Intervention de Michelle Meunier

Commission spéciale sur la bioéthique — Réunion du 20 novembre 2019 à 13h50
Audition de représentants de la fédération française des cecos centres d'étude et de conservation des oeufs et du sperme humain et de la fédération des blefco biologistes des laboratoires d'étude de la fécondation et de l'oeuf

Photo de Michelle MeunierMichelle Meunier :

Nous vous remercions d'avoir abordé ces nombreux sujets. Je souhaite notamment remercier le Professeur Achour-Frydman pour la clarté de ses réponses sur l'AMP post mortem ainsi que le Docteur Clément pour son intervention relative aux relations entre le secteur public et le secteur privé. Je souhaite poser une question au CECOS au sujet de l'allongement de la durée de conservation des gamètes. J'ai entendu parler d'une conservation pendant quarante ans. Par ailleurs, le don personnalisé est autorisé en Belgique, mais cela n'est pas le cas en France. Il semble que le gouvernement ait maintenu son positionnement à l'Assemblée Nationale. Quel est votre avis ? Chez les couples de femmes, il me semble intéressant de proposer un don d'ovocytes lorsqu'une femme ne veut pas porter l'enfant.

Professeur Nathalie Rives. - Les délais de conservation des tissus germinaux par rapport au moment de l'utilisation peuvent être beaucoup plus longs que ceux des gamètes, des ovocytes ou des spermatozoïdes. Cela pose la question de la pérennité de cette conservation au regard de la transmission des données d'une génération à une autre et des conditions de stockage. La multiplication des centres de stockage nous interroge sur la nécessité d'une centralisation permettant de renforcer les garanties de sécurité à très long terme, car nous ne pourrons pas augmenter indéfiniment le volume des salles. S'agissant des spermatozoïdes et des ovocytes, la mise en place de règles de limites de conservation si les hommes ou les femmes ne répondent pas à dix ans permettra une meilleure gestion de la situation.

Dans le cas de la conservation hors indications médicales, ce délai de dix ans me paraît beaucoup trop long. L'âge à partir duquel ce dispositif sera autorisé serait 32 ans. Dans le cas d'une démarche volontaire de conservation des gamètes hors indications médicales, je pense qu'il faudrait arrêter la conservation en l'absence de réponse pendant cinq ans. Je pense qu'il est nécessaire de différencier la préservation de la fertilité de la conservation hors indications médicales.

Par ailleurs, je ne pense pas qu'il faille aborder la question du don dirigé au sein de couples de femmes. Lorsqu'un couple hétérosexuel conçoit seul ses enfants, les spermatozoïdes du conjoint donnés à la conjointe ne constituent pas un don intraconjugal. Chez un couple de femmes, imaginons que la femme souhaitant porter l'enfant présente une insuffisance ovarienne et soit infertile et que sa compagne ne souhaite pas porter l'enfant. L'utilisation des ovocytes pour que l'autre conjointe porte l'enfant ne serait pas un don, mais une conception en contexte intraconjugal, grâce à des gamètes qui ne sont pas les spermatozoïdes et l'ovocyte du couple. Le texte de loi actuel ne l'empêche pas, puisqu'il ne s'agit pas d'un don.

Professeur Catherine Guillemain. - Le don dirigé concernant un couple qui souhaiterait recevoir les gamètes d'une personne qu'il connaît a déjà eu lieu en France, même avant la promulgation de la première loi de bioéthique. Les professionnels impliqués dans ces pratiques n'étaient pas favorables à ce type de prise en charge, plus ou moins bien perçue au sein des familles. De plus, l'implication des personnes concernées sur le moyen et long terme est difficilement prévisible au moment de la prise en charge.

Professeur Nathalie Rives. - Une collègue de la Fédération des CECOS souligne qu'il serait créé une différence entre les couples recourant à un don anonyme et les couples qui auront recours au don dirigé. Cette notion ne serait pas respectée.

Professeur Nelly Achour-Frydman. - Ce cas soulève la question de la levée d'anonymat, qui n'est pas prévue dans l'esprit de la loi. Il convient également de rappeler la notion de dette entre la donneuse et le couple receveur. Cette situation est souvent comparée avec le don d'organe, mais il n'y a pas d'enfant issu du don d'organe. L'enfant issu du don sera élevé par un couple et la troisième personne peut peser sur la vie de cette famille.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 15 heures.

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