Intervention de Jean-Michel Blanquer

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 8 janvier 2020 à 16h30
Réforme du baccalauréat — Audition de M. Jean-Michel Blanquer ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et de Mme Frédérique Vidal ministre de l'enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation

Jean-Michel Blanquer, ministre :

Je ne partage pas du tout la qualification de la situation donnée par Mme Blondin. Tout changement suscite des remarques et des inquiétudes. Le changement que nous opérons est très important, avec des effets directs et indirects et j'accueille avec beaucoup de respect toutes les questions qu'ils suscitent. Nous l'assumons.

Il n'y a pas eu d'impréparation : les grandes lignes de notre réforme figuraient dans le programme du candidat Emmanuel Macron. Dans sa déclaration de politique générale de juin 2017, le Premier ministre a annoncé que la réforme concernerait le baccalauréat de 2021, ce qui nous a donné quatre ans pour nous préparer. Un travail de consultation avec les organisations syndicales a été engagé dès la fin de l'année 2017 avec Pierre Mathiot et au cours duquel 40 000 lycéens ont été consultés. La réforme s'est appuyée sur des idées qui étaient présentes depuis plusieurs années dans le débat public. Pierre Mathiot a remis son rapport au début de l'année 2018. J'ai mené de nombreuses concertations et ajusté le projet de réforme en fonction des remarques formulées par les organisations entendues - syndicats, parents d'élèves, lycéens -, afin d'aboutir à une réforme équilibrée alliant objectivité et simplicité. La réforme a été définie au premier semestre de l'année 2018, ce qui nous a permis de préparer la rentrée 2019 au cours de 2018 et 2019.

Le Conseil supérieur des programmes (CSP) a mené un travail très dense sur les programmes, qui a suscité de nombreuses satisfactions, par exemple en physique-chimie dont les programmes ont été remusclés.

Nous n'avons pas rencontré de problèmes majeurs sur les emplois du temps. C'est une réussite collective dont je veux saluer tous les acteurs, notamment les professeurs : la société française peut leur en être reconnaissante. Même ceux qui ne sont pas d'accord avec notre réforme en ont compris le sens. Ce n'est pas le changement pour le changement : notre objectif est de rehausser le niveau général des élèves. Cela favorise l'égalité et l'ascension sociale.

Il est exact qu'il y a eu des problèmes de connexion. Nous avons besoin de moderniser notre système numérique et nous y travaillons. Les améliorations prendront du temps.

J'entends dire que les élèves seraient stressés par le contrôle continu. Mais nous avons voulu mieux répartir le travail sur l'année et éviter le bachotage au moment des épreuves du baccalauréat. Les élèves vont désormais travailler en continu. Les épreuves communes de contrôle continu (E3C) comptent pour moins de 2 % de la note finale : l'élève a le droit à l'erreur et ces épreuves lui permettent de se mettre en jambe pour réussir la suite. Au moment des épreuves du baccalauréat fin juin, la presse se faisait également l'écho du stress des lycéens.

Vous avez évoqué l'abandon d'une spécialité au mois de février. L'élève est invité à réfléchir dès le début de l'année. En matière de choix d'orientation et de spécialités, la réforme ne provoque rien d'abrupt : au contraire, on diminue le caractère abrupt de la situation antérieure, qui très souvent faisait appel au hasard. Lorsque tout se passe à la dernière minute par le hasard ou le tirage au sort, ce sont les plus défavorisées qui en font les frais. Nous plaçons l'orientation sur une logique beaucoup plus continue. On me dit qu'un élève de seconde ne saurait dire le métier qu'il veut exercer. Certes ! Et c'est bien normal. Mais il peut se poser des questions, au moins sur les grands domaines d'intérêt, et il est bon de le faire le plus en amont possible dans sa vie - quitte à faire ensuite des choix différents. Avoir trois spécialités en première et deux en terminale permet de se faire une idée de ses intérêts et passions.

Vous m'avez interrogé sur la place des langues régionales, parce qu'elles n'entreraient plus dans les enseignements de spécialité. C'est exactement l'inverse : c'est nous qui avons inventé les enseignements de spécialité ! Et il est possible de tenir des enseignements de spécialité en langues régionales. Il y a là un potentiel considérable de valorisation de ces langues. Reste à faire, sans doute, un travail de stimulation et de créativité pédagogique pour que ces enseignements soient plus attractifs. Je me place en situation de partenariat avec les défenseurs des langues régionales, et je regrette tout ce qui peut créer des dimensions de conflictualité qui n'ont pas lieu d'être. Lors des débats au Sénat sur la loi pour l'école de la confiance, le sujet des langues régionales a progressé, et je regrette fortement que les commentaires du lendemain aient cherché à décrire, là où il y avait des progrès, des régressions. Il est toujours déplorable que des avancées soient décrites comme des reculs. Nous ne menons pas une politique de frein aux langues régionales. Il y a évidemment une politique de canalisation du sujet, qui est aussi une politique de stimulation et de modernisation. Ceux qui travaillent sur cet enjeu savent qu'ils sont écoutés dans mon ministère, en tous cas.

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