Intervention de Jean-Louis Georgelin

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 22 janvier 2020 à 10h00
Audition de Mm. Jean-Louis Georgelin président de l'établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale notre-dame de paris et philippe jost directeur général délégué de l'établissement public

Jean-Louis Georgelin, président de l'Établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris :

Les questions sont riches. Tous les sujets sont sur la table. Deux qualités sont importantes dans toute entreprise humaine. La première est l'humilité. Que faut-il faire et comment ? Je n'ai pas de réponse absolue. Personne n'en a ! Nous avons hérité de cette cathédrale, qui a été construite en deux siècles et qui a été constamment rénovée et restaurée. Il nous appartient aujourd'hui, après ce malheureux incendie, de la restaurer et de la rendre à ce pour quoi elle a été bâtie. Nous devons, à cet égard, faire preuve d'humilité.

La seconde qualité qui me paraît importante dans toute entreprise humaine est la confiance. Je crois qu'il faut faire confiance aux personnes qui sont nommées. Bien évidemment, je ne parle pas spécifiquement de moi : je parle de tous les acteurs mobilisés pour réaliser cette prouesse qui consiste à rendre sa majesté à ce chef-d'oeuvre absolu de l'art gothique, à ce monument national qu'est Notre-Dame de Paris, pour tout ce qu'elle représente.

Je ne pense pas que l'incendie d'un seul autre monument, en France, y compris Versailles, aurait suscité une telle réaction. Cela nous interroge. Nous devons être à la hauteur de l'enjeu. J'insiste sur la confiance en tous les acteurs, même si je puis paraître autoritaire. L'autorité, selon moi, n'est pas un défaut. Il faut fixer les objectifs et se donner les moyens de les atteindre.

Je veux évoquer l'exposé très concret du président de la Commission nationale du patrimoine et de l'architecture. Il ne m'appartient pas, à ce stade, de décréter l'option qui me paraîtrait la plus conforme à ce que je crois. Nous allons avancer tous ensemble, pas à pas, compte tenu de ce qui a été mis sur la table depuis le début.

Nous aurions très bien pu, arguant de la convention de Venise, du document de Nara ou du patrimoine parisien inscrit à l'Unesco, décider que nous allions remettre la cathédrale en l'état. Ce n'est pas ainsi que les choses sont enclenchées. Nous devons sereinement, en respectant toutes les étapes prévues, en tenant compte de tous les conseils prodigués, faire en sorte de décider de la meilleure solution pour Notre-Dame de Paris.

Qui décide ? Ce n'est évidemment pas moi qui vais décider que nous allons refaire la flèche à l'identique ou construire un hologramme qui changera tous les deux ans. Je reçois tous les jours des projets proprement extraordinaires. La passion des Français et des étrangers pour la restauration de Notre-Dame est fascinante. Nous devons faire en sorte que toutes les options soient examinées avant de prendre les décisions.

Après son examen par l'Assemblée nationale et le Sénat, en première et nouvelle lectures, la loi du 29 juillet 2019 ne ressemble plus au projet de loi initial. Je crois que vous serez d'accord avec moi pour dire qu'elle n'est plus une loi d'exception. Dès que nous ne serons plus sous le régime de l'urgence impérieuse, l'établissement public passera évidemment ses marchés publics de manière normale, conformément aux dispositions du code des marchés publics. Quand s'arrêtera l'urgence impérieuse ? Tout simplement quand la préfecture de police lèvera l'état de péril. Quand je vous ai exposé le calendrier, que nous essayons d'affiner en permanence pour marcher vers avril 2024, j'ai indiqué que les travaux de reconstruction n'auraient pas lieu avant 2021, précisément parce que nous devons prendre en compte le temps des études et celui des marchés publics.

Monsieur Ouzoulias, vous avez parlé de trois chantiers, en les dissociant : le chantier de la charpente, celui de la flèche et le chantier archéologique.

Les chantiers archéologiques ont suscité un important débat lors de l'examen du projet de loi, compte tenu des dérogations prévues. C'est dans le cadre du conseil scientifique que ces questions seront étudiées. Nous travaillons déjà en étroite liaison avec le Service régional de l'archéologie (SRA).

Il est compliqué de trouver un lieu où stocker les vestiges que nous nous efforçons d'évacuer du parvis. Nous avons trouvé à Villacoublay un hangar prêté par l'armée qui a bien voulu nous accorder l'hospitalité. Nous cherchons actuellement 7 000 mètres carrés. Nous les trouverons peut-être au fort de Saint-Cyr - je parle sous le contrôle du directeur général délégué de l'établissement public.

Plusieurs d'entre vous plaident pour reconstruire le toit en plomb, comme on vient de le faire pour le Panthéon. C'est un sujet que nous allons examiner calmement, probablement aussi grâce à l'aide de votre commission, de manière à prendre la bonne décision. Ces neuf derniers mois, j'ai consulté à peu près tous les gens compétents sur la question du plomb : l'ARS, de grands professeurs... Nous avons encore à travailler sur cette question.

On ne conduit pas un chantier en s'opposant au code du travail. Avec l'aide éclairée de Philippe Jost, je m'efforce d'avoir les meilleures relations possibles avec l'inspection du travail. Nous voulons que le chantier progresse, mais, en même temps, nous voulons que le code du travail soit parfaitement respecté et nous ne ferons pas n'importe quoi pour respecter les délais. Il me semble que le dialogue que nous avons avec les corps d'inspection se passe bien, afin justement de créer la confiance entre les différents acteurs. C'est en tout cas mon souhait.

Les vestiges qui sont évacués sont aussi à la disposition des autorités judiciaires, dans le cadre de l'enquête sur les causes de l'incendie.

Nous écoutons de manière très attentive les personnels du service régional d'archéologie qui interviennent sur le chantier, y compris avec le Laboratoire de recherche des monuments historiques (LRMH). Nous ne balayons pas ces aspects du revers de la main parce que le chantier doit être fini dans cinq ans.

Je ne vois pas de manière aussi nette que vous une partition entre trois chantiers différents. En fait, il y a un chantier, avec différentes étapes et différents volets, mais c'est le même architecte en chef, M. Philippe Villeneuve, qui est à l'oeuvre.

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