Intervention de Amélie de Montchalin

Commission des affaires européennes — Réunion du 4 décembre 2019 à 13h35
Institutions européennes — Débat préalable au conseil européen des 12 et 13 décembre 2019 en présence de mme amélie de montchalin secrétaire d'état auprès du ministre de l'europe et des affaires étrangères chargée des affaires européennes

Amélie de Montchalin, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes :

Ce Conseil européen est très attendu : c'est le premier rendez-vous des chefs d'État et de Gouvernement dans la configuration post-élections européennes maintenant complète. En effet, la Commission a pris ses fonctions ce week-end, quelques jours après l'approbation, par 461 voix pour, de sa feuille de route stratégique par le Parlement européen. Cette feuille de route, qui avait été adoptée à l'unanimité par le Conseil européen, est donc validée, tant sur le plan des personnes qui la portent que concernant ses objectifs stratégiques. La composition de la nouvelle Commission est équilibrée géographiquement, politiquement et en termes de parité puisqu'elle compte quinze hommes et douze femmes. Les cabinets des commissaires sont, eux aussi, paritaires. Cela permet un renouvellement des hommes et des idées. Je tiens à saluer notre commissaire français, Thierry Breton, qui détient un portefeuille-clé pour les emplois de demain. Là où nous devrons être défensifs, il devra nous protéger, mais il devra aussi mettre en place, de manière offensive, une vraie stratégie sur le marché intérieur, la défense, l'industrie, le numérique, etc. Le nouveau collège des commissaires s'est réuni aujourd'hui pour la première fois. Les cent premiers jours seront consacrés au climat, au numérique et à l'immigration.

Ce Conseil européen est aussi le premier à être présidé par Charles Michel qui a pris ses fonctions ce week-end. Il a déjà exprimé sa volonté de revoir les méthodes de travail du Conseil européen, pour que cette institution joue pleinement son rôle d'impulsion et d'arbitrage en favorisant des consultations en amont entre États membres. En effet, nous savons bien que ce n'est pas parce que nous enfermerons dans la même pièce, même durant de longues nuits, les 27 chefs d'État et de gouvernement qu'ils trouveront, comme par magie, des solutions. Tout un travail préparatoire est nécessaire - je vous expliquerai ce que j'ai effectué, pour ma part, à Prague, la semaine dernière.

Le Président de la République a rencontré Charles Michel, voilà quelques jours ; cette relation de travail constructive sera essentielle. Il s'agit d'un véritable nouveau départ pour l'Europe, qui fait suite aux dernières élections, qui ont été positives pour réveiller l'ambition européenne. Nous soutenons donc la présidente von der Leyen dans son ambition d'établir une Union plus forte, plus concrète, qui pourrait, dans cinq ans, apporter de vrais résultats aux citoyens.

Le principal sujet de ce Conseil européen sera le climat, première priorité de la Commission, du Conseil et du Parlement, qui a adopté la semaine dernière une résolution déclarant l'état d'urgence climatique. Nous souhaitons en particulier que le Conseil européen adopte l'objectif d'atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050. Or, vous le savez, nous n'étions que 24 pays, au mois de juin dernier, à y être favorables. Le 11 décembre prochain, la Commission présentera son projet de Green Deal. Pour une transition climatique efficace, nous devons non seulement définir un objectif, mais également y allouer des moyens et établir une cohérence entre les différentes politiques européennes.

C'est un signal très fort qui est envoyé par l'Europe au reste du monde, en pleine COP 25 - qui se tient en Espagne. Cependant, nous devons créer de la crédibilité, les citoyens et les acteurs économiques attendant que nous passions des paroles aux engagements, et des engagements aux actes. Nous devons par ailleurs revoir ce qui mérite d'être revu avant la COP 26, en novembre 2020, concernant notre trajectoire de réduction d'émissions de CO2.

Les mesures qui seront instaurées pour faciliter la transition, telle que le fonds de transition juste et la reconnaissance de la neutralité technologique des solutions permettant de réduire les émissions carbone, sont suffisamment crédibles pour convaincre les derniers États membres réticents, en particulier la Pologne, la Hongrie et la République tchèque.

Je me suis donc rendue à Prague, la semaine dernière, où la France et le groupe de Visegrad ont adopté une déclaration, que je vous transmettrai, concernant quatre points essentiels : le climat, le budget européen, l'élargissement et la conférence sur l'avenir de l'Europe. Le travail a été long, fastidieux, mais nous tenions à démontrer que, s'il y avait des demandes légitimes, il n'y avait pas de divergences insurmontables s'agissant des politiques à mener et des outils à élaborer.

Nous ne pouvons pas, par exemple, demander à des pays possédant un mix énergétique très carboné, de le décarboner par magie. Nous avons donc débattu, notamment, des nécessités budgétaires et du mécanisme d'inclusion carbone aux frontières. Les pays industriels ne peuvent pas être favorables à une transition qui entraînerait, pour eux, une perte d'emplois, alors même que le volume de CO2 au niveau de la planète ne baisserait pas, puisque cette production serait délocalisée dans les pays qui ne disposent pas des mêmes normes que nous. Nous nous sommes assurés que, en nous appuyant sur le régime des quotas carbone ETS, nous pouvions créer un système qui ne soit ni une taxe ni une mesure protectionniste, et qui serait donc recevable par l'OMC.

S'agissant du budget européen, vous vous êtes interrogés sur les nouvelles propositions finlandaises.

Nous nous trouvons effectivement dans une phase cruciale et nous détenons, avec la présidence finlandaise, une nouvelle boîte de négociation. Le budget proposé est de 1,07 % du RNB. Les évolutions sont positives, nous devons le reconnaître, même s'il nous reste du travail - ce qui est bien normal, puisque nous ne sommes pas à la veille de la signature.

Nous avons notamment obtenu une belle avancée sur la PAC. Une vingtaine de pays se sont fortement mobilisés pour expliquer, alors que nous demandons chaque jour plus aux agriculteurs, que nous ne pouvons pas leur retirer des moyens.

Il est important de travailler sur les premier et deuxième piliers pour nous assurer que nous disposons des outils et des aides correspondant aux besoins de notre pays. Nous voulons stabiliser le revenu agricole en France, et cet abondement de 10 milliards d'euros supplémentaires de l'enveloppe de la PAC rend cela possible. Ce n'est pas encore acté, mais c'est possible.

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