Intervention de Jacques Bigot

Réunion du 4 février 2020 à 14h30
Bioéthique — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Jacques BigotJacques Bigot :

J’essaierai d’être aussi clair que possible sur le fond, à défaut de pouvoir l’être sur la forme.

Mes chers collègues, madame la ministre, les lois de bioéthique nous interpellent régulièrement sur la manière dont la société doit admettre les progrès réalisés par la science, la biologie ou la médecine, avec les dangers qu’ils peuvent comporter et les espoirs qu’ils peuvent susciter.

C’est la raison pour laquelle les débats ont été importants, comme l’ont dit Muriel Jourda ou encore Laurence Cohen. Ils ont été intenses. Ils ont fait état de notre diversité et des interrogations de chacun. Dans chaque groupe existe, bien évidemment, une liberté de vote sur ces questions, qui en appellent à nos consciences et à ce que nous pensons de ce qu’attendent nos concitoyens.

À cet égard, je veux remercier M. le président de la commission spéciale et les rapporteurs de la qualité du travail que nous avons effectué. À cet égard, je regrette que la commission n’ait pas été suivie dans l’hémicycle, mais nous savons que le débat parlementaire fonctionne ainsi.

Sur ces sujets, les débats sont essentiels. D’ailleurs, la convention d’Oviedo, qui émane du Conseil de l’Europe et qui a été si souvent citée – c’est l’une des rares à évoquer ce point –, insiste, en son article 28, sur la nécessité du débat public : « Les parties à la présente convention veillent à ce que les questions fondamentales posées par les développements de la biologie et de la médecine fassent l’objet d’un débat public approprié à la lumière, en particulier, des implications médicales, sociales, économiques, éthiques et juridiques pertinentes, et que leurs possibles applications fassent l’objet de consultations appropriées. »

C’est la raison pour laquelle existe le Comité consultatif national d’éthique (CCNE). C’est la raison pour laquelle des États généraux de la bioéthique ont été organisés. La commission et ses rapporteurs ont très naturellement essayé de tenir compte des débats qui ont eu lieu sur la place publique.

Venant de Strasbourg, je peux vous dire que, depuis plus de dix ans, le professeur Israël Nisand y organise, avec le soutien de la ville et de l’eurométropole, des débats sur les sujets de bioéthique qui passionnent la population. Ces débats peuvent, par exemple, porter sur la fin de vie. Les débats de cette année ont commencé cette semaine sur le thème : « Quel humain pour demain ? » Ces questions sont permanentes et doivent nous permettre de faire évoluer nos lois.

Sur le texte qui nous est proposé, le Comité consultatif national d’éthique a rendu un avis – l’avis 129. En présentant cet avis, le président du CCNE a déclaré que la loi à venir, que nous sommes en train de préparer, devait être « une loi de confiance dans l’individu sur les grandes avancées des sciences plutôt qu’une loi d’interdiction ».

Ce texte, mes chers collègues, ne répond sans doute pas à ce vœu.

Ainsi, le titre Ier ne fonde pas de révolution médicale. L’assistance à la procréation médicale était déjà possible pour les femmes. Il n’est pas question, ici, de GPA. La femme qui bénéficiera d’un don de sperme dans le cadre d’un projet parental avec une autre femme ou d’un projet parental personnel portera l’enfant ; elle est la mère.

La seule question qui aurait dû être davantage abordée dans le cadre du titre Ier, mais qui ne relevait plus stricto sensu de la bioéthique – Muriel Jourda a raison sur ce point – est celle de la parentalité : à côté de la parentalité naturelle, charnelle, et de la parentalité adoptive doit apparaître une parentalité liée à un projet parental et permise par l’évolution de la médecine, comme le président Alain Milon l’a dit dans un article paru hier dans le journal Libération.

La situation est naturellement plus compliquée pour un couple d’hommes : il y a alors utilisation du corps d’une femme, ce qui est contraire à nos valeurs éthiques, notamment au principe d’indisponibilité du corps humain. Personne n’a abordé cette question. Nous aurions pu espérer mieux pour la PMA.

Madame la ministre, le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale était un bon texte. Le texte du Sénat a au moins le mérite de ne pas avoir remis en cause la PMA, ce qui nous paraît important. J’espère que la navette permettra d’y réinscrire, notamment, le remboursement par la sécurité sociale.

Enfin, surtout, il faut faire comprendre à l’enfant né grâce à une PMA qu’il est aussi le fruit d’un donneur. Celui-ci n’est ni un père ni une mère. Il est comparable à celui qui donne le rein qui permet de sauver, à celui qui donne le cœur qui permet de survivre. Il faut admettre cette réalité du don, ce que tout le monde n’a pas fait.

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