Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en 2016, la commune dont j’étais maire, Neuvy-sur-Loire, dans le nord de la Nièvre, a vu la brutale montée des eaux d’un affluent de la Loire qui, comme les cours d’eau secondaires en général, n’est pas surveillé par une cellule de veille.
Malgré l’expérience des « anciens », ce phénomène a surpris tout le monde et, dans le froid et la nuit, il a fallu en catastrophe éviter, tout simplement, qu’il y ait mort d’homme.
Dès le retour de la rivière dans son lit, quelle expérience terrible ce fut que de faire le tour des maisons pour constater les dégâts, avec la crainte pour l’avenir des bâtiments, les difficultés immédiates de mobilité du fait des véhicules perdus, l’épuisement, le froid, l’humidité ! Et puis l’intime, l’irréparable : cette vieille dame hébétée, qui ne se remettra pas d’avoir perdu ses photos de famille, ou cette petite fille désolée pour son cartable.
L’équipe des élus, outre son aide concrète au nettoyage et au pompage, doit dans ces circonstances faire preuve d’une extrême réactivité, car elle est coincée en quelque sorte dans cette position inconfortable d’intermédiaire qui doit donner très vite le conseil – et le bon ! – et faire simultanément les déclarations qui lui incombent comme collectivité territoriale, et bien souvent également comme sinistrée.
Pour ma part, j’ai été en tout premier auditionnée par la gendarmerie afin de savoir dans quelle mesure la responsabilité du maire pouvait être engagée dans le phénomène de débordement du cours d’eau. Avais-je bien informé les riverains sur leurs obligations ? Existait-il des embâcles dont j’aurais été responsable ? Cet élément de procédure, à savoir identifier les responsables alors même que tout le monde pompait, ne me semblait pas le plus urgent !
Dans ces moments critiques, les élus doivent être solides. Ils ont besoin d’aide, pas de tracasseries, face à l’urgence et au désespoir des sinistrés.
Il y a quelques mois, alors que je n’étais plus maire, mais sénateur, j’ai été sollicitée par une association très active de sinistrés de la sécheresse. Les échanges avec les victimes m’ont ramenée au souvenir des inondations : phénomène extrême dans le temps rapide ou le temps long, excès ou manque d’eau. Les désordres prennent des voies différentes, mais le résultat est le même, à savoir traumatisme, désarroi, lourdeur administrative, et l’impression qu’on n’arrivera pas à sortir de la catastrophe naturelle, parce que tout est trop long, trop injuste et trop compliqué.
Les associations sont un relais important, car elles ont acquis une expertise et permettent de combattre le sentiment de solitude.
Nicole Bonnefoy et Michel Vaspart se sont saisis de ce problème, menant énergiquement une mission d’information sur la gestion des risques climatiques et l’évolution de nos régimes d’indemnisation. La proposition de loi que nous étudions ce jour est la suite logique de ses travaux, car elle prévoit de sécuriser administrés et collectivités. Il est grand temps d’introduire plus d’humanité dans ce dossier.
La présence d’élus locaux au sein de la commission interministérielle dont relève la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, la création d’une cellule de soutien départementale pour les maires concernés, la possibilité pour eux de déposer une seconde demande de reconnaissance si la première a été rejetée, des délais élargis, etc. : voilà des bouffées d’oxygène indispensables dans des procédures au bord de l’asphyxie.
Le sens de cette proposition de loi est d’introduire de l’efficacité, du bon sens dans l’action publique post-crise. Je suggère également d’arrêter d’appliquer un coefficient de vétusté lorsque la voirie communale a été détruite : on ne peut pas refaire une vieille route à l’identique ! Il faut également citer le cas des biens communaux non assurables – par exemple le cimetière – endommagés dans des circonstances, comme le coup de vent, ne relevant pas d’une procédure CatNat.
Il y a donc des trous dans la raquette ! Veillons ensemble, avec la bienveillance de l’administration, à les combler au lieu de nous y perdre. J’espère, madame la secrétaire d’État, que vous pourrez me répondre sur ces points.
Pour les sinistrés, il faut aussi remédier à certaines lourdeurs, de toute urgence !
Je profite de cette intervention pour signaler que j’avais déposé un amendement pour que les sinistrés disposent d’un délai élargi pour faire leurs déclarations. Cet amendement a été largement cosigné, mais ma proposition relevait, semble-t-il, d’une mesure réglementaire ; je l’ai donc retiré.
Le Gouvernement est-il prêt à donner une suite favorable à cette demande émanant de nombreuses associations de défense des sinistrés…