Intervention de Julien Blanchet

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 11 décembre 2019 à 9h35
Audition de M. Julien Blanchet rapporteur général de la convention citoyenne pour le climat

Julien Blanchet, rapporteur général de la Convention citoyenne pour le climat :

Dans son discours du 25 avril 2019, le Président de la République a jugé nécessaire, sans attendre la réforme constitutionnelle, de mettre en place une Convention citoyenne pour le climat organisée par le CESE, qui ne serait pas une expérience, mais une première itération du Conseil de la participation citoyenne qu'il appelle de ses voeux. Il s'est engagé à transmettre sans filtre au Parlement les propositions issues de cette convention ou à convoquer un référendum et, dans tous les cas, à en tirer toutes les implications réglementaires.

Le 2 juillet dernier, un comité de gouvernance indépendant et pluriel a été constitué. Co-présidé par Laurence Tubiana et Thierry Pech, il se compose d'experts des questions climatiques, économiques, sociales et démocratiques, et comprend notamment des représentants du collectif des « gilets citoyens ». Trois garants des règles d'indépendance et de la déontologie du processus ont également été nommés par le président du Sénat, le président de l'Assemblée nationale et le président du Conseil économique, social et environnemental.

Cette convention citoyenne entend répondre à la double crise démocratique et climatique que nous traversons. Certains sondages montrent que la préoccupation climatique dépasse aujourd'hui celle du pouvoir d'achat, notamment chez les jeunes.

La lettre de mission du Président de la République nous donne mandat pour proposer des mesures structurantes et conformes à la justice sociale visant à diminuer les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 40 % à l'horizon 2030 par rapport à leur niveau de 1990.

Le rapport de la convention sera adressé au Gouvernement et au Président de la République et publié. Il identifiera les propositions de mesures relevant de la loi ou du règlement et celles qui pourraient être soumises au référendum. Le Gouvernement répondra publiquement et publiera un calendrier prévisionnel de mise en oeuvre de ces propositions. Enfin, les citoyens pourront se réunir une ultime fois pour répondre à la réponse apportée par le Gouvernement.

Le tirage au sort n'est pas un procédé nouveau, il est déjà utilisé pour désigner les jurés d'assises. Nous avons aussi des exemples d'assemblées citoyennes couronnées de succès à l'étranger, notamment en Irlande ou au Texas. D'autre part, des collectifs citoyens se sont structurés et nous avons besoin de renouveler notre vision du principe d'égalité politique, qui ne peut plus se résumer au vote et à l'éligibilité.

Pour répondre à votre question sur la CNDP, il ne s'agit pas simplement d'une consultation, mais bien d'une délibération entre personnes plurielles, dont la qualité de citoyen fait la légitimité.

L'échantillon tiré au sort est extrêmement pluriel, conforme aux critères stricts que nous avions retenus. Il faut relever aussi l'engouement des personnes contactées, 35 % d'entre elles ayant spontanément répondu positivement à l'invitation.

Six groupes ont été constitués au sein de la convention - se loger, se nourrir, travailler-produire, consommer, se déplacer, ainsi qu'un groupe transversal, « l'escouade », qui traite des questions de financement et de la réforme de l'article 1er de la Constitution -, et trois sessions se sont déjà déroulées. La prochaine aura lieu les 10,11 et 12 janvier 2020, en présence du Président de la République, avec comme objectif d'affiner la réflexion pour déboucher sur des mesures très concrètes.

L'échantillon correspond parfaitement à la « petite France » décrite par le Premier ministre. Les citoyens tirés au sort sont très impliqués, ils sortent des murs, organisent des réunions publiques et travaillent beaucoup entre les sessions. Leur appétence à participer à cet exercice démocratique impressionne, alors que certains déclarent ne pas voter. On rejoint là le « cens caché » de nos modes de démocratie, mis en exergue par Daniel Gaxie.

Cet exercice montre selon moi toute l'importance d'articuler différentes formes de démocratie, représentative, sociale et participative. Comme le soulignait Hannah Arendt dans Condition de l'homme moderne, les pouvoirs ne s'annulent pas, ils se complètent et s'augmentent mutuellement.

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