Tout à fait. L'analyse des statistiques du ministère de la justice et du ministère de l'intérieur fait apparaître que, depuis dix ans, la délinquance des mineurs n'a pas augmenté de manière significative. On observe juste une hausse du nombre des infractions violentes chez les mineurs, ainsi qu'une baisse du nombre d'infractions aux biens. Cette même évolution est constatée chez les majeurs. Les violences ont augmenté de 20 % chez les majeurs, mais de 9 % seulement chez les mineurs. L'évolution chez les mineurs reflète donc une tendance générale, mais a minima.
Des études ont été réalisées sur l'âge des mineurs impliqués dans des actes de délinquance : 1 % d'entre eux a moins de 10 ans ; 8 % ont moins de 13 ans ; 42 % ont entre 13 et 15 ans ; 49 % ont entre 16 et 17 ans. Les affaires impliquant des jeunes de 13 à 15 ans font majoritairement l'objet d'alternatives aux poursuites par le ministère public, car il s'agit de toutes petites affaires, de transgressions liées à la préadolescence ou à l'adolescence, qui ne se produisent qu'une ou deux fois. Nos services suivent très majoritairement les mineurs à partir de 16 ans. Seuls 4 % des mineurs que nous suivons ont moins de 13 ans. Les affaires impliquant de jeunes enfants marquent l'opinion publique, même si elles sont peu nombreuses.
J'en reviens au code de la justice pénale des mineurs. L'idée est de construire un nouveau code de procédure. Nous n'avons pas touché à l'échelle des peines, qui demeure la même. En revanche, nous avons fait en sorte de limiter la détention des mineurs, notamment la détention provisoire, et de faire primer l'éducatif. Le contrôle judiciaire a été mieux encadré dans la loi du 23 mars 2019 de programmation et de réforme pour la justice pour les mineurs âgés de 13 à 16 ans, l'idée étant de permettre une progressivité. Pour cela, il faut utiliser pleinement les centres éducatifs fermés comme palier avant la prison dans les cas de délinquance grave et réitérante des très jeunes mineurs. Auparavant, la simple fugue d'un centre éducatif fermé suffisait à entraîner automatiquement la révocation du contrôle judiciaire et le placement en détention provisoire. Désormais, des violations graves et répétées des obligations liées au contrôle judiciaire doivent avoir été commises, une simple fugue ne suffisant plus. Le nouveau code étend ces dispositions aux jeunes de 16 à 18 ans.
Nous avons également encadré la durée de la détention provisoire entre la délivrance de l'audience de renvoi et le moment où l'affaire est jugée.
Les modalités de l'atténuation de responsabilité n'ont guère évolué, mais la spécialisation des acteurs a été renforcée. La chambre spéciale des mineurs sera désormais compétente pour toutes les décisions relatives à la période de mise à l'épreuve éducative. Des magistrats du parquet spécialement chargés des mineurs interviendront dans ces procédures, et nous avons également préconisé, dans la mesure du possible, qu'un avocat spécialisé soit désigné pour l'ensemble de la procédure.
Enfin, si un placement en détention provisoire doit être envisagé avant la déclaration de culpabilité, c'est le juge des enfants, et non le juge des libertés et de la détention, qui prendra la décision.
La procédure reste spécifique, bien entendu, et tous les grands principes antérieurs sont maintenus : publicité restreinte, protection de l'image, assistance obligatoire de l'avocat, droit de recours et droit à la formation des représentants légaux, dont la présence et la responsabilisation sont soulignées par le regroupement des textes les concernant dans une partie du code. Je rappelle que les responsables de l'autorité parentale doivent répondre aux convocations de la juridiction des mineurs et qu'ils sont passibles d'une amende s'ils ne se présentent pas.
Parmi les choses qui ne changent pas, on peut citer les modalités de l'enquête, l'opportunité des poursuites, qui relève toujours du ministère public, et la procédure spécifique d'information devant le juge d'instruction, à la nuance près qu'une analyse approfondie de la personnalité du mineur est désormais obligatoire. C'est le fruit d'une expérimentation menée en Île-de-France pour les affaires terroristes, cette analyse systématique étant apparue très fructueuse aux yeux des juges d'instruction.
Parmi les choses qui changent, je citerai bien entendu la présomption d'irresponsabilité pénale jusqu'à l'âge de 13 ans. Je précise qu'il s'agit d'une présomption simple, et non irréfragable.