Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi de finances prévoit une diminution des crédits du programme 161, « Sécurité civile », par rapport à 2019, avec 519, 5 millions d’euros de crédits de paiement prévus en 2020.
Cette diminution s’explique essentiellement par une réduction du périmètre du programme 161, avec le transfert d’environ 15 millions d’euros de ses crédits vers le programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur ».
Bien que le programme 161 ne recouvre qu’une infime partie des moyens des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, j’aimerais m’arrêter quelque temps sur leur situation, qui a été particulièrement tendue ces derniers mois. Ceux-ci font en effet l’objet d’une sollicitation croissante, alors que leurs moyens stagnent.
Leurs dépenses d’investissement ont même connu une baisse importante, de près de 18 % depuis dix ans, qui est d’autant plus préoccupante que le soutien de l’État s’amoindrit d’année en année : la dotation de soutien aux investissements structurants des SDIS ne représente plus que 7 millions d’euros en 2020, contre 25 millions d’euros en 2017.
De plus, cette dotation n’accordera plus aucun crédit en faveur des projets locaux des SDIS en 2020. J’estime qu’un effort financier de l’État aurait été possible, alors que les crédits du programme 161, notamment ses dépenses d’intervention, sont inférieurs de 10 millions d’euros à la programmation.
J’achève mon propos par un dernier motif de préoccupation : plus d’un an et demi s’est écoulé depuis l’arrêt Matzak de la Cour de justice de l’Union européenne. Ma collègue Catherine Troendlé et moi-même vous avions exhorté, monsieur le ministre, à en tirer les conséquences, car nous redoutons tous la menace qu’il fait peser sur notre système de volontariat des sapeurs-pompiers.
Un an plus tard, il est regrettable que nous soyons toujours dans l’attente d’une initiative claire de la part du Gouvernement, alors que plusieurs recours ont été déposés devant les tribunaux administratifs.
Une action rapide doit être entreprise, monsieur le ministre : allez-vous soutenir le projet d’une nouvelle directive qui semble, à nos yeux, la seule solution pour garantir la pérennité de notre modèle de sécurité civile ?
J’ajoute quelques remarques à la suite de mon rapport sur la lutte contre les feux de forêt. Il est satisfaisant que ce projet de loi de finances prévoie toujours le remplacement des Tracker vieillissants par de nouveaux Dash.
La livraison de ces avions me paraît toutefois tardive. Nous ne pouvons pas tolérer une éventuelle rupture capacitaire ces prochaines années, alors que le risque de feux de forêt est susceptible de s’aggraver. Deux de mes recommandations visaient donc à accélérer la livraison de ces Dash et à faire aboutir au plus vite les négociations européennes en vue d’une commande mutualisée de Canadairs.
Je ne puis que réitérer ces recommandations devant vous, monsieur le ministre, indépendamment des incidents techniques qui peuvent immobiliser nos appareils pendant plusieurs mois.
Vous me voyez d’ailleurs satisfait que nos sept Tracker soient de nouveau autorisés à voler depuis la semaine dernière. Leur participation aux missions de guet aérien armé reste essentielle, dans l’attente de leur remplacement par des Dash.
Pour finir, je dois vous avouer ma déception concernant l’évolution du service d’alerte et d’information des populations, le SAIP. Ce projet de loi de finances pour 2020 marque le début de la seconde période de financement, qui représentait initialement 36, 8 millions d’euros pour la période 2020-2022. Cette enveloppe a été réduite à 5, 6 millions d’euros, qui financeront exclusivement la rénovation des sirènes.
Monsieur le ministre, comment justifiez-vous une telle obstination en faveur de ce procédé, au détriment du développement d’un système d’alerte par téléphone ? Un tel système était pourtant préconisé dès le Livre blanc de 2008 et devient, plus que jamais, indispensable dans un pays comme le nôtre.
Les récents exemples de l’incendie de l’usine de Lubrizol et des intempéries dans le Sud-Est en ont fait la démonstration : une technologie de diffusion cellulaire, le Cell Broadcast, aurait été bien plus efficace et aurait permis une alerte claire et immédiate.
En outre, une directive européenne nous impose la mise en place d’une transmission des alertes par téléphone d’ici à 2022. Vos services, monsieur le ministre, affirment que cette obligation est en cours de réalisation. Comment se fait-il, alors, qu’aucun crédit, ni en CP ni en AE, ne soit prévu pour le développement d’un quelconque volet mobile, ni dans ce PLF, ni pour 2021, ni pour 2022 ?
Pour conclure, mes chers collègues, l’ensemble de ces préoccupations m’incite à vous proposer le rejet de ces crédits.