Intervention de Christophe Castaner

Réunion du 28 novembre 2019 à 14h30
Loi de finances pour 2020 — Immigration asile et intégration

Christophe Castaner  :

Vous avez raison, monsieur le sénateur !

Le chiffre de 33 000 personnes qui viennent pour des motifs économiques traduit également l’attractivité économique de notre pays. Je pense que ce sont de bons signes.

J’en viens aux demandes d’asile, qui étaient au nombre de 120 000 en 2018. Bien que ce chiffre soit deux fois inférieur à celui des entrées sur notre sol, nous ne devons pas le sous-estimer. Au-delà du fait qu’il constitue un record, il s’agit aussi d’une singularité. En effet, dans le même temps, le nombre de demandeurs d’asile en Europe baissait très fortement chez certains de nos voisins, en particulier l’Allemagne, qui a constaté une baisse de 18 % de ces demandes.

Cette singularité, qui doit nous interroger, a des causes multiples. Certaines sont liées au contexte européen, et j’y reviendrai ; d’autres tiennent peut-être à notre système.

Quoi qu’il en soit, nous devons être en mesure d’expliquer ce chiffre aux Français et de corriger ce qui relève d’une anomalie. Cela signifie non pas qu’il faut accueillir moins ou plus mal, mais que nous devons faire respecter nos orientations, en maîtrisant les arrivées, les flux et, le cas échéant, les départs.

C’est parce que nous avons décidé de mener une action forte dans ce domaine que les crédits consacrés à l’immigration et à l’asile sont en augmentation importante.

Ces crédits doivent se traduire par une plus grande efficacité. Ainsi, la hausse des effectifs de l’Ofpra, de 200 équivalents temps plein, vise à améliorer la rapidité de la décision que nous devons à celles et ceux qui font une demande de protection. Il n’est pas normal qu’un Géorgien venu en France en 2018 attende 441 jours pour obtenir une réponse à sa demande ! Nous devons fluidifier le système et, à cette fin, nous avons besoin du Parlement.

De la même façon, nous devons améliorer la qualité du traitement des demandes. Il est impératif d’accorder des conditions d’accueil dignes à toutes celles et tous ceux qui demandent l’asile ; voilà un sujet qui peut nous rassembler.

C’est pourquoi nous devons continuer en 2020 l’effort entrepris depuis le début du quinquennat pour augmenter nos capacités d’hébergement.

N’oublions pas, madame Benbassa, que notre pays a plus que doublé depuis 2015 ses capacités d’accueil. Je ne connais aucune autre politique publique, ni aucune commune de France, qui ait supporté un tel effort de solidarité vis-à-vis des personnes que nous accueillons. Là encore, cela suffit-il ? La réponse est non, mais nous continuons à agir avec force.

Depuis 2017, ont été ouvertes dans les CADA 3 000 places supplémentaires. Nous devons poursuivre dans cette voie.

Il nous faut, je l’ai dit, travailler sur la question des délais en raccourcissant la durée de l’instruction.

Nous devons, par ailleurs, améliorer les politiques d’intégration, dont les crédits augmentent fortement, à hauteur de 70 % depuis 2017, pour que les parcours d’intégration réussissent. Telle est, en effet, la finalité de nos politiques d’immigration.

Depuis le début du quinquennat, les crédits destinés à d’autres politiques d’intégration ont été portés à des niveaux historiques. Je tiens à le dire, d’abord par fierté, mais aussi parce qu’il faut remettre les choses à leur place face aux affirmations des donneurs de leçons.

Ainsi, nous proposons une augmentation de 25 millions d’euros de ces crédits par rapport à l’année dernière, ce qui nous permettra d’appliquer les mesures décidées par le comité interministériel à l’intégration. Je pense, par exemple, au doublement des heures de cours de français. Personne ne peut en effet penser sérieusement qu’il est possible de s’intégrer sans maîtriser la langue française. Nous avons fait des efforts sur ce point, et devons les poursuivre.

L’immigration, l’asile et l’intégration ont été au cœur de l’action du Gouvernement depuis la première minute du quinquennat, mais avec lucidité et sans angélisme. Nous menons une politique claire, ferme, ambitieuse. Nous donnons les moyens d’appliquer notre droit de l’accueil, en veillant à ce que la protection soit accordée à celles et ceux qui en ont besoin, et ce budget nous permet de le faire.

Monsieur Capus, la dimension européenne est effectivement essentielle, même si je ne l’ai pas évoquée lors de la présentation de ce budget. Je le rappelle, le président de la République porte l’ambition d’accélérer le calendrier de déploiement de Frontex, lequel doit avoir lieu en 2027 avec des effectifs renforcés : 10 000 agents à l’échelle de l’Europe pour protéger nos frontières. Nous avons obtenu que cette échéance soit avancée à 2024.

Monsieur Bonnecarrère, vous m’avez interrogé sur la compatibilité et l’interopérabilité des différents fichiers informatiques européens. À cet égard, nous avons prévu 11, 9 millions d’euros qui n’apparaissent pas dans le présent budget parce qu’ils relèvent de la création de la direction interministérielle du numérique (Dinum) et du programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur ».

Vous avez posé, monsieur le sénateur, une question essentielle : des mesures d’éloignement ne sont-elles pas exécutées pour des raisons financières ? Non !

La non-exécution de ces mesures peut avoir deux causes.

La première est l’absence de laissez-passer consulaires. Nous menons sur ce sujet un important travail diplomatique, et je me suis déplacé dans de nombreux pays d’origine de la migration, afin d’améliorer le dispositif.

La seconde cause est le manque de personnels disponibles pour procéder à ces éloignements.

Les politiques de développement de places dans les centres de rétention administrative nous permettent d’agir en la matière.

Les éloignements contraints ont augmenté de 20 % en 2017 et 2018, et cette tendance se confirme. Les laissez-passer consulaires ont atteint le taux historique de 60 %, le plus haut jamais atteint.

Nous devons également veiller à favoriser les moyens consacrés à l’éloignement, mais je veux être très clair : aucun éloignement n’est annulé faute de crédits. Les réacheminements sont en augmentation, et il est important de maintenir cette pression.

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