Il faut changer les choses si l’on veut intégrer !
Dans le domaine de l’asile, il y a certes des évolutions importantes concernant l’Ofpra et la CNDA. Mais le constat que nous faisons sur la politique d’hébergement est que le dispositif national d’accueil est totalement inopérant.
Entre 2012 et 2017, il y avait plus de 80 % de places ouvertes dans les centres d’accueil pour demandeur d’asile, les CADA. Sur les trois premières années de ce quinquennat, il n’y en a plus que 8 %.
La norme pour l’accueil des demandeurs d’asile, c’est aujourd’hui la rue. Je ne parle pas seulement de ceux qui font l’objet d’une procédure « Dublin », pour qui c’était déjà le cas, mais de tous les demandeurs.
Comment voulez-vous que les CADA, qui sont les seules structures dans lesquelles ces personnes sont accueillies dans le respect du droit et avec dignité, où l’on gère les traumatismes, où l’on étudie les demandes d’asile dans des conditions correctes et où l’on peut traiter les maladies, puissent faire face à leurs missions ? Moins de 50 % des demandeurs d’asile passent actuellement par un CADA !
Il y a 43 000 places en CADA et 51 000 places dans les centres d’hébergement d’urgence, les CHU, qui accueillent aussi de nombreux enfants lorsque ceux-ci ne sont pas à la rue. Voilà la situation ! Rien n’est prévu dans ce budget pour faire évoluer la situation en termes d’hébergement.
Sans hébergement, comment voulez-vous intégrer ? Comment les demandeurs d’asile peuvent-ils se sentir à l’aise si l’on ne développe pas leur autonomie, si on ne leur donne pas le droit de travailler ? Pour toutes ces raisons, il n’est pas possible de voter les crédits de cette mission.
Nous avons été très touchés, cette semaine, par le drame qui a touché nos armées et treize familles françaises dans le contexte de la lutte contre le terrorisme. Nous avons besoin d’États africains, forts, stables et respectueux des droits humains, car ce combat, nous le menons avec eux.
Veillons à ce que notre politique de délivrance des laissez-passer consulaires à l’égard d’États en situation plus que précaire n’aille jamais à l’encontre de cet objectif majeur, le seul qui vaille à long terme ! Je le dis avec gravité et inquiétude, en considérant la situation politique actuelle en Guinée et les évolutions qu’elle peut entraîner.
Il convient de veiller à ce que, dans le prochain cadre financier pluriannuel de l’Union européenne, les moyens de Frontex soient renforcés et que la participation française à cette agence soit importante en termes d’effectifs d’agents français, au niveau de sa direction, mais pas seulement.
Nous devons faire en sorte que la coopération avec les pays tiers de l’Union européenne se développe sur la base de moyens contrôlés par le Parlement européen. Il ne faut jamais se rendre complices de l’esclavagisme, tel qu’il se manifeste notamment en Libye.
Il nous faut soutenir les mesures prévues lors de la révision du code des frontières Schengen, et notamment le système électronique Etias, lancé par Bernard Cazeneuve et le Conseil européen de l’époque, dont la mise en place devrait être effective en 2021 et qui permettra de mieux contrôler nos frontières.
Il convient, enfin, que l’externalisation de la collecte des dossiers de demande de visas, à laquelle on procède dans nos consulats, soit effectuée dans des conditions correctes.
Parce que l’hébergement des demandeurs d’asile est totalement déficient et du fait de l’échec de l’intégration lié à la stigmatisation, nous ne pouvons pas, monsieur le ministre, voter ce budget qui illustre votre politique, même si nous saluons les évolutions concernant l’Ofpra.
Monsieur le rapporteur spécial, nous sommes tous attachés à nos identités. Mais si l’on considère l’histoire de l’humanité, on s’aperçoit que les migrations sont à sa source. Elles expliquent, à la fois, son histoire et son développement, et fondent nos identités et nos spiritualités.
Je ne pense pas que le discours que vous avez tenu soit digne d’un rapporteur spécial du budget.