Cheminots, agents des transports urbains, salariés des transports routiers, des raffineries, d’EDF, d’Air France, enseignants, avocats, personnels paramédicaux, notamment : je tiens tout d’abord, monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à rendre hommage à tous ces salariés qui, depuis maintenant plus d’un mois, se mobilisent courageusement contre le projet de réforme des retraites, à travers un mouvement social de grande ampleur, largement soutenu par la population.
Malgré cela, monsieur le secrétaire d’État, votre gouvernement a décidé de faire passer en force cette réforme, sans concertation. Votre attitude est irresponsable quand on sait qu’une très large majorité des citoyens est opposée à ce projet, et ce depuis la sortie du rapport de M. Delevoye, feu M. Retraites du Gouvernement, auquel les mensonges et la tricherie ont valu d’être aujourd’hui sur le banc de touche.
Et ce n’est pas vous, monsieur le secrétaire d’État, qui changerez la donne. Vous n’avez en réalité qu’un seul but : alimenter les fonds de pension gérés par BlackRock !
Face à la colère massive et à la détermination des travailleurs de l’ensemble des secteurs professionnels, votre gouvernement a certes été contraint de descendre de sa tour d’ivoire… Mais les pseudo-concessions accordées sont très loin de satisfaire la population. Au contraire, plus les membres de votre gouvernement y vont de leurs annonces, plus ils renforcent l’élan de solidarité interprofessionnelle, car plus personne n’est dupe.
Tout le monde a bien compris en effet que cette réforme visait à obliger les salariés à travailler plus longtemps pour toucher moins de pension, d’autant que vous avez clairement annoncé votre volonté de bloquer les dépenses des retraites à 14 % du PIB. Avec des retraités plus nombreux et des dépenses bloquées, il faudra nous expliquer comment le montant des pensions ne baissera pas mécaniquement.
Malheureusement pour vous, la lutte sociale a permis de mettre à jour toutes les duperies de ce prétendu « système universel de retraite par points ».
L’universalité, mise en avant, n’est qu’une illusion pour masquer le véritable objectif : niveler les droits sociaux vers le bas.
Vous voulez d’abord inciter les salariés à travailler plus longtemps, avec un recul de l’âge de départ à la retraite à taux plein à 64 ans, voire au-delà, âge pivot ou pas.
Le Gouvernement va faire payer aux salariés son désengagement du financement des retraites. Les politiques successives que vous poursuivez – exonération de cotisations sociales et casse de l’emploi – entraînent un chômage de masse et minent les comptes de la sécurité sociale. Vous organisez le déficit de la sécurité sociale pour mieux la casser !
Vous vous attaquez également directement au montant des pensions de retraite.
Vous le faites, d’une part, par le biais du système par points, un système bien connu des Suédois et des Allemands ; or les retraités de ces pays sont les plus pauvres d’Europe. Ce régime permet en effet d’ajuster la valeur du point en fonction des variations du marché. Ainsi, les salariés ne connaîtront le montant de leur pension qu’au moment de partir à la retraite, avec comme mauvaise surprise un faible revenu qui les incitera malheureusement à travailler plus pour augmenter leur pension. Sincèrement, je pense que vous ne mesurez pas – ou alors vous n’en avez que faire – ce que cela représente, par exemple pour des ouvriers du bâtiment ou d’usine, des déménageurs ou des femmes de ménage, de travailler encore plus longtemps.
Vous le faites, d’autre part, en calculant le montant des pensions sur l’ensemble de la carrière des salariés du public comme du privé. Les salariés aux revenus modestes, dont la carrière a été entrecoupée de périodes de chômage, ceux qui sont entrés tard sur le marché du travail, ou encore les femmes, qui sont déjà pénalisées par les inégalités salariales et sociales, feront partie des plus grands perdants de votre réforme.
Pour notre part, nous sommes dans le camp de ceux qui défendent le progrès social, et j’attire à ce titre votre attention sur la pétition concernant les retraites, en ligne depuis dimanche, dont nous sommes signataires avec d’autres personnalités politiques et syndicales, de même que des artistes et des chercheurs. Nous vous demandons encore une fois de retirer votre projet de réforme de retraite par points et d’améliorer notre système de retraite par répartition sur ses bases actuelles. Nous avons des propositions, les syndicats vous ont aussi fait part des leurs, mais, évidemment, vous n’avez pas écouté !
En réponse, vous avez envoyé votre texte au Conseil d’État et l’avez inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dès le 17 février. Véritable provocation ! Mais les salariés restent déterminés et seront de nouveau dans la rue dès jeudi. Nous serons à leurs côtés dans la lutte pour exiger le retrait de votre projet de loi néfaste pour les salariés, toutes catégories confondues !