Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 29 janvier 2020 à 15h00
Bioéthique — Article 21 bis

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Aux termes du code de déontologie médicale, « aucune intervention mutilante ne peut être pratiquée sans motif médical très sérieux et, sauf urgence ou impossibilité, sans information de l’intéressé et sans son consentement ».

Malheureusement, cette partie du code ne nous semble pas toujours appliquée, notamment pour les 1, 7 % d’enfants qui naissent, en France avec une variation du développement sexuel. Trop souvent, même si, visiblement, cette pratique tend à disparaître, ces enfants subissent, dès leurs premières années, une ablation du clitoris ou une castration. Ce sont des actes traumatisants, qui sont pratiqués en fonction de l’état des connaissances médicales et psychologiques du moment. Ils sont rarement pratiqués au nom d’une nécessité médicale ; ils reposent plutôt sur une certaine obligation, énoncée par la société, d’être assigné à un sexe biologique bien déterminé.

Lors des auditions, des spécialistes nous ont dit qu’ils avaient changé de regard sur la question – c’est en tout cas l’impression que j’ai ressentie – et que les opérations étaient désormais rarissimes. On ne peut que s’en réjouir, me semble-t-il, car comment peut-on imposer arbitrairement à des enfants des choix aussi binaires que le masculin ou le féminin, avec le risque que, quelques années plus tard, ce sexe ne corresponde pas à leur genre, à leur identité ?

Malheureusement, malgré les bonnes intentions ayant inspiré l’alinéa 7 du présent article, le texte ne nous semble pas permettre, en l’état, d’éviter ces opérations chirurgicales. Nous proposons donc de prévoir clairement leur interdiction, avec, évidemment, des dérogations : en cas d’urgence vitale ou de consentement explicitement et personnellement exprimé par la personne, même mineure.

Ces opérations constituent une violence infligée à des personnes et elles ont des effets secondaires multiples et lourds. En outre, elles donnent le sentiment que le corps médical peut décider pour autrui de ce que doit être un corps, pour que chacun se conforme à l’apparence soit d’un homme soit d’une femme.

Les témoignages d’enfants intersexes devenus adultes que nous avons entendus sont très clairs et émouvants ; ils nous conduisent à une position assez tranchée en faveur de cette interdiction. Le choix de l’intervention ou de la non-intervention doit revenir à ces personnes et uniquement à elles – pas même à leurs parents –, de façon libre, éclairée et consentie.

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