Intervention de Nadia Sollogoub

Réunion du 11 décembre 2019 à 15h00
Quelle politique énergétique pour la france ? quelle place pour edf — Conclusion du débat

Photo de Nadia SollogoubNadia Sollogoub :

Dans le cadre de l’espace réservé au groupe Union Centriste, nous venons de vous interroger, madame la ministre, sur la stratégie énergétique de la France et sur la place qu’y occupe notre électricien historique, EDF. Nous vous remercions de vos réponses.

La vision stratégique de long terme sous-tend l’ensemble du dossier de la politique énergétique.

Si les choix s’opèrent dans l’instantanéité d’un seuil de rentabilité économique, cela signifie que les enjeux environnementaux sont secondaires, ce qui n’est pas acceptable dans un contexte d’urgence climatique.

Les consommations individuelles, les mobilités, les pratiques de la société en général doivent se verdir et se décarboner, mais encore faudrait-il savoir comment. En effet, comment inciter le consommateur à acheter des véhicules électriques si l’électricité provient d’une centrale à charbon ou d’une source polluante ?

Si l’on veut gagner, il faut que les choix soient lisibles. On ne peut pas bâtir une stratégie sur des incohérences, le risque premier étant de perdre le consommateur en chemin. Or c’est lui, en grande partie, qui est la clé.

Le président Marseille l’a très justement rappelé, l’exemple de la filière nucléaire est emblématique. Celle-ci fut par le passé un choix stratégique fort, permettant une production décarbonée dont nous avons la maîtrise. Cependant, force est de constater que, déjà à l’époque, les visions stratégiques furent incomplètes et partielles, puisque l’épineuse question du traitement des déchets fut un peu « zappée ». À La Hague, nous voyons aujourd’hui des files d’attente de déchets, qui imposent des solutions de stockage d’urgence. On ne peut pas travailler comme cela.

À la croisée des chemins, au moment où les mobilités électriques vont entraîner des hausses de consommation, où le parc vieillit, où l’EPR a plombé les comptes, la France n’a pas les moyens de ses hésitations.

Le choix d’un mix énergétique cohérent doit se faire sur des bases stables et dans la durée. Pourtant, la PPE est encore en débat ! Son acceptabilité est indispensable, c’est une question de crédibilité.

On ne doit pas voir fleurir des projets éoliens déconnectés de la carte des vents. Vous nous avez rassurés sur le fait que vous comptiez exploiter au maximum les ressources hydrauliques, l’hydroélectricité étant à ce jour la seule énergie réellement renouvelable, flexible et non polluante. Vous avez entendu sur ce sujet combien les attentes des territoires sont fortes.

On ne peut se priver de faire une place à l’autoproduction, la ressource de proximité étant forcément la meilleure.

On ne peut déconnecter les politiques tarifaires et fiscales des politiques environnementales. Il faut se donner les moyens financiers de la transition.

On ne peut décider de baisser la part du nucléaire sans savoir comment la compenser.

On ne peut pas demander au secteur de l’industrie électrique de faire les frais, en maintenant l’équilibre de son modèle économique, de nos incohérences et de nos changements de cap.

On ne peut placer les agents d’EDF dans des situations incertaines et préjudiciables.

Il faut au contraire donner aux grandes compagnies d’électricité, dans un contexte où l’évolution technologique est fulgurante, les moyens de conserver l’équilibre dans la durée. De la stabilité du système dépend aussi la sécurité d’approvisionnement.

L’arrivée d’énergies renouvelables intermittentes, rémunérées avec des garanties spécifiques, a bousculé de manière significative les fournisseurs d’électricité européens. Ceux-ci ont été obligés de se restructurer et de redéfinir leurs stratégies.

Des changements structurels s’opèrent en amont, de nouveaux entrants arrivent sur le marché de l’énergie, y compris les autoconsommateurs. À l’autre bout de la chaîne, du côté des utilisateurs, on observe également des changements profonds, largement influencés par les politiques publiques, ce qui permet de souligner une nouvelle fois l’indispensable cohérence entre l’amont et l’aval, entre la production et l’utilisation, entre la composition du mix et le travail auprès des consommateurs et, entre les deux, la position stratégique des réseaux.

De nouveaux services sont devenus nécessaires, comme la flexibilité, l’aide au contrôle de la consommation, dans un univers énergétique devenu intelligent.

Le numérique, en contribuant en amont à lisser les apports dans le réseau de productions intermittentes et en répondant aux attentes des consommateurs en aval, sera une aide précieuse pour conserver l’efficience économique du système. La digitalisation doit permettre au client de devenir réactif aux changements de prix, ce qui constitue peut-être un levier pour aller vers une tarification plus environnementale.

Le paquet énergie propre – vous en avez parlé –, qui a été adopté au printemps par l’Union européenne, comporte plusieurs mesures susceptibles d’accélérer la reconfiguration du secteur. Il existe donc des pistes dans ce contexte en évolution permanente.

EDF peut s’adapter, à condition que l’on fasse ce choix et qu’on lui en donne les moyens financiers. Vous nous avez dit, madame la ministre, que nous savons où nous voulons aller. Reste maintenant à savoir avec qui : est-ce avec Hercule ? Est-ce avec Astrid ? Est-ce, oui ou non, avec EDF ?

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