Intervention de Jacques Toubon

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 21 novembre 2019 : 1ère réunion
Audition de M. Jacques Toubon défenseur des droits

Jacques Toubon, Défenseur des droits :

Ceci est regrettable. Je vous rappelle que vous pouvez me saisir sur de tels dossiers, d'autant plus que je rends, chaque année, un avis sur le PLFSS. Je suis également très intéressé par ce que vous me signalez sur la privatisation d'ADP pour laquelle je vais demander à mes collaborateurs des informations complémentaires sur ses conséquences. La question des assurances est, elle, avant tout économique et, vous l'avez dit, liée à la concurrence.

Sur le recrutement, il s'agit d'un problème récurrent. Lors de récents échanges, j'ai constaté la montée de l'exaspération de jeunes Réunionnais compétents, diplômés, de ne pouvoir être recrutés dans le département dans la fonction publique. Certains de vos collègues évoquaient l'idée d'une « préférence réunionnaise ». Cette situation est préoccupante, elle risque de décourager des familles qui font de grands efforts pour l'éducation de leurs enfants.

Monsieur Poadja, la situation de la Nouvelle-Calédonie est particulière, vous le rappeliez. Je vais regarder la question des critères sociaux pour les bourses que vous évoquiez. Sur le logement des étudiants, question que j'ai traitée, je suis inlassable ! Nous voyons des évolutions en cours sur la base de recommandations non pas du Défenseur des droits mais qui datent du temps de la HALDE ! L'exercice du Défenseur des droits est un exercice de grande patience et obstination. Il faut beaucoup de temps pour faire bouger les structures et les habitudes, pour faire comprendre combien certaines pratiques habituelles conduisent à des inégalités, à des dénis de droits. C'est vrai dans l'accès aux droits sociaux, comme les caisses de retraites, où les conseils d'administration prennent des décisions contraires au droit.

Sur les retraites, il s'agit malheureusement d'un problème national. Il y a plusieurs milliers de dossiers de retard à la Caisse régionale d'assurance maladie (CARSAT) d'Île-de-France. C'est un sujet important. Nous avons connu la situation de la caisse générale de la Guadeloupe. Malheureusement, ce qu'il se passe outre-mer ressemble à la situation générale, et cela tient du fait que les opérateurs sociaux sont en train de mettre en oeuvre des conventions d'objectifs et de gestion avec l'État qui les obligent à réduire leurs effectifs année après année. Les caisses ont des difficultés. Nous avions fait un travail sur l'accueil téléphonique, qui avait fortement diminué avec des renvois vers internet, provoquant l'impossibilité d'accéder à la caisse pour certains. La caisse nationale d'allocations familiales m'avait alors indiqué que les caisses devaient tenir compte depuis 1955 de 30 000 dispositions accumulées. Cela montre l'extrême complexité de ces sujets.

En ce qui concerne la santé, il faut un effort massif, notamment sur l'attractivité des postes de médecins. Il y a un taux de vacance au centre hospitalier de Cayenne qui n'est pas acceptable, comme le taux de renouvellement constaté.

La prise en charge y est de plus en plus difficile, ce qui rend nécessaire des évacuations sanitaires.

Deux questions me paraissent majeures aujourd'hui, particulièrement dans les départements en situation difficile comme la Guyane et Mayotte, ce sont l'éducation et la santé. Je pense particulièrement à la situation de l'enfant, qu'il soit français ou étranger. Quand je suis allé en 2016 en Guyane, les bureaux d'accueil pour les demandes d'asile avaient été fermés par le préfet. Durant cinq mois, les demandeurs d'asile n'étaient plus accueillis à Cayenne. Le département connaissait alors une vague d'immigration haïtienne à la suite d'un tremblement de terre et d'inondations. Le Conseil d'État a en partie donné raison au préfet, constatant des raisons légitimes pour la décision prise par celui-ci. Cela montre bien la difficulté, pour les grandes juridictions administratives comme le Défenseur des droits, de prendre en compte ces situations.

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