Nous avons calculé que, à l'échelle française, si nous abondions l'enveloppe de la PAC au niveau européen de 8 à 10 milliards d'euros, nous étions en mesure d'apporter à nos agriculteurs une enveloppe stabilisée par rapport au cadre financier pluriannuel (CFP) de 2014-2020. Certes, un travail technique doit être réalisé - nous en parlerons si vous le souhaitez.
Je vous remercie d'ailleurs pour le soutien politique, d'influence, qui a été le vôtre et celui de tous les parlementaires français qui, lorsqu'ils rencontrent leurs homologues, font avancer le débat.
L'autre progrès pour la France est la proposition de suppression définitive des rabais.
Nous avons également bien avancé sur les ressources propres, alors que tous les États membres y étaient, au départ, opposés. Nous en discutons maintenant avec une majorité de pays, or c'est la clé pour trouver un accord. En effet, nous ne trouverons pas de solution budgétaire sans mise en place de nouvelles ressources propres, qui permettraient d'élaborer un budget dont le montant dépassera la seule somme des contributions nationales. Pour répondre à votre question, monsieur le président, oui, c'est un préalable à la discussion. Car si nous ne disposons pas de ressources suffisantes, il sera difficile de mener des politiques européennes. Ce point technique n'est pas un gadget de fin de négociation, car les pays qui ont de grandes ambitions budgétaires pour l'Europe ne pourront pas trouver d'accord avec ceux qui ne souhaitent participer qu'à hauteur de 1 %.
Dans ce but, des avancées ont été obtenues sur la ressource plastique. Si nous avons bien en tête le mécanisme d'inclusion carbone aux frontières, nous devons également envisager que le budget puisse être alimenté par la taxe digitale, le cas échéant, et la taxe sur les transactions financières - des taxes qui s'appliqueraient à des personnes qui ne paient pas aujourd'hui d'impôt. Soyons clairs : les ressources propres ne sont pas des impôts déguisés pour les contribuables européens. Le mécanisme d'inclusion carbone par exemple, permet de faire payer les importateurs qui bénéficient du marché intérieur sans y contribuer.
Nous avons aussi réussi, et c'est important pour les territoires que vous représentez, à préserver la catégorie des régions « en transition » élargie, afin que nos régions puissent bénéficier pleinement des fonds européens.
Nous avons également un travail à mener, en France, en vue de simplifier l'accès des acteurs français locaux aux fonds européens. Vous avez peut-être entendu les annonces que j'ai faites lors du congrès des maires, à la fois sur la mission d'inspection que nous réaliserons et sur la consultation que nous lancerons, notamment à la suite des travaux de Mmes Colette Mélot et Laurence Harribey. - - dont le diagnostic est très clair. Il nous reste maintenant à agir et à nous assurer qu'entre 2021 et 2027, tous les fonds que je viens d'évoquer puissent être activés et disponibles en France.
Il nous reste également du travail pour porter notre ambition à la hausse s'agissant du climat. Nous soutenons les schémas écologiques obligatoires de la PAC, et nous sommes favorables au renforcement des conditionnalités sociales.
S'agissant du FEDef, monsieur Poniatowski, il est inacceptable de diviser ses moyens par deux. Il s'agit d'un instrument essentiel à notre souveraineté. Nous ne pouvons pas, alors que les défis sont immenses, admettre que des questions stratégiques se posent et considérer que soutenir l'émergence d'une vraie industrie européenne de défense ne soit plus un objectif. Cela a été clairement indiqué lors de la réunion des ambassadeurs des différents pays à Bruxelles, et je le dirai avec la même conviction au conseil Affaires générales (CAG), mardi. Ce Conseil européen sera l'occasion de rappeler ces priorités, d'avancer sur un compromis. Charles Michel, qui sera saisi du sujet, travaillera pour qu'un accord soit trouvé début 2020.
Concernant la conférence sur l'avenir de l'Europe, nous avons présenté une proposition franco-allemande pour avancer sur ce sujet, et notamment pour que le Conseil se saisisse de ce projet qui est activement porté par le Parlement européen et la Commission.
Nous ne devons pas nous lancer tête baissée dans un débat institutionnel, simplement pour le désir de mener un tel débat. L'objectif est de rendre l'Union européenne plus efficace et de passer au crible toutes nos politiques, en nous posant trois questions très simples : créent-elles suffisamment de souveraineté ? Créons-nous suffisamment de solidarité et de convergence entre nous, et au sein de nos pays - luttons-nous contre les inégalités, partageons-nous assez ? Enfin, sommes-nous suffisamment réactifs ?
Deux autres sujets sont importants. D'une part, mieux prendre en considération les citoyens européens dans la décision européenne ; d'autre part, rétablir la confiance démocratique. Comment sont traités les sujets d'influence étrangère dans les élections, de financement des partis européens, de transparence, de conflits d'intérêts et des listes transnationales et de spitzenkandidats, pour qu'au prochain cycle, en 2024, une confiance plus grande et réciproque soit établie avec les citoyens. Le Conseil européen pourrait donner mandat au CAG de poursuivre les travaux.
