Je veux remercier Catherine Procaccia d’avoir proposé cet amendement, qui peut être la voie nous permettant de trouver une solution respectueuse de l’éthique. Il n’y a pas de difficulté à cet égard : les époux ont formulé un projet parental ; ils ont commencé les démarches pour recourir à l’assistance médicale, notamment auprès du notaire, et l’un des deux décède, le père en l’occurrence. Est-ce que le projet doit s’arrêter ? La question relève de l’intime et non plus de la bioéthique.
Pour ce qui concerne le problème juridique relatif à la filiation, que vous avez soulevé, madame la garde des sceaux, il n’y a qu’à prévoir une reconnaissance conjointe. Tout est possible ; le droit peut s’adapter. C’est d’ailleurs au nom du droit que l’on applique aux femmes le délai pour établir ou non la présomption de paternité après le veuvage. Nous pouvons régler tous ces points.
La vraie question est la suivante : appartient-il au législateur, au titre de cette double compassion, de dire « non » à ces femmes dont la situation est exceptionnelle ? Pour ma part, je pense qu’il faut laisser la possibilité ouverte. Je ne suis pas sûr que, face à une femme dans cette situation, je ne lui déconseillerais pas d’aller jusqu’au bout de sa démarche, mais, aujourd’hui, en tant que législateur qui débat d’un projet de loi sur la bioéthique, je ne me sens pas le droit de lui dire « non ». C’est la raison pour laquelle, à mon sens, l’amendement de Catherine Procaccia, qui est très précautionneux – consentement du père avant ; autorisation de l’Agence de la biomédecine, même si je ne suis pas sûr qu’elle ait les moyens de le faire et que cela soit utile –, peut être adopté.
Il faut laisser à ces femmes le soin de dire, après discussion avec les médecins et les psychologues, si elles veulent poursuivre le projet parental ou bien si elles ne conçoivent pas porter avec l’enfant le deuil du père décédé. Je le répète, c’est du domaine de l’intime, et je me demande si nous avons bien le droit d’interférer dans cette réflexion.