Je rebondis sur la dernière remarque : le défi lors de la création de l'INRA en 1946 était de nourrir la France. Des générations de techniciens et de scientifiques engagés et créatifs ont permis d'avancer. Il faut conserver cet état d'esprit et aller jusqu'au bout, trouver des solutions et développer notre attractivité. Nous nous préoccupons aussi de l'économie. Mme Florence Jacquet ici présente est d'ailleurs économiste.
Sur le carbone dans les sols : nous progressons sur ce sujet majeur. Je vous cite l'étude de 2019 liée à « 4 pour 1 000 » sur le potentiel de stockage des sols français par km2, grâce aux bases de données info-sol pilotées par l'INRAE. L'objectif est de savoir ce que nous pouvons concrètement faire dans ce sens en France. L'enjeu est de maintenir les puits de carbone dans les sols, donc les prairies permanentes et la forêt, en limitant le retournement de prairie. Nous avons évalué le coût des pratiques de stockage pour définir des incitations financières dans les prochaines politiques publiques.
Concernant le modèle de polyculture-élevage, même s'il ne peut pas fonctionner partout, il faut remettre en valeur ce système de production, vous l'avez évoqué. Il fonctionne dans les deux sens : ce que l'élevage apporte aux cultures et ce que les cultures apportent à l'élevage. Les légumineuses et protéagineuses permettent de stocker de l'azote dans le sol et en partie d'alimenter les élevages. Cela renforce notre autonomie protéique en limitant les importations de soja brésilien.
Sur les ZNT, nos collègues de l'INRAE ont montré l'impact des matériels (buses anti-dérives, récupérateurs sur la vigne...). Avec des matériels plus performants qui réduisent la dérive des produits phytosanitaires, on peut réduire la distance de non traitement. Ce savoir technique est très attendu par le monde agricole.
Sur les cépages résistants, nous avons de bonnes perspectives. Nous lançons en Aquitaine le programme VitiREV pour tester l'apport de ces cépages dans la réduction des pesticides. Nous avons 4 cépages dans le catalogue, et bientôt 30 à 40 grâce à la sélection génomique. Dans 10 à 15 ans, nous aurons rendu résistants les plus importants de nos cépages traditionnels. Mais il nous faut du temps. Le temps de la recherche n'est pas le temps des médias ou celui de la politique.
Sur la question de la communication, le site internet de l'INRA est en chantier. Sur notre site, nous essayons de rendre la science accessible au grand public en tentant de limiter les partis pris et de nous placer dans une perspective de progrès.
Sur les néonicotinoïdes, un insecticide vient d'être autorisé contre le puceron vert de la betterave et nous espérons trouver rapidement dans nos laboratoires d'autres solutions de biocontrôle.
Un mot sur l'amélioration des plantes. Il existe trois grandes catégories de pratiques phytosanitaires. La première rassemble les techniques de désherbage, c'est-à-dire l'agronomie et l'agroéquipement. La deuxième concerne les insecticides et la majorité des produits de biocontrôle, sur lesquels nous avons un gros programme de recherche, grâce à un appel d'offres du ministère de la recherche à hauteur de 30 millions d'euros. Nous attendons la validation du jury. Sur la résistance des grandes cultures, beaucoup de travaux ont été faits. C'est une lutte sans merci entre les bio-agresseurs et nos chercheurs, car les souches s'adaptent. J'ai un très bel exemple de partenariat en Chine sur la riziculture au Yunnan. Les riziculteurs n'y utilisent quasiment plus de fongicides car ils fonctionnent avec 30 à 40 variétés de riz très proches et toutes différemment résistantes au champignon. Nous avons appelé cela le riz éternel. Cette solution qui consiste à jouer sur des associations de résistances pourrait être étendue à l'échelle d'un paysage agricole. Mais elle est très compliquée à organiser.
Sur l'Osmobio nous n'avons pas été saisis par l'Anses.