En ce qui concerne la politique étrangère, nous aurons des discussions sur l'Afrique et le Sahel, notamment à la suite des échanges sur le partenariat entre l'Union européenne et l'Afrique, qui se tiendront lundi prochain, lors du conseil Affaires étrangères (CAE). Par ailleurs, les chefs d'État et de gouvernement pourront inviter la Commission et le haut représentant Josep Borrell à initier un travail de redéfinition du cadre stratégique de la relation entre l'Union et l'Afrique. Une stratégie plus claire, plus organisée, doit être définie. Nous manquons d'un grand nombre d'outils, et ceux que nous avons manquent parfois de cohérence entre eux.
S'agissant du Sahel, dans le contexte de la mort tragique de nos 13 soldats, nous allons demander à l'Union européenne de renforcer son action dans la région. Nous allons également faire en sorte que le partenariat pour la stabilité et la sécurité au Sahel, annoncé au G7 à Biarritz, prenne toute sa place.
Enfin, je souhaiterais, monsieur le sénateur, vous rassurer sur l'opération Barkhane et sur l'unité des forces spéciales européennes Takuba. Nous menons un travail de conviction en vue de la création d'une véritable coalition. La République tchèque, l'Estonie et la Belgique sont maintenant prêtes à rejoindre les forces spéciales Takuba. Le Portugal s'interroge sur une participation à l'opération Barkhane et la République tchèque prendra le commandement de l'opération EUTM Mali dans quelques jours.
Alors, certes, nous pourrions faire davantage ensemble, mais nous ne pouvons pas, dans nos commentaires, donner l'impression que nous sommes seuls. Nous pourrions être plus nombreux, mais nous ne sommes pas seuls. J'en profite pour saluer l'engagement quotidien des armées présentes sur le terrain.
Lors de la prise de fonctions des nouvelles institutions européennes, nous réitèrerons notre ambition en matière de défense et de sécurité. Le sujet de la Turquie sera abordé, notamment à la lumière des dernières évolutions en Méditerranée orientale, avec la Grèce qui est très au fait des mouvements aux frontières, notamment migratoires, et au sein de l'OTAN.
Nous reviendrons sur les résultats du sommet quadripartite - France, Royaume-Uni, Allemagne et Turquie - qui s'est tenu à Londres, en marge du sommet de l'OTAN. Sera également étudiée la question de la Russie, puisque le sommet au format Normandie se tiendra lundi à Paris, avec la Chancelière Merkel, le Président Poutine et le Président Zelenski, sur l'invitation de notre Président de la République. Ce sommet sera l'occasion d'obtenir un réengagement politique au plus haut niveau pour la mise en oeuvre des accords de Minsk, la France refusant la pérennisation du statu quo sur ce dossier. Nous souhaitons, diplomatiquement et économiquement, soutenir pleinement l'Ukraine et parvenir à la consolidation d'un véritable cessez-le-feu.
Par ailleurs, un sommet de la zone euro est prévu, dont l'objectif est bien de parvenir à avancer vers l'union bancaire. Aujourd'hui se tient la réunion de l'Eurogroupe ; les discussions se poursuivent sur les modalités, le calendrier et les différentes étapes à franchir pour que la position allemande, encourageante, puisse converger avec ce que les autres partenaires souhaitent créer.
Concernant le mécanisme européen de stabilité, il s'agit davantage d'une question de politique intérieure italienne que de politique strictement européenne. Il faudra peut-être un peu plus de temps pour ratifier l'accord, mais les discussions menées, ce jour, par Bruno Le Maire avec ses partenaires sont importantes. Si nous avons avancé sur la supervision unique et le cadre de résolution, il reste beaucoup à faire, notamment sur les garanties et le traitement des risques souverains dans les bilans bancaires.
Vous m'avez également interrogée sur Airbus et Boeing. Le rapport du panel de l'OMC a été publié le 2 décembre dernier. Nous avons noté des erreurs de droit dans cette démarche, et nous étudions, avec la Commission, la possibilité de faire appel de cette décision rendue par l'OMC. Sur le fond, la situation est la même. Les États-Unis et l'Union européenne sont condamnés pour avoir subventionné leurs avionneurs.
L'Union européenne est disposée à trouver un accord à l'amiable, mais les États-Unis sont pour l'instant fermés. Cette attitude est contraire à ce que nous pouvons attendre d'un allié, et Bruno Le Maire l'a condamnée très clairement, après les épisodes très récents, concernant notamment la taxe sur le digital et les représailles commerciales envisagées. Nous nous mobilisons, avec l'Union européenne, pour accompagner la filière viticole. Nous sommes parvenus à instaurer un certain nombre de mécanismes de solidarité pour la filière, notamment dans sa promotion touristique et à l'étranger. Sachez que nous allons continuer de défendre nos intérêts en cherchant la désescalade, mais nous avons toujours déclaré que nous pourrions répliquer. Nous possédons la liste des produits américains que nous pourrions taxer en retour. Ce n'est cependant pas la voie que nous privilégions car, en matière commerciale, ce genre d'escalade réciproque est en général néfaste aux deux partenaires.
Enfin, je reviendrai, si vous le souhaitez, sur l'élargissement, mais je préfère laisser place à vos questions.