Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai démissionné de mon poste d’adjointe au maire de Tourcoing pour la sécurité afin de siéger au Sénat ; vous vous doutez donc bien que la question m’intéresse particulièrement.
Les grandes métropoles frontalières connaissent des problèmes de sécurité, et les élus locaux sont en première ligne pour recevoir et entendre les doléances des habitants. Répondons-nous vraiment à leurs attentes, à leurs constatations jugées prioritaires ?
Une augmentation progressive des trafics de stupéfiants est observée depuis des années, qu’il s’agisse de leur ampleur, du nombre de sites touchés ou de la diversité des substances écoulées. Plusieurs kilogrammes de cocaïne ont été trouvés échoués sur les plages françaises : c’est invraisemblable !
Les trafics sont le principal fléau des quartiers, et les habitants en sont les premières victimes, subissant les nuisances, les dégradations, les squats et, souvent, les violences de ceux qui tiennent les marchés des stups. À ces troubles s’ajoute un sentiment d’impunité : les dealers opèrent souvent dans la rue, la plupart du temps aux abords des facultés.
L’insécurité n’est pas un ressenti ; elle existe vraiment.
Certes, monsieur le ministre, le nombre de policiers a été renforcé, et, je vous l’accorde, vous avez décidé de faire face à cette délinquance massive qui pollue l’évolution des banlieues et anéantit l’avenir des enfants des cités.
Certes, les préfets sont réactifs, organisant, en liaison avec les élus locaux, des lieux de concertation pour cerner les problèmes de sécurité. Certes, l’éducation nationale, les services socioéducatifs, les bailleurs sociaux et toutes les institutions concernées par l’insécurité mettent en place de vraies politiques pour les zones de sécurité prioritaire.
Reste à gérer le problème de l’organisation des ressources humaines. Tant de policiers et de gendarmes sont accaparés, chaque semaine, par la tension sociale. Combien d’hommes et de femmes sont depuis un an au cœur des manifestations à maintenir l’ordre, policiers et gendarmes qui ne sont plus disponibles sur le terrain pour enrayer la petite et moyenne délinquance ? Que dire aussi de la situation dans les prisons, où les gardiens, débordés et manquant de moyens, doivent faire face à une violence toujours plus exacerbée ?
Quel mépris pour ces agents hors du commun, qui, souvent, sacrifient leur vie personnelle pour notre sécurité !
Les pompiers aussi sont concernés par une dégradation de leurs conditions de travail. Un colonel de sapeurs-pompiers nous disait, lors d’une réunion de sécurité, que, même en situation de guerre, on respectait jusqu’alors l’intégrité des ambulances… Aujourd’hui, tel n’est plus le cas. Les pompiers, héros du quotidien, ne peuvent pas être abandonnés sur le terrain, alors qu’ils mettent leur vie en jeu pour sauver celles des autres.
Monsieur le ministre, vous le savez, la violence monte : il nous faut y répondre, impérativement ! Car la situation est devenue intolérable.
Aujourd’hui, nous attendons que le budget « Sécurités » soit à la hauteur de l’évolution de la violence. Augmenter le nombre de policiers n’est pas une fin en soi, surtout quand, comme le rappelle notre collègue Henri Leroy dans son rapport pour avis, ces augmentations se font au détriment de l’entretien des équipements, à commencer par les voitures, et des moyens d’intervention des forces de l’ordre et de sécurité.
La création de près de 2 000 emplois supplémentaires dans la police et la gendarmerie n’a pas de sens, si ces recrutements sont opérés au détriment de l’équipement.
Après étude du rapport sur les forces de sécurité intérieure, nous estimons que la qualité de l’équipement n’est pas à la hauteur des investissements nécessaires. Les locaux dans lesquels travaillent nos fonctionnaires de police sont trop souvent vétustes et parfois même dangereux du point de vue sanitaire, pour les policiers comme les justiciables.
Par ailleurs, les réserves de la police et de la gendarmerie, qui assurent un lien entre les citoyens et leurs forces de sécurité, sont elles aussi victimes de coupes budgétaires importantes.
Monsieur le ministre, il est grand temps d’apporter à tous ceux qui assurent la sécurité de nos concitoyens une réponse globale aux problèmes auxquels ils font face. Malheureusement, votre budget n’est pas à la hauteur, tant s’en faut. C’est pourquoi je voterai contre, avec bon nombre de mes collègues.