Intervention de Frédérique Vidal

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 8 janvier 2020 à 16h30
Réforme du baccalauréat — Audition de M. Jean-Michel Blanquer ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et de Mme Frédérique Vidal ministre de l'enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation

Frédérique Vidal, ministre :

Vous avez raison, monsieur Lafon, la réussite des étudiants doit aussi prendre en compte, avec une aide supplémentaire et un accompagnement particulier, l'ensemble des classes sociales. Nous sommes convaincus de l'efficacité des cordées de la réussite et des parcours d'excellence. Nous souhaitons amplifier ces mesures, comme l'ont proposé les grandes écoles, qui suggèrent d'aller très tôt repérer et accompagner les jeunes au travers de binômes étudiants. Nous envisageons même de faire démarrer ces dispositifs dès le collège. Déjà, des polytechniciens sont déployés sur l'ensemble du territoire. Nous pourrions leur confier ces missions particulières qui consistent à encadrer des jeunes méritants mais qui n'ont pas autour d'eux des modèles qu'ils pourraient avoir envie de suivre.

La Conférence des grandes écoles s'est aussi questionnée : les grandes écoles ont déjà fait énormément de choses pour augmenter la mixité sociale en leur sein, mais certaines peuvent encore améliorer les choses. Vous me demandez si je souhaite être plus directive : non. En effet, il n'y aurait rien de pire pour des jeunes que de se dire qu'ils sont entrés dans ces grandes écoles pas tout à fait parce qu'ils étaient aussi excellents que les autres, mais parce qu'il y avait des quotas. Je suis favorable à la mise en place de quotas après le baccalauréat, mais, au niveau des concours, cela me paraît difficile. J'ai donc demandé aux grandes écoles de se fixer des objectifs ambitieux dans le temps, mais qui respectent la façon dont elles sélectionnent leurs étudiants. Ce sera plus efficace, quoique moins spectaculaire que d'annoncer tel ou tel pourcentage.

Enfin, il est extrêmement difficile de mesurer la totalité de ce que signifient des critères sociaux. Certains jeunes ne sont pas boursiers selon les critères sociaux, mais n'en ont pas moins besoin d'un accompagnement particulier. C'est pourquoi j'ai demandé à la Conférence des grandes écoles de penser aussi à la vie et à l'intégration dans les grandes écoles. On peut parfaitement ne pas être boursier sur critères sociaux et néanmoins être très gêné d'être invité à aller faire une partie de tennis à l'issue des cours, parce qu'on n'a jamais pratiqué ce sport... L'intégration sociale ne se limite pas aux bourses sur critères sociaux. Nous avons instauré des quotas pour l'entrée des boursiers dans le supérieur, nous les travaillons et, année après année, nous les augmentons. En effet, un examen n'est pas un concours. Certaines universités ont encore un faible nombre de boursiers. Nous les accompagnons dans leur démarche, mais à quoi bon vouloir multiplier d'un seul coup par dix le nombre de boursiers ? Mieux vaut que ce soit fait de manière consciente, voulue, pensée par les établissements eux-mêmes.

Dans le décret relatif à la réforme des études de santé, nous avons effectivement fixé un pourcentage d'accès. Lorsque les filières de santé existent sous la forme d'un portail ou d'une licence, nous avons choisi de fixer du 70/30 pour le moment, mais certaines universités dotées de CHU ont décidé de faire uniquement des licences avec une option « accès santé », et de ne plus avoir de portail d'accès aux études de santé. Tous les étudiants qui seront inscrits dans ces licences « accès santé » seront très probablement des étudiants dans un parcours de réussite, qu'ils intègrent ou non les formations de santé en deuxième année. La diversité sociale et la démocratisation en santé peut se faire de plusieurs façons. Par exemple, beaucoup de jeunes ne se déplaçaient pas dans des villes universitaires. Alors qu'il y avait un peu plus de 30 villes universitaires qui offraient un accès aux études de santé, celles-ci sont désormais plus de 100. C'est aussi une façon de démocratiser les choses. La deuxième manière de procéder, c'est de prévoir qu'en cas de redoublement ou d'échec, l'on puisse se réorienter rapidement. Aujourd'hui, dans certaines familles, au bout d'un an d'échec, on arrête les frais. Les changements que nous opérons font que, dans tous les cas, l'étudiant pourra rebondir et revendiquer une réussite.

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