Le changement climatique est l'un des grands défis auquel doit faire face l'agriculture. Cette dernière représente environ 20 % des émissions de gaz à effet de serre de notre pays ; elle doit donc participer à l'effort de réduction des émissions. Mais l'agriculture a la particularité d'être à la fois une source de pollution diffuse par ses émissions de CO2 et un des leviers-clé des politiques d'atténuation : elle est en effet capable de séquestrer du carbone, notamment si elle développe des pratiques agroécologiques. Par ailleurs, elle est aussi le secteur le plus directement impacté par les dérèglements climatiques : le réchauffement entraîne des baisses de rendements pour certaines cultures, ainsi qu'une augmentation des aléas climatiques. Tout cela est aujourd'hui bien documenté. L'agriculture doit donc également réaliser des efforts d'adaptation au changement climatique.
Un autre grand défi auquel est confronté ce secteur est le défi démographique, avec en perspective une hausse importante de la population mondiale, mais aussi française. Il y aura plus de monde à nourrir, mais avec moins d'agriculteurs, puisque, c'est un autre aspect du défi démographique, la population agricole française va fortement baisser dans les années qui viennent.
À cela s'ajoutent des changements au niveau de la consommation : apparition d'attentes nouvelles, qui vont dans le sens de ce que nous pourrions appeler une alimentation durable, même si ces attentes ne se traduisent pas forcément encore sous formes d'actes d'achat ; essor de la problématique du bien-être animal, qui modifie les conditions d'élevage et d'abattage et constitue un levier de changement de nos régimes alimentaires ; prise en compte des enjeux nutritionnels et de l'impact de l'alimentation sur la santé. On observe ainsi une baisse tendancielle de la consommation de viande et, au sein des produits carnés, des effets de substitution, avec une baisse marquée de la consommation de viande rouge au profit de la viande blanche. Sommes-nous devant des tendances lourdes de la consommation, qui vont modifier profondément le système alimentaire ? Il est encore un peu tôt pour le dire, même si l'on doit constater que ces tendances ont une consistance qui se renforce année après année.
Enfin, on observe des transformations dans le champ de la production, accompagnées ou incitées par des politiques publiques. En schématisant, on a assisté depuis plus de soixante ans à une croissance très forte de la productivité agricole, qui a permis de répondre à l'enjeu de la sécurité alimentaire, mais qui s'est faite au détriment de l'environnement et de l'emploi agricole. Les pollutions diffuses se sont accentuées, avec des atteintes à la qualité de l'air et de l'eau, avec de fortes émissions de gaz à effet de serre et des atteintes à la biodiversité. Depuis vingt ans, des efforts importants ont été accomplis pour améliorer les choses, par exemple grâce à une utilisation beaucoup mieux maîtrisée des engrais azotés. Néanmoins, l'ensemble de ces impacts environnementaux restent importants et représentent un coût pour la société. Certaines études qui cherchent à chiffrer ces effets externes les évaluent à un à deux milliards d'euros par an pour la France. Dans ce contexte, les pouvoirs publics tentent de promouvoir l'agroécologie. Le terme est un peu fourre-tout et recouvre une certaine diversité de pratiques et d'exigences. Parmi elles, l'agriculture biologique et la certification haute valeur environnementale reposent sur un cahier des charges qui permet une amélioration significative de l'état de l'environnement. Il existe par ailleurs un certaines nombre de pratiques agroécologiques qui ne sont pas labellisées par les pouvoirs publics et qui ont des effets positifs beaucoup faibles.
Pour accompagner la mutation vers l'agroécologie, la politique agricole commune est appelée à jouer un rôle déterminant. La PAC, c'est environ neuf milliards d'euros d'aides publiques versées chaque année à l'agriculture française, avec un effet de levier significatif sur les pratiques agricoles. Dans le rapport sur cette question que France Stratégie a publié récemment, nous faisons des propositions pour simplifier cette politique extrêmement complexe, pour unifier les outils en ne distinguant plus les aides à l'agriculture classique et celles à l'agriculture biologique et pour mieux rémunérer les services agroenvironnementaux.