Intervention de Jacqueline Gourault

Réunion du 7 janvier 2020 à 14h30
Plan d'action en faveur des territoires ruraux — Débat organisé à la demande du groupe les républicains

Photo de Jacqueline GouraultJacqueline Gourault :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à saluer l’initiative du groupe Les Républicains, qui est à l’origine de la tenue de ce débat consacré à notre agenda rural.

Je me réjouis que le thème des ruralités soit l’objet de débats réguliers dans votre assemblée ; je sais combien il vous tient à cœur. Je me souviens que, peu après mon arrivée au ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, il m’apparut que ce ministère aurait tout aussi bien pu s’appeler « ministère de l’aménagement du territoire » : la cohésion présente dans sa dénomination implique en effet un tel travail d’aménagement.

Plusieurs groupes ont été à l’origine de telles discussions : je me souviens notamment de la tenue, sur l’initiative du groupe RDSE, d’un débat sur le thème : « La ruralité, une chance pour la France. » En mars dernier, le même groupe a pris l’initiative d’un autre débat, qui visait à dresser le bilan des dispositifs de soutien aux territoires ruraux les plus fragiles. Plus récemment encore, la délégation aux collectivités territoriales de la Haute Assemblée a organisé un colloque sur le rôle des collectivités territoriales comme levier de développement pour la ruralité.

Toutes ces initiatives témoignent à l’évidence du vif intérêt que vous portez à ce sujet. Je ne puis que me réjouir que nous ayons cette préoccupation en commun.

Avant de vous présenter les grandes lignes de l’agenda rural du Gouvernement, je tenais à vous faire part de quelques-unes de mes convictions les plus profondes en la matière.

Je crois tout d’abord que, pour donner corps à la notion de cohésion des territoires, ou d’aménagement du territoire, il faut cesser d’opposer les territoires entre eux et, notamment, les villes et les campagnes.

Je suis également convaincue qu’il est de notre devoir de battre en crèche certaines idées reçues qui ont cours au sujet des territoires ruraux.

On entend ainsi trop souvent dire que les Français privilégient toujours la ville au détriment de la campagne. C’est inexact : aujourd’hui, comme la presse l’a relevé, les territoires ruraux accueillent plus de nouveaux habitants que les villes. Non seulement l’exode rural est terminé, mais on observe désormais un phénomène inverse : les campagnes gagnent chaque année 100 000 habitants.

Je m’empresse de préciser – nous l’avons tous ici constaté – que ces nouveaux habitants ont des demandes importantes quand ils décident de renouer avec la ruralité. C’est un vrai enjeu.

Selon une autre idée reçue, les territoires ruraux seraient des territoires paupérisés en voie de relégation. Certes, je ne nie pas les difficultés de certains territoires, que je connais d’ailleurs très bien. J’estime néanmoins qu’il faut également réaffirmer la richesse et la potentialité de ces territoires, ainsi, plus largement, que la pluralité des ruralités. Certaines se portent mieux que d’autres, et, à l’évidence, il faut aider celles qui rencontrent le plus de difficultés.

Une telle vision des territoires ruraux, essentielle pour la cohésion territoriale et l’aménagement du territoire, est portée par le Gouvernement au travers de son agenda rural. Celui-ci exprime un engagement pris par le Président de la République en réponse à une demande de l’Association des maires ruraux de France (AMRF) et surtout de son président, Vanik Berberian, que je tiens à saluer.

Au-delà du projet national, il est important de rappeler que cet agenda rural est également un projet européen. En novembre 2018, le Parlement européen a en effet adopté une résolution appelant la Commission et le Conseil à mettre en place un agenda rural européen. La France a été le premier État membre à soutenir cette démarche et à la mettre en œuvre à l’échelon national.

C’est dans ce contexte que j’ai mis en place une mission composée d’élus ruraux. J’ai souhaité m’appuyer sur leur expérience et sur leurs propositions, avec l’objectif, à la fois simple et complexe, d’améliorer la vie quotidienne des habitants des territoires ruraux.

Après plusieurs mois de travaux, ces élus m’ont remis un rapport où figuraient 200 propositions. Le Gouvernement s’est appuyé sur ces recommandations pour élaborer l’agenda rural annoncé par le Premier ministre le 20 septembre dernier à l’occasion du congrès de l’AMRF à Eppe-Sauvage, dans le Nord.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cet agenda rural est le premier plan d’action mené par un gouvernement en faveur des ruralités à regrouper des enjeux aussi larges que la transition écologique, l’agriculture, l’éducation, la santé, la formation, l’emploi, le développement économique et la culture.

Plus encore, il s’agit du premier plan d’action à destination des territoires ruraux qui ait été élaboré en partant du terrain et des propositions d’élus, et non d’idées préconçues et imposées depuis l’échelon national. Il inaugure en cela le commencement d’une nouvelle politique publique : ce sera la politique des ruralités, qui a tout autant le droit d’exister que la politique de la ville, menée depuis quarante ans.

Cet agenda constitue désormais le cadre gouvernemental de mise en œuvre des politiques publiques d’aujourd’hui et de demain en faveur des territoires ruraux. S’il comporte à ce jour 181 mesures, il a vocation à s’enrichir de nouvelles actions dans les mois et années à venir. Toutes les propositions sont naturellement bienvenues, car l’ambition du Gouvernement est bien de disposer d’un outil vivant et inscrit dans la durée.

Depuis l’annonce de ce plan, à la dernière rentrée, tout l’enjeu pour le Gouvernement est d’assurer la mise en œuvre rapide et concrète des mesures concrètes qu’il comporte.

C’est dans cette perspective que je présiderai personnellement un comité de suivi de l’agenda rural toutes les six à huit semaines. La première réunion de ce comité s’est tenue à la fin du mois de novembre dernier, en présence de six ministres et avec une représentation de tous les ministères. De manière inédite, j’ai souhaité y associer les auteurs du rapport de la mission « Agenda rural », tant parlementaires que représentants des associations d’élus, qui pourront ainsi suivre la mise en œuvre complète de ce plan d’action.

Depuis le 1er janvier, plusieurs dispositifs de l’agenda rural sont d’ores et déjà effectifs. Il s’agit, notamment, des mesures de soutien au petit commerce dans les territoires ruraux.

Dans la dernière loi de finances, nous avons en effet ouvert la possibilité, pour les collectivités qui le souhaitent, de mettre en place des exonérations fiscales en faveur des petits commerces dans les communes de moins de 3 500 habitants : pour la première fois, l’État compensera cette exonération de cotisation foncière des entreprises, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, et de taxe foncière sur les propriétés bâties, à hauteur de 33 %.

Nous déployons en outre, toujours depuis le 1er janvier dernier, les 460 premiers espaces France services, un peu partout sur le territoire national. En effet, la présence des services publics dans les territoires ruraux est un enjeu majeur.

Nous avons souhaité déployer ce nouveau réseau pour offrir aux habitants de ces territoires un service public de proximité et de qualité. Nous avions tous fait le constat que les services publics avaient beaucoup reculé sur nos territoires. Nous poursuivrons évidemment le déploiement de ces espaces ; j’y reviendrai à l’occasion des questions qui me seront posées à ce sujet.

Enfin, l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), dont la création était effective sur le plan juridique depuis le 1er novembre dernier, est opérationnelle depuis le 1er janvier : cet outil sera particulièrement important pour les projets de territoires.

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