chose et ceux où les personnes se placent dans les interstices de la loi. Ce que vous évoquiez, c'est plus une utilisation des interstices de la loi.

Je considère qu'il est tout à fait néfaste, pour la cohérence et la sécurité juridique de notre système ainsi que la compréhension des problèmes, d'étendre des règles qui ont été pensées, conçues et appliquées pour la filiation charnelle à d'autres types de filiations radicalement différents. Toutes ces règles reposent en effet sur une forme de vraisemblance. Les étendre à des hypothèses dans lesquelles il n'y a aucune vraisemblance serait inutile et dangereux. Il me semblerait beaucoup plus simple et cohérent de construire un système adapté à ces nouvelles configurations de filiation.

Sur la question du droit des parents au secret, je ne vois pas sur quoi fonder ce droit : la convention européenne des droits de l'homme ? La charte des droits fondamentaux ? Les pactes de l'ONU ? Socialement et humainement, les parents ont peut-être cette liberté. Mais juridiquement, ce droit n'existe pas. En revanche, il existe un droit de l'enfant à connaître ses origines. Quant au droit de l'État à imposer le secret, il n'a aucun fondement juridique. L'enfant reste libre d'accéder à ses origines ou non, donc l'État n'impose pas la révélation du secret, il la permet seulement.

La multiparenté existe en adoption, dans le cas par exemple d'une recomposition familiale au sein d'un couple, homosexuel ou hétérosexuel, avec plusieurs personnes qui assument la charge de parents. Le cas est différent lorsqu'il s'agit de la naissance d'un enfant dont la filiation serait plurielle. L'engendrement à plusieurs, à statuts différents, d'un enfant, ce n'est plus la même logique que dans le cas de l'adoption.

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