Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de résolution de nos collègues du groupe Les Républicains est très générale, mais elle va dans le bon sens. On peut simplement regretter, comme cela a déjà été dit par certains de nos collègues, que ses auteurs ne font qu’affirmer un principe, sans entrer dans le détail de sa mise en œuvre.
Cette proposition de résolution est conforme aux orientations de la Commission européenne sur l’ajustement carbone aux frontières. L’occasion nous est donc donnée d’en discuter aujourd’hui.
Rappelons que l’Union européenne s’est fixé pour objectif de réduire d’au moins 40 % ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, voire de 50 %, par rapport aux niveaux de 1990, et de parvenir à la neutralité carbone en 2050. Tous ces engagements ne seront toutefois qu’une tartufferie si, en parallèle, nos importations représentent l’équivalent de 50 % de nos émissions !
Il faut savoir que les importations françaises représentent aujourd’hui 60 % d’émissions de plus qu’en 1990. Tous les efforts que nous faisons pour réduire nos émissions de carbone peuvent donc être totalement réduits à néant par nos délocalisations.
Il faut agir différemment. C’est la raison pour laquelle, depuis 2005, l’Union européenne a mis en place un marché du carbone, le premier au monde, le but étant d’élever le prix de l’émission de la tonne de carbone, afin de limiter les activités. Mais de telles mesures pèsent, cela a été dit, sur la compétitivité de nos entreprises.
De ce point de vue, on doit saluer l’instauration d’un marché du carbone en Chine en 2017. Il appartient à l’Union européenne d’inciter ses principaux partenaires à mettre également en place de tels marchés qui, par convergence, nous permettrons de ne plus constater d’empreinte carbone supérieure à nos émissions, du fait des délocalisations.
Lorsque l’on réfléchit à l’instauration d’une barrière écologique, il faut se poser quelques questions : souhaitons-nous renverser les règles du commerce mondial ou voulons-nous un dispositif conforme aux règles de l’Organisation mondiale du commerce, quelles que soient les difficultés de cette organisation aujourd’hui ? Voulons-nous une taxe ou une compensation ? On comprend le mot « barrière », mais que recouvre-t-il concrètement dans le cas d’espèce ?
Si un mécanisme de compensation carbone devait être instauré, un peu comme celui qu’envisage la Commission européenne, comment traiterions-nous alors les grandes industries qui, aujourd’hui, bénéficient de quotas gratuits jusqu’en 2030 ? Devraient-elles aussi payer ? Si elles devaient ne pas payer, nous aurions un problème avec l’OMC ; si elles devaient payer, je crains que, en voulant les aider, nous ne les handicapions jusqu’en 2030.
Il faut aussi veiller aux rétorsions que nous pourrions subir dans un certain nombre de secteurs, en particulier dans les secteurs agricole et agroalimentaire.
Bien entendu, nous sommes tous d’accord ici sur le fait qu’il est absolument inacceptable de continuer à commercer, comme si de rien n’était, avec des pays qui ne respectent pas l’accord de Paris. Nous devons utiliser la force et la taille du marché européen pour inciter nos partenaires à le respecter.
Il faut aussi avoir à l’esprit que le protectionnisme n’est pas l’ami de l’écologie. Les circuits courts ne sont pas automatiquement synonymes d’absence d’émissions. Le transport maritime et le transport aérien émettent moins de CO2 que les data centers. Le commerce international n’est pas l’ennemi de l’écologie. Simplement, il faut mettre l’un et l’autre en adéquation.
Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous dire si les dispositions envisagées par la Commission européenne sont en congruence avec les accords de libre-échange que l’Union européenne a signés et ratifiés jusqu’à présent, en particulier le CETA (accord économique et commercial global) ?
Par ailleurs, serons-nous exigeants de ce point de vue, dans le cadre de notre future relation avec le Royaume-Uni ?