Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une fois la loi Égalim adoptée, un groupe de suivi de ce texte a rapidement été mis en place. Il s’agit d’une excellente initiative qui permet d’évaluer la pertinence et l’efficience de cette loi. Nous devrions la généraliser.
La loi Égalim comportait plusieurs objectifs notoires, parmi lesquels l’augmentation de 10 % du seuil de revente des produits sans marge pour un transfert de ces bénéfices sur les produits agricoles, l’encadrement des promotions à 25 % pour tout produit en valeur et en volume et le report des augmentations des matières premières sur les prix finaux dans les grands magasins.
Un an après, nous tirons la sonnette d’alarme. Le compte n’y est pas. Comme certains orateurs l’ont déjà souligné, cette loi produit même des effets contraires à ce qui était initialement prévu – un comble !
Certaines mesures déstabilisent très clairement les PME et les ETI des territoires et n’apportent pas de marge supplémentaire à nos agriculteurs. La revalorisation du SRP de 10 % qui visait à renforcer l’équilibre général des négociations au profit des entreprises et des agriculteurs et à augmenter les prix et les revenus complémentaires des agriculteurs a été un échec.
Entre nous, penser que la grande distribution, qui possède 92 % de parts de marché, allait transférer des marges supplémentaires des SRP pour augmenter le prix d’achat des produits agricoles ou des TPE était illusoire. C’est ignorer la très dure loi du marché.
À titre d’exemple, lors de l’épisode de la peste porcine, le cours du porc a augmenté de 45 % et les transformateurs, au milieu de la chaîne, ne sont pas parvenus à réévaluer leurs prix de vente face à la grande distribution qui contractualise annuellement. Au final, ces sociétés se sont retrouvées en difficulté, ce qui est absolument anormal.
De plus, on s’aperçoit que les promotions pratiquées par les TPE ou par les entreprises familiales de nos territoires sont un moyen de publicité efficace, sans doute l’un des seuls dont elles disposent. Ces dernières, contrairement aux grandes entreprises, ne peuvent en effet acheter des espaces publicitaires sur des chaînes télévisées, par exemple, et perdent de ce fait le bénéfice escompté de cette pratique.
L’encadrement des promotions a donc fait chuter le chiffre d’affaires de nos entreprises familiales. Il est urgent de revenir sur cette disposition et d’examiner, entre autres, la limite de l’encadrement des produits saisonniers.
En outre, certaines entreprises travaillent sur un segment de marché qui nécessite des promotions permanentes, les périodes au cours desquelles elles réalisent le gros de leur chiffre d’affaires étant très courtes, ou en raison des emplois saisonniers.
Devant l’urgence et la détresse des entreprises familiales de nos territoires qui ont vu leur chiffre d’affaires et leur bénéfice fondre, le groupe de suivi a vite réagi. Je tiens à l’en féliciter. Il est par conséquent urgent de revoir et de corriger la loi Égalim pour revenir aux fondamentaux recherchés.
Trois mesures d’urgence sont proposées : l’exclusion de l’encadrement en volume des promotions sur les produits saisonniers et au cas par cas pour les entreprises en difficulté ; l’expérimentation d’une clause automatique de révision des prix tous les trois mois, en fonction des cours ; la suppression de la possibilité pour les juges de sanctionner financièrement des coopératives ayant pratiqué une politique de prix extrêmement basse.
Il est indispensable de maintenir et de développer le tissu de PME sur les territoires qui paient de la TVA, des impôts et des charges sociales. Ce sont elles qui génèrent de l’emploi sur les territoires et créent la richesse du pays. L’Allemagne, qui est selon moi la référence économique, s’appuie sur ce modèle.
En outre, il nous faut sortir de la logique de compression des prix pratiquée par la grande distribution depuis des années. Les industriels ont toujours eu une logique de préservation des marges pour leurs fournisseurs, permettant d’assurer de la stabilité et de la continuité. Or la grande distribution n’a jamais partagé cette philosophie. Il faut que cette mécanique change.
L’agriculture française doit aussi se réformer et s’adapter aux évolutions et aux besoins du consommateur. Nous en sommes bien conscients.
Cette proposition de loi vient corriger certains errements de la loi Égalim. J’ai bien entendu, monsieur le ministre, que le Gouvernement y était défavorable. J’espère simplement que vous reverrez votre position ou que vous nous proposerez d’autres solutions. Nous ne pouvons en rester à la situation actuelle. Je voterai cette proposition de loi.