À mon sens, si l'on ne décortique pas ce qui s'est passé, la solution proposée sera combattue par les petits hommes gris, qui sont plus nombreux que vous et à temps plein. L'enquête que je vous recommande n'a pas à être à charge. Mais il faut savoir ce qui s'est passé depuis qu'un vote à l'unanimité est intervenu. L'objet n'est pas d'incriminer quiconque. D'ailleurs, il n'y a pas de responsable ; c'est le plus terrible de l'histoire.
La cour d'équité territoriale que j'ai proposée permettrait de répondre à la problématique des indicateurs dans l'éducation nationale. La Constitution dispose d'ailleurs que la société « a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. » Avec une juridiction administrative spécialisée, nous pourrions imposer des indicateurs. Cela fait partie du droit des citoyens et de leurs représentants d'être informés de l'action publique.
L'illectronisme, c'est-à-dire la conjugaison de l'illettrisme et de la difficulté à utiliser le digital, est un drame inscrit et évident, d'autant qu'il concerne en général ceux qui n'ont pas les moyens de payer quelqu'un pour écrire à leur place. Nous avions passé un accord avec les agglomérations, qui étaient prêtes à assurer le financement de la formation. Nous avions un objectif de départ modeste : 500 000 formations par an. Le dispositif est financé et organisé. Nous sommes face à une vraie bombe à exclusion. Bientôt, compte tenu des travaux en cours sur les cellules, il sera possible de vivre jusqu'à 125 ans ou 130 ans ; c'est l'affaire de quelques années. Nous allons changer de monde. Comment nous, pays de Voltaire, des hussards de la République et de l'enseignement du latin-grec, pouvons-nous connaître un tel niveau d'illettrisme ?
Parmi les explications au drame des suicides chez Orange figure le fait qu'un certain nombre de membres de cette belle entreprise aient été pris de panique parce qu'ils étaient aux avant-postes de la digitalisation. La très belle idée politique des dirigeants de l'époque était de faire passer le passeport numérique à tous les salariés, du PDG à la personne de l'accueil, afin que nul ne soit discriminé. Tout Français doit avoir son passeport numérique.
Je ne sais pas pourquoi cela ne s'est pas fait. Je me suis tu parce que je suis quelqu'un de responsable ; je donne toujours sa chance au produit. Mais la réalité est que cela va se faire. Julien Denormandie essaie d'agir. Tout est prêt, organisé. C'était peut-être un peu trop prêt, un peu trop organisé, un peu trop enthousiaste.
Des cités éducatives sont effectivement en place. M. le ministre de l'éducation nationale m'a invité pour l'installation de l'une d'elles dans le bassin minier. Je suis dans le commentaire positif, et je soutiens les actions. Nous avons un problème d'échelle - on peut appeler cela une vision politique - et d'arbitrage : où met-on les moyens ?
Je suis convaincu qu'il faut une fondation du rêve républicain ou le grand rattrapage pour la Nation. Il y a des problèmes dans les bassins en déflation, les zones très rurales et les DOM. La France est présente sur toutes les mers, sur tous les océans ; les enjeux sont gigantesques. Notre pays est un génie maritime : de grands inventeurs, de grands ingénieurs, de grands poètes, de grands navigateurs sont français. Le Grenelle de la mer était un moment extraordinaire. Les DOM font partie de l'archipel France, de la conquête respectueuse de la mer, des océans et de leur richesse.
Je suis pour une fondation qui regroupe l'ensemble des capacités d'Action Logement. Tout le monde était d'accord pour avoir un outil qui aurait une quinzaine de milliards d'euros de fonds propres de revenus par an, assis sur 150 milliards d'euros de fonds propres actifs, pour mettre les moyens là où ils sont nécessaires. On n'augmente pas le déficit ; on crée de la richesse. Il faut un outil de remise à niveau.
Oui, ils essaient d'agir. Mais arrêtons de raconter qu'ils mobilisent 6 milliards d'euros. L'important, ce n'est pas les sommes que les gens prétendent mettre ; c'est le nombre de grues qu'il y a sur le terrain. Cessons d'entretenir une mythologie. Tout le monde a pris conscience du drame. Mais on n'a pas encore bien identifié que c'était un problème de gouvernance. Il faut changer cela. De nouveaux indicateurs sont nécessaires ; je vous renvoie à Stiglitz ou à l'INSEE.
N'étant pas ministre en exercice, je n'ai pas de commentaire à faire sur le Conseil national des villes et l'Observatoire de la politique de la ville. D'ailleurs, ce sont des instances d'observation. Aujourd'hui, nous avons besoin d'entrer dans l'action. Quant à l'Agence nationale de la cohésion des territoires, que dire ?
Le propos de la République est de construire un bonheur collectif moralement acceptable. Je comprends que l'on veuille mettre des moyens sur des systèmes élitaires. Mais l'essentiel est que tout le monde participe à l'histoire, à la croissance, à la solidarité. Il faut mettre les moyens. Il faudrait rediscuter de l'Agence des participations de l'État. Comme citoyens ou représentants des citoyens, nous pourrions aller assez loin dans ces débats. Le Sénat et l'Assemblée nationale ne doivent ni être l'antichambre des gouvernements ni verser dans l'opposition systématique sur BFM. Le Parlement doit mener un travail approfondi de contrôle, au sens britannique du terme.
Cher Joël Labbé, si on ne m'entend pas, c'est pour plusieurs raisons. D'abord, je n'ai pas une science personnelle supérieure aux autres. Ensuite, j'exerce d'autres responsabilités, et je ne fais pas de mélange des genres. Enfin, j'ai passé trois ans en Afrique, et je m'occupais d'autre chose. Je n'ai pas commenté les décisions qui ont été prises à l'époque parce que j'ai un certain sens du respect républicain. À la demande d'un certain nombre de maires, le Président de la République m'avait commandé un rapport. Je n'ai pas à faire de commentaires sur celui qui m'a commandé le rapport. En plus, je pense que tout cela n'est pas grave. L'important est d'avancer. Si ce n'est pas aujourd'hui, ce sera dans six mois. Julien Denormandie se donne un mal de chien.