Intervention de Jean-Yves Lagalle

Commission d'enquête Incendie de l'usine Lubrizol — Réunion du 21 novembre 2019 à 15h30
Audition du colonel jean-yves lagalle directeur du service départemental d'incendie et de secours de la seine-maritime sdis76

Jean-Yves Lagalle, colonel, directeur du service départemental d'incendie et de secours de la Seine-Maritime :

S'agissant tout d'abord de l'équipement, nous disposons de protections individuelles adaptées. Chaque fourgon d'incendie comprend six dossards dotés d'un appareil respiratoire isolant (ARI) avec une bouteille d'oxygène et quatre bouteilles de réserve.

Contrairement à l'idée reçue, dans le cas d'un incendie comme Lubrizol, le risque au sol est limité car il se produit, comme dans un feu de cheminée, un appel d'air : les fumées toxiques s'élèvent et le risque est limité pour les personnes qui se trouvent au niveau du départ du feu. La concentration de la toxicité devient maximale à 100 m de hauteur, après quoi, en fonction du vent, le nuage de fumée se dilue et, au-delà de 1340 m de distance, selon l'étude de danger, le risque létal ou d'effets irréversibles sur la santé de la population disparaît ; restent cependant les nuisances olfactives et des irritations qu'il a fallu prendre en compte.

Lorsque l'incendie s'éteint, il reste des fumées et des particules, filtrées par des masques, de type FFP2 ou FFP3. Mais un feu est dynamique et il se déplace dans tous les sens. Nous avons des équipements de protection, mais de là à dire que par rapport à l'utilisation optimale théorique ils ont été parfaitement utilisés en pratique, et cela sur toute la durée de l'incendie, on ne peut jamais en être certain. C'est la raison pour laquelle nous sommes systématiquement accompagnés par un soutien médical avec un médecin et un infirmier en cas d'incendie. Par la suite nos personnels sont très vite engagés dans un dispositif de suivi sanitaire.

Les sapeurs-pompiers professionnels ou volontaires de Seine-Maritime sont toutefois aguerris et formés aux risques industriels. Nous avons des caissons d'entraînement pour cela. Ceux qui sont juste devant l'incendie sont toujours en liaison avec le commandement et demandent dès que nécessaire des renforts ou des moyens adaptés. Il y a en permanence un échange entre le terrain et le commandement pour adapter les protections en cas de besoin. Tout ceci est parfois compliqué et, dans l'action, il arrive qu'on enlève un masque pour pouvoir reprendre son souffle. Nous avons donc bien des protections respiratoires mais il est difficile d'affirmer qu'elles sont utilisées pendant toute la durée de l'intervention.

Nous n'avons pas mis en oeuvre de« confinement ». J'ai proposé au préfet, par souci de réalisme, au-delà du périmètre de1340 mètres dans le cône des fumées, une simple « mise à l'abri » , qui consiste simplement à rester chez soi. En effet, un confinement implique de scotcher portes et fenêtres si bien que les habitations deviennent rapidement assez irrespirables, après un délai de deux heures. Nous nous sommes donc limités à une mise à l'abri avec la consigne : « restez chez vous et évitez de circuler inutilement ». Il s'agissait également de prendre en compte le fait qu'à huit heures du matin, la circulation se densifie dans l'agglomération rouennaise, avec des personnes qui vont travailler et des feux de circulation à gérer. Or je savais que nous avions fait appel à des moyens de secours extérieurs et je ne souhaitais pas que les engins en provenance de différents Sdis soient bloqués dans la circulation. C'est pourquoi nous avons rapidement mis en place un plan de circulation en tenant compte de l'axe du vent et des fumées.

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