Intervention de Yannick Vaugrenard

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 15 janvier 2020 à 9h30

Photo de Yannick VaugrenardYannick Vaugrenard, rapporteur :

Notre visite a été l'occasion d'évoquer les crises régionales. Nos échanges ont notamment porté sur trois d'entre elles.

S'agissant de la Syrie, au moment de notre déplacement, la situation était en voie de stabilisation après l'intervention militaire turque contre les milices kurdes YPG dans le nord-est du pays. Cette opération, qui a surpris les Nations unies, compte tenu de l'équilibre des forces qui prévalait dans la zone, a permis à la Turquie de prendre le contrôle d'une bande frontalière destinée à assurer sa sécurité et dans laquelle elle envisage de rapatrier une partie des 3,5 millions de réfugiés syriens qu'elle a accueillis. La situation reste néanmoins précaire, la Turquie se disant prête à reprendre les hostilités en cas de retrait insuffisant des forces kurdes.

Il a également été question de l'offensive du régime syrien sur Idlib, où sont réfugiés un grand nombre de djihadistes. Cette opération est lourde de menaces pour les populations civiles et ses conséquences humanitaires sont d'ores et déjà dramatiques. Les infrastructures civiles et humanitaires sont de nouveau visées par les frappes systématiques des forces syriennes et de leurs alliés, lesquelles ont conduit au déclenchement d'une enquête par le Secrétaire général des Nations unies, à la demande de la France.

Nous avons également évoqué les débuts mitigés des travaux du comité constitutionnel à Genève. S'il faut saluer la reprise d'un processus politique paralysé depuis plus de deux ans, la réticence du régime syrien à s'y engager n'est cependant pas de bon augure.

La présence des combattants étrangers dans la région a également été abordée. Lors de son entretien avec notre délégation, la représentante américaine a insisté pour que les pays occidentaux rapatrient leurs ressortissants afin que les auteurs des atrocités soient punis. Sur ce dernier point, la délégation sénatoriale a eu la possibilité d'assister à une session publique du Conseil de sécurité consacrée aux crimes commis par Daech, au cours de laquelle elle a entendu des témoignages bouleversants.

Enfin, il a été question de l'avenir, alors incertain, de la résolution 2165 du Conseil sur l'aide humanitaire transfrontalière. La Russie s'y opposait en considérant que l'aide devait désormais passer par le régime syrien, dans la mesure où celui-ci avait repris le contrôle de la quasi-totalité du territoire. Peu après notre déplacement, en décembre, la Russie a opposé son veto à une résolution prévoyant le renouvellement de cette aide, contraignant le Conseil de sécurité à en voter une autre, beaucoup moins favorable, qui va priver d'aide humanitaire un grand nombre de Syriens survivant dans des conditions très difficiles.

Le deuxième sujet largement évoqué au cours de nos échanges a été le conflit en Libye. Tous nos interlocuteurs ont souligné l'impasse dans laquelle se trouve le pays, écartelé entre deux autorités concurrentes dont aucune n'est en mesure de l'emporter et qui refusent le dialogue. L'embargo de l'ONU sur les armes n'est pas respecté, les parrains des deux camps alimentant les forces en présence. La signature, en décembre, d'un protocole d'entente en matière de défense entre Tripoli et Ankara, prévoyant la fourniture d'une assistance militaire de la Turquie si le gouvernement de M. Fayez el-Sarraj le demandait, a fait monter un peu plus les tensions alors que l'Armée nationale libyenne du maréchal Haftar, soutenue militairement par l'Égypte et par les mercenaires russes, se trouve aux portes de la capitale.

Chacun connaît pourtant la solution pour la sortie de crise et l'ONU dispose déjà d'un plan. Tout le défi est d'amener au dialogue et à la négociation des protagonistes qui croient encore à la solution militaire.

Nous attendons, à cet égard, de constater les résultats du cessez-le-feu annoncé le 8 janvier par la Russie et la Turquie et entré en vigueur dimanche. Malgré leur rivalité théorique sur le terrain, ces deux puissances démontrent, par cette initiative, le rôle croissant qu'elles jouent dans ce conflit. Il faut souhaiter que cette trêve, si elle se concrétise, débouche sur une reprise du processus politique dans le cadre de la conférence internationale qui, conformément au plan de l'ONU, doit se tenir à Berlin dimanche prochain.

Je passe maintenant la parole à Olivier Cadic qui va poursuivre ce tableau des crises avec le Venezuela.

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