Monsieur le président Requier, vous avez raison : c’est une réforme d’ampleur que nous voulons mettre en œuvre. Peut-être serait-il d’ailleurs plus juste de parler de refondation du système des retraites.
En effet, nous souhaitons en réalité substituer aux 42 régimes existants un seul régime qui permettrait que chaque euro cotisé par n’importe quel Français, quels que soient son métier, son statut ou son âge, puisse produire le même effet et ouvrir les mêmes droits.
Au lieu d’organiser la solidarité nationale par statut ou par profession, nous voulons l’organiser sur l’ensemble de la Nation. Cela ne me semble pas une mauvaise idée quand il s’agit justement de la solidarité nationale.
En outre, vous comprenez bien, monsieur le président Requier, que c’est une sorte de retour aux sources du projet initial de création d’un système de retraites. On se souvient – je ne m’en souviens pas personnellement, mais du moins l’ai-je lu – que les ordonnances Parodi de 1945 avaient in fine pour objectif la création d’un système universel. Nous estimons utile et même indispensable de créer aujourd’hui ce système universel.
C’est donc bien une refondation d’ensemble que nous proposons. Nous avons indiqué, dès le début de ce processus, que notre objectif n’était pas de faire, çà et là, telle ou telle petite économie, mais de dire la vérité aux Français.
Compte tenu des transformations du monde professionnel, du caractère haché des carrières, des changements d’activité professionnelle de nos concitoyens, du nombre de polypensionnés, de la complexité actuelle des systèmes, ou encore de la perte de droits que chacun subit quand il change trop souvent de système de retraite, il nous est apparu plus adapté aux temps qui viennent de créer ce système par points et par répartition, un système véritablement universel.
Nous avons très tôt dit que la France n’était pas soumise à des conditions démographiques radicalement différentes de celles que connaissent l’Allemagne, la Belgique, ou le Royaume-Uni. Ce sont les conditions auxquelles sont soumises toutes les grandes démocraties européennes, lesquelles ont, sans exception, tiré les conséquences des évolutions démographiques et conclu que la seule façon de préserver le pouvoir d’achat des actifs comme des pensionnés est de faire en sorte, progressivement, que chacun travaille un peu plus longtemps.
Il faut évidemment le faire de la façon la moins brutale possible, en respectant les choix de vie de nos concitoyens et les orientations qu’ils ont adoptées, dans leur vie professionnelle comme dans leur vie familiale, en fonction des prévisions qu’ils pouvaient faire.
Il fallait le dire clairement : c’est ce que nous avons fait, c’est ce que j’ai fait, tout à l’heure, devant le Conseil économique, social et environnemental, quand j’ai présenté un projet de réforme dont j’ai bien conscience qu’il est complexe : je ne saurais vous le présenter ici en deux minutes. Je m’excuse à ce propos d’avoir déjà largement dépassé mon temps de parole, en dépit des très justes exhortations de M. le président.