Intervention de Colette Mélot

Réunion du 14 janvier 2020 à 14h30
Mitage des espaces forestiers en île-de-france — Vote sur l'ensemble

Photo de Colette MélotColette Mélot :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de la proposition de loi visant à lutter contre le mitage des espaces forestiers en Île-de-France revêt un caractère tout particulier, alors que plus de 10 millions d’hectares ont été détruits en Australie par de violents incendies depuis septembre dernier, laissant des paysages lunaires et des forêts dévastées.

Les forêts constituent l’un de nos atouts majeurs dans la lutte contre le dérèglement climatique. Elles absorbent en effet chaque année 2 milliards de tonnes de CO2, l’un des principaux gaz à effet de serre.

La France a la chance d’avoir 30 % de son territoire couvert par la forêt, ce qui lui permet d’absorber 70 millions de tonnes de CO2 chaque année.

Les espaces forestiers sont également indispensables à la préservation de la biodiversité des espèces animales et végétales. Ils présentent des qualités environnementales évidentes, mais aussi des qualités sociales, comme point de contact entre l’homme moderne et la nature, et des qualités économiques, au travers de la sylviculture.

Les forêts subissent cependant de nombreuses atteintes, et leur surface a continué, au cours des trente dernières années, à se réduire à l’échelon mondial.

Parmi ces atteintes, les activités humaines jouent un rôle majeur, que ce soit pour la création d’espaces agricoles ou pour l’exploitation industrielle. Les feux de forêt, comme les incendies spectaculaires en Australie ou dans la forêt amazonienne, rendent la déforestation bien visible. Celle-ci révolte à juste titre les citoyens soucieux de l’environnement.

Il existe cependant des menaces plus silencieuses et moins visibles. Le mitage en fait partie. Cette pratique, qui consiste en la vente de petites parcelles forestières à des particuliers, pour des usages qui ne correspondent pas à la destination de ces lieux, met en péril la croissance de nos forêts.

La région de l’Île-de-France concentre un cinquième de la population française sur moins de 3 % de la superficie nationale. Malgré cette forte densité, la région parisienne comprend d’importantes surfaces boisées, représentant 20 % de son territoire.

Élue de la Seine-et-Marne – le plus vaste département de l’Île-de-France –, où la forêt représente 25 % de la surface, vous comprendrez que je suis sensibilisée à ce sujet, d’autant que mon département reste le premier de la région pour la production de bois. Je ne puis non plus passer sous silence le massif de Fontainebleau, seconde forêt domaniale de France, qui s’étend sur 25 000 hectares.

Pour tenter de protéger ces espaces contre le mitage, une expérimentation a été introduite par la loi de 2007 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain. Il s’agissait de conférer à la Safer Île-de-France un droit expérimental de préemption portant sur les parcelles forestières de moins de trois hectares.

Le droit de préemption permet une intervention en amont, avant que la parcelle ne perde ses qualités forestières. Un tel dispositif permet d’entraver au minimum la liberté des propriétaires, qui demeurent maîtres de la décision de vendre leur parcelle et d’en fixer le prix.

Cette expérimentation s’est révélée utile. Le bilan fait état de près de 200 préemptions, pour une surface moyenne de 5 000 mètres carrés par vente.

Les différents acteurs de ces ventes ne se sont pas montrés hostiles au dispositif. Les collectivités locales sont à l’origine de la majorité des préemptions et, même si elles sont moins nombreuses, certaines préemptions ont eu lieu sur l’initiative de propriétaires privés.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à rendre permanent le droit de préemption de la Safer Île-de-France. Ce texte peut sembler modeste, technique, mais nous pensons qu’il contribue utilement à la préservation de la forêt francilienne.

Une question pourrait se poser quant à l’opportunité d’étendre ce dispositif à tout le territoire national, ou encore de le limiter aux zones soumises à une pression démographique ou à un étalement urbain important.

Les résultats de l’expérimentation ont démontré l’efficacité et la pertinence du dispositif sur le territoire francilien, mais ces résultats ne valent que pour ce territoire, si particulier, avec ses 1 014 habitants au kilomètre carré.

Le groupe Les Indépendants estime que toute atteinte à la liberté doit être strictement limitée et proportionnée au regard de l’objectif visé. L’éventuelle extension du mécanisme devra donc être soumise à un examen précis des spécificités de chaque territoire.

Concernant la région d’Île-de-France, à l’heure où les enjeux climatiques et environnementaux sont devenus primordiaux, et dans un contexte régional où 98, 8 % du territoire correspond à une aire urbaine, chaque hectare compte.

Nous soutenons donc cette proposition de loi, qui, au vu de l’expérimentation, constitue une réponse adaptée au mitage des forêts franciliennes.

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