Si l'on dit d'emblée que les parlementaires n'auront d'autre choix que d'avaliser les propositions de 150 citoyens, l'exercice ne peut que mal se terminer. Les parlementaires argumenteront, comme ils ont l'habitude de le faire, et leurs travaux seront suivis très attentivement par 150 citoyens plus particulièrement concernés.
Je ne crois pas être candide, juste profondément respectueux des institutions.
Vous parliez de concurrence volontaire avec la CNDP, mais l'exercice de la Convention est un peu différent, car les citoyens doivent aller jusqu'à proposer des mesures.
Les critiques sur les institutions démocratiques et les gens qui les composent sont récurrentes, y compris à l'encontre du CESE. La Convention peut être une réponse, parmi d'autres. En revanche, si on met ces différentes institutions en concurrence, le risque est très clair.
Selon Hannah Arendt, « le pouvoir, loin d'être un jeu à somme nulle, peut toujours s'accroître, car il ne connaît pas les limites physiques de la force individuelle confrontée à d'autres forces humaines ou à l'inertie de la matière. » L'existence d'autrui, plus qu'une limitation au pouvoir, en est sa condition même, le pouvoir ne pouvant surgir que d'une pluralité. La concurrence entre les institutions dégradera donc inévitablement le pouvoir de chacune d'elles.
Les parlementaires se plaignent parfois d'un manque d'indépendance par rapport à l'exécutif. À cet égard, il me semble que la Convention peut être un levier pour renforcer et revitaliser le Parlement.
Beaucoup de gens ne se retrouvent pas dans le système démocratique actuel, et je crains qu'à un moment, on ne passe d'un désir de démocratie participative à d'autres logiques plus brutales pour imposer les solutions d'une « avant-garde éclairée ». Ce n'est pas ce que je souhaite et, dans dix ans, je me vois toujours mener ce combat pour inclure toujours plus de personnes dans la décision publique.