Intervention de Franck Montaugé

Réunion du 14 janvier 2020 à 14h30
Activité des entreprises alimentaires françaises — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Franck MontaugéFranck Montaugé :

Les États généraux de l’alimentation étaient une belle promesse à laquelle nous avons voulu croire ! Mais pour ce qui est des prix et des revenus, ils sont venus se fracasser sur la réalité d’un contexte économique tendu qui a conduit à une baisse globale constatée des prix de l’ordre de 0, 4 % selon l’Observatoire de la formation des prix et des marges.

Les transformateurs ne s’y retrouvent pas et les producteurs, sauf exception tenant plus de la conjoncture internationale que des effets de cette loi, n’ont pas vu l’amorce d’une amélioration de leur revenu.

Dès lors, et même si nous n’en sommes qu’au mitan de la période d’expérimentation, il était sain et responsable de réagir, afin de corriger certains mécanismes, de toute évidence dévoyés par la pratique, bien éloignés de l’esprit du législateur de la loi Égalim. Les dégâts sont déjà là, avérés. Il faut aller vite et réagir sans attendre le terme des deux ans.

Vous l’avez entendu vendredi dernier, monsieur le ministre, dans le Gers, de la bouche d’un représentant de la filière « gras-volailles festives » : le seuil de revente à perte a été très préjudiciable pour les productions saisonnières. Il a donné lieu à des contournements inacceptables que vos services doivent repérer et sanctionner. Je sais que vous vous y employez.

Le SRP s’est aussi traduit négativement pour certains vins dont l’acte d’achat est étroitement lié aux périodes de fêtes. Le président d’une grande coopérative viticole gersoise vous l’a aussi dit. Il faudra que la liste des produits dérogatoires au SRP prévue par le texte que nous allons voter aujourd’hui tienne compte des pratiques saisonnières des consommateurs dans leur ensemble. Les professionnels et leurs représentants devront être étroitement associés à ce travail de définition.

Aux grandes difficultés éprouvées par la filière « gras » depuis 2015 – notamment les deux épisodes catastrophiques de grippe aviaire – ne doivent pas s’ajouter les effets délétères du SRP.

Les décisions de dérogation au SRP devront également tenir compte des spécificités de la filière viticole qui tire une bonne partie de nos exportations et qui est aujourd’hui victime, directement ou indirectement, des difficultés diplomatiques et économiques avec les États-Unis. Pour dire les choses plus prosaïquement, les agriculteurs ne doivent pas payer pour la guerre menée dans la filière aéronautique.

Ce texte prévoit ensuite de conduire une expérimentation en adaptant les mécanismes de la clause de révision des prix des contrats de plus de trois mois passés entre distributeurs et entreprises : ciblage des produits finis composés à plus de 50 % d’un produit agricole, plus grande réactivité et automaticité de la révision à la hausse ou à la baisse, simplification de la procédure ont présidé à l’introduction de l’article 2. L’expérimentation durera trois ans et les produits seront arrêtés par décret.

Tout en étant favorables à cette expérimentation, nous pensons que le risque est grand de voir le rapport de force continuer de prévaloir, les seuils de déclenchement étant renvoyés à la négociation entre les parties.

Enfin, il nous paraissait nécessaire, nonobstant les questions de fond relatives à la nature même du contrat liant le coopérateur à sa coopérative agricole, que le champ de l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, fixé par le législateur, soit strictement respecté.

Pour terminer, je me réjouis que ce texte, qui concerne la vie de nos territoires, ait réuni des signataires de tous les groupes politiques de la Haute Assemblée, sans exception. J’espère que le Gouvernement voudra le faire prospérer à l’Assemblée nationale, dans l’intérêt des entreprises et des exploitations concernées.

Toutefois, cette proposition de loi laisse entière la question du revenu des agriculteurs à laquelle le Gouvernement, notamment à travers la PAC, devra apporter des réponses à la hauteur des enjeux et de la situation difficile que vivent nombre d’entre eux.

Je tiens enfin à remercier tout particulièrement Daniel Gremillet, auteur de ce texte, et Michel Raison du travail qu’il a mené.

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