Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme nombre d’entre nous, je suis élue d’un département où l’agriculture est un moteur essentiel de la vie économique : 7, 5 % de la population active travaille dans ce secteur, générant un chiffre d’affaires de 720 millions d’euros, comparable à celui de l’industrie agroalimentaire.
Au-delà de son poids économique, nous avons un attachement viscéral à cette activité si particulière qui façonne notre territoire et dont il ne faut pas oublier l’objectif essentiel : produire, nourrir, et pouvoir vivre de son travail.
La loi Égalim est un rendez-vous manqué pour les agriculteurs. Elle aborde les enjeux liés à l’alimentation, aux relations commerciales entre les producteurs et les distributeurs de manière imparfaite.
Les réponses apportées à leur précarisation ne sont pas à la hauteur, la loi n’ayant un effet que sur un cinquième des recettes des agriculteurs et quelques filières.
Aussi, je veux saluer la qualité des travaux du groupe de suivi, qui nous conduit à débattre cet après-midi de cette proposition de loi, largement cosignée. Elle est attendue par le monde agricole, dont de nombreuses PME et entreprises de taille intermédiaire.
En effet, certaines conséquences négatives de la loi Égalim sont déjà clairement identifiées. C’est le cas notamment du recul de l’activité lié à l’encadrement des promotions en volume, dont les effets sont particulièrement douloureux pour les produits à forte saisonnalité, avec des baisses de chiffre d’affaires allant jusqu’à 50 % et au-delà.
Comme le souligne Daniel Gremillet, auteur de la proposition de loi, « sans soutien promotionnel, les ventes s’effondrent. » Allons-nous laisser s’affaiblir puis disparaître ces productions ?
De plus, les difficultés persistent dans les mécanismes de renégociation des prix et des contrats en cours d’année. Il est significatif que les industriels porcins aient préféré ne pas y recourir l’an passé, en raison de leur lourdeur et de leur faible protection.
Monsieur le ministre, vous avez là, clé en main, des solutions aux « effets de bord » que relève M. le rapporteur, Michel Raison. Vous le savez, le monde agricole est en crise. Nous le répétons sans honte et le répéterons sans relâche, le monde agricole est en crise depuis trop longtemps.
La difficulté du métier, sa faible rémunération – vous l’avez dit vous-même, « le compte n’y est pas » –, les risques liés à la santé, le développement de l’agri-bashing conduisent les jeunes générations à faire le choix rationnel de ne pas se lancer dans cette voie. L’enjeu du renouvellement des générations n’a jamais été aussi important : un tiers des agriculteurs a plus de 50 ans.
Notre pays est déjà devenu la troisième puissance agricole, derrière l’Allemagne et les Pays-Bas. Faudra-t-il attendre sans bouger que notre excédent commercial agricole disparaisse du fait de la concurrence européenne ? Quels signaux supplémentaires faut-il pour réveiller les consciences et agir ?
Évidemment, l’amélioration de la condition des agriculteurs ne se fera pas du jour au lendemain. Les changements proposés doivent être apportés progressivement et corrigés au fur et à mesure lorsqu’ils produisent des effets négatifs.
« Le bon sens fait les hommes capables » disait Napoléon. Du bon sens, les agriculteurs en ont ! Il est temps que notre pays retrouve la fierté de son agriculture. Aussi, monsieur le ministre, je vous invite à vous appuyer sur la vigilance du Sénat et, une fois n’est pas coutume, à vous servir des réponses apportées par cette proposition de loi.