Intervention de Marta de Cidrac

Réunion du 30 janvier 2020 à 14h30
Lutte contre le gaspillage et économie circulaire — Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Marta de CidracMarta de Cidrac :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je suis heureuse de présenter aujourd’hui aux suffrages de notre assemblée la rédaction du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire issue des travaux de la commission mixte paritaire qui s’est tenue au Sénat le 8 janvier dernier.

Déjouant les pronostics de nombreux commentateurs, nous sommes parvenus, députés et sénateurs, à un accord unanime sur un texte très attendu par nos concitoyens et que la navette parlementaire a enrichi et équilibré.

À mon sens, cet accord exigeant que nous avons trouvé constitue une double bonne nouvelle.

Premièrement, il révèle que nous sommes, nous parlementaires, en phase avec une demande sociétale très forte d’un changement radical de notre modèle de production et de consommation, pour en finir avec le « tout-jetable », en donnant à tous les acteurs concernés les outils nécessaires pour accomplir la transition vers un nouveau modèle d’économie circulaire et de lutte contre le gaspillage de nos ressources. À cet égard, le sujet du plastique est emblématique. Sans tomber dans le « plastique-bashing » systématique, nous devons agir vite, guidés par une forte dynamique européenne, afin d’en finir avec les emballages à usage unique et les microplastiques qui polluent les océans.

Deuxièmement, cet accord démontre toute la force de notre parlementarisme bicaméral. L’examen de ce projet de loi a donné lieu à une lecture dans chaque assemblée et à l’instauration d’un véritable dialogue. Le Sénat, saisi en premier, a ouvert la voie sur de nombreux sujets et, sur d’autres, a suscité de sains débats. L’Assemblée nationale a apporté des enrichissements et poursuivi notre dynamique. À ce titre, je salue le travail de mes homologues rapporteures de l’Assemblée nationale : avec elles comme avec l’ensemble des députés qui se sont investis dans ce débat, j’ai pu travailler en confiance tout au long de l’examen du texte.

Le projet de loi initial, qui ne comportait que treize articles, n’était peut-être pas à la hauteur des enjeux et des attentes des Français. Le travail des deux chambres a permis de lui donner une véritable envergure. Malgré des positions parfois fortement exprimées, nos deux assemblées ont su travailler dans le respect mutuel et dans le souci d’affirmer une véritable ambition environnementale. La navette n’a pas été caricaturale : il n’y a eu ni chambre d’enregistrement du projet gouvernemental ni volonté de détricotage stérile.

Avant d’en venir aux dispositions essentielles de ce projet de loi, j’ajoute que ce travail parlementaire a été largement transpartisan. Tous les groupes politiques se sont mobilisés pour enrichir un texte qui comporte aujourd’hui les apports et les solutions de chacun.

Je pense à la fin de la distribution gratuite de bouteilles en plastique dans les établissements recevant du public et les locaux à usage professionnel, votée par le Sénat sur l’initiative de nos collègues Sophie Primas et Didier Mandelli ; au plan de lutte contre les microplastiques dans l’environnement, proposé par les élus du groupe socialiste ; aux objectifs ambitieux en matière de prévention et de gestion des déchets, adoptés sur l’initiative de notre collègue Jean-François Husson ; aux dispositions sur l’obsolescence logicielle émanant du groupe communiste ; au renforcement des objectifs nationaux de valorisation énergétique des déchets non recyclables, décidé sur l’initiative du groupe centriste ; à l’identification des sites opportuns pour installer des fontaines, en remplacement des bouteilles plastiques, dans les schémas de distribution d’eau potable, grâce à notre collègue du groupe Les Indépendants – République et Territoires, Jérôme Bignon ; aux dispositions visant à favoriser le don des invendus non alimentaires de première nécessité aux associations de lutte contre la précarité, introduites sur la proposition de notre collègue du RDSE, Ronan Dantec.

Cette énumération n’est pas anecdotique. Elle reflète un véritable travail, construit sur toutes les travées de notre hémicycle, et qui demeure dans le texte définitif.

Concernant le fond du texte, j’insisterai sur trois points.

En premier lieu, nous sommes parvenus, me semble-t-il, à un texte plus ambitieux, et surtout plus transversal, que le projet de loi initial : l’économie circulaire doit irriguer toutes nos politiques publiques.

Initialement composé de treize articles dédiés à l’information du consommateur, à la lutte contre le gaspillage non alimentaire et à la responsabilité des producteurs, le projet de loi a vu son champ considérablement élargi sur l’initiative du Sénat.

Nous avons en effet inséré plusieurs grands volets, qu’il s’agisse de la lutte contre le suremballage, la surproduction de plastique et les dépôts sauvages – nous avons donné davantage de moyens aux élus locaux, qui, en la matière, sont en première ligne –, des objectifs en termes de prévention et de gestion des déchets, de la lutte contre le gaspillage alimentaire ou encore de l’exemplarité de l’État via la commande publique.

Le Sénat a adopté la création de deux fonds importants : un fonds dédié à la réparation et un fonds pour le réemploi solidaire. Nous avons également renforcé les droits et l’information du consommateur, avec, par exemple, la création d’un indice de durabilité, complété par l’Assemblée nationale.

En deuxième lieu, notre travail a permis l’adoption d’un texte plus équilibré. En témoigne le traitement de la question des déchets du bâtiment, sujet en réalité indissociable de la lutte contre les dépôts sauvages : nous avons abouti à un système garantissant une responsabilité élargie du producteur pour l’ensemble des produits et matériaux du bâtiment et une reprise gratuite de ces derniers, afin d’améliorer leur valorisation et leur traçabilité. En outre, j’ai tenu à ce que l’établissement d’un maillage territorial de points de reprise soit rendu obligatoire pour la filière, ainsi qu’une contribution des producteurs à l’ouverture de nouveaux points de collecte et à l’extension des horaires des points de collecte existants.

Sur le sujet de discussion le plus sensible entre les deux assemblées, à savoir la consigne pour recyclage, nous sommes également parvenus à un équilibre qui permettra aux collectivités territoriales d’achever le déploiement de l’extension des consignes de tri avant de devoir justifier de leur capacité à atteindre les objectifs européens en matière de collecte pour recyclage des bouteilles en plastique sans mettre en place de dispositif de consigne. En la matière, le Sénat a joué un rôle essentiel : il a veillé à ce que le service public de gestion des déchets ne soit ni désorganisé, ni affaibli, ni remis en cause par un dispositif dont la plus-value environnementale paraît limitée. Nous avons relayé les inquiétudes légitimes des collectivités territoriales, qui assument cette mission avec beaucoup d’efficacité depuis de nombreuses années et ont massivement investi afin d’être aussi performantes que possible.

Toutefois, tout le monde devra jouer le jeu. Le dialogue devra se poursuivre avec les collectivités territoriales et les moyens devront être effectivement mis à leur disposition afin qu’elles puissent atteindre les objectifs fixés. Nous y veillerons : nous le devons.

En troisième et dernier lieu, cet accord est exigeant. Des objectifs ont été fixés. Beaucoup de mesures devront trouver à s’appliquer par le biais de dispositions réglementaires. Je souhaite que le Sénat puisse veiller au suivi de l’application de toutes ces mesures et que le Gouvernement s’engage à nous associer à cet indispensable travail d’évaluation : nous y serons attentifs !

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