Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 4 février 2020 à 14h30
Droits des usagers des transports en cas de grève — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette proposition de loi a pour objet de construire un nouveau droit pour nos compatriotes, celui d’accéder à un service minimum garanti, c’est-à-dire effectif, dans les transports publics.

Il s’agit de tenir compte de l’exaspération de tant de nos compatriotes qui se retrouvent régulièrement pris en otage, lors de conflits sociaux durs, alors qu’ils sont dépendants de la fiabilité des transports publics dans leur liberté d’aller et venir, qu’il s’agisse de se rendre au travail le matin ou d’en revenir le soir.

Il s’agit aussi, en créant ce nouveau droit, de donner du corps au principe souvent invoqué et trop peu appliqué de continuité des services publics.

Notre proposition de loi soulève plusieurs enjeux.

Le premier d’entre eux consiste à prendre acte de la dépendance quotidienne de nos compatriotes aux modes de transports collectifs. En quinze ans, nous sommes passés, pour prendre cette unité de compte, de 150 milliards de voyageurs-kilomètre à plus de 200 milliards. La part de marché des transports publics est de plus en plus importante, ce dont nous pouvons nous féliciter. Mais cette dépendance appelle également de la régularité et une plus grande fiabilité.

Le deuxième enjeu est écologique. Le 24 octobre dernier, la France a été condamnée par la Cour de justice de l’Union européenne pour avoir dépassé « de manière systématique et persistante » les seuils autorisés pour le dioxyde d’azote, émis notamment par les voitures individuelles.

Par conséquent, si l’on veut relever ce défi écologique, il faut développer la part des transports collectifs, ce qui suppose de rendre attractif le transport public.

Le troisième et dernier enjeu est législatif. La loi du 21 août 2007 censée instaurer le service minimum a constitué une première étape, un premier progrès, en organisant l’information des usagers en cas de grève : un salarié voulant faire grève doit désormais le déclarer quarante-huit heures à l’avance pour permettre à l’entreprise qui l’emploie d’informer les usagers et d’organiser le meilleur service possible.

Toutefois, comme vous le savez, ce texte n’a en aucun cas permis d’aboutir à un service minimum garanti. Nous devons aujourd’hui aller au-delà.

Je remercie la commission des affaires sociales et la rapporteure pour leur travail. À l’origine, nous avions prévu de concentrer sur les heures de pointe – environ deux heures le matin et deux heures le soir – un tiers de trafic journalier garanti en cas de grève. Mais nous avons très vite amendé cette disposition pour laisser aux autorités organisatrices de transport – les régions, par exemple, pour les TER, un certain nombre d’agglomérations et d’intercommunalités –, les plus à même d’apprécier la notion constitutionnelle de « besoins essentiels », le soin de juger quelles lignes devaient profiter en priorité de ce service minimum garanti. La commission a repris cette idée et je m’en félicite.

Nous maintenons le dispositif prévu dans la loi de 2007 : tout doit être fait pour favoriser d’abord le dialogue social. Ce n’est qu’en cas d’échec de cette phase de dialogue que le dispositif de service minimum garanti doit s’appliquer.

Nous avons tenu à inscrire dans le texte – je pense que Mme la rapporteure en parlera – un dispositif de remboursement automatique des titres de transport n’ayant pu être utilisés, faute de service, notamment durant les périodes de grève.

Il faut absolument simplifier la démarche, dont la responsabilité doit incomber non pas à celui qui subit la situation, mais à l’entreprise publique qui organise, gère et exploite le service. Nous tenons beaucoup à cette simplification et souhaitons qu’un remboursement intervienne automatiquement dans les sept jours, notamment lorsque le paiement a été réalisé par carte bancaire. Sans être le cœur de la proposition de loi, c’est un point fondamental.

Je voudrais maintenant répondre à quelques objections qui ont pu nous être opposées ici ou là, comme il est bien normal.

Tout d’abord, certains considèrent que vouloir encadrer le droit de grève revient à y porter atteinte. En réalité, je me suis souvent aperçu que l’argument principal de ceux qui soutiennent cette position est qu’une bonne grève, c’est celle qui crée le maximum de perturbations.

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