Le traitement de la crise du Venezuela à l'ONU est compliqué, compte tenu des positions très opposées des membres du P5. En effet, les États-Unis ont adopté une logique de changement de régime, avec une stratégie de pression maximale, alors que la Russie et la Chine soutiennent le gouvernement de M. Nicolas Maduro. Cette forte divergence s'est traduite par un veto russe et chinois au projet de résolution présenté en février 2019 par les États-Unis appelant à une nouvelle élection démocratique. De ce fait, l'ONU ne reconnaît pas M. Juan Guaido comme président du Venezuela par intérim. Elle soutient, en revanche, le dialogue politique que le groupe international de contact (GIC) tente de favoriser entre le gouvernement et l'opposition, et concentre son action sur le volet humanitaire. Après avoir fait barrage à l'entrée de l'aide humanitaire en début d'année 2019, M. Maduro a finalement reconnu la situation de crise et accepté l'aide internationale, même si l'accès n'est pas encore complet. Par ailleurs, l'ONU apporte son soutien, par l'intermédiaire de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et du HCR, aux quelque 4,5 millions de réfugiés vénézuéliens qui se trouvent dans les pays voisins. Enfin, il faut souligner la pression qu'exerce l'ONU sur le régime à travers l'observation de la situation des droits de l'homme.
Pour finir, nous souhaitons rendre compte de la place et du rôle joué par l'Union européenne à l'ONU. Si la charte des Nations unies ne prévoit que la participation des États et non des organisations régionales, l'Union européenne n'en est pas moins présente et active à l'ONU. Comme l'a souligné le représentant adjoint de la délégation européenne, son statut va au-delà du simple statut d'observateur : elle intervient au nom des États membres à l'Assemblée générale et au Conseil de sécurité, à condition toutefois que le consensus règne entre eux et à l'exclusion de tout vote. Elle est écoutée et respectée dans cette enceinte et de nombreux États attendent de connaître sa position pour se prononcer. On lui reconnaît, en outre, un rôle particulier sur certains dossiers, comme l'accord avec l'Iran sur le nucléaire.
Cette capacité de l'Union européenne à exister à l'ONU et à parler d'une seule voix implique cependant un intense travail de coordination au sein de sa délégation, où se tiennent plus de 1 000 réunions par an. Bien sûr, il n'est pas toujours possible de parvenir au consensus et des divisions s'expriment, notamment sur les dossiers liés au Moyen-Orient. Les désaccords sont aussi de plus en plus marqués sur les questions de société, comme l'immigration ou le droit à l'avortement. La Hongrie et la Pologne, en particulier, ont tendance à se désolidariser. Une méthode a été mise au point pour gérer ces difficultés, notamment au sein de la troisième commission de l'Assemblée générale : les États membres ont la possibilité d'exprimer leur désaccord sur certaines parties d'un texte, sans empêcher l'Union européenne de parler au nom de tous.
Grâce à cet important travail de coordination et aux compromis trouvés, l'Union européenne parvient à afficher une position unitaire sur 90 % des dossiers et pèse politiquement dans les dossiers pour lesquels l'unité est particulièrement forte, comme les questions climatiques.
Elle fait néanmoins face à de nouveaux défis.
Le premier d'entre eux est lié au Brexit. Si l'ensemble des interlocuteurs ont souligné la bonne entente qui prévaut entre les diplomates britanniques et les autres diplomates européens et le souhait qui s'exprime, de part et d'autre, de maintenir une bonne coordination, il est évident que le Brexit va changer la donne, puisque le Royaume-Uni ne participera plus aux réunions de la délégation de l'Union européenne. De nouvelles méthodes de coordination devront être mises au point, qui ne pourront cependant être précisées qu'après qu'auront été arrêtées les modalités de sortie.
L'autre changement est l'effacement stratégique américain et l'imprévisibilité de la politique américaine, qui imposent à l'Union européenne de rechercher de nouveaux alliés ad hoc, en transcendant la logique de blocs régionaux qui prévaut à l'ONU.
Nous avons pu apprécier l'intensité du travail mené à New York pour tendre vers une unité européenne, parfois plus forte qu'à Bruxelles même, dont le moteur est la conscience du rôle particulier de défense du multilatéralisme et du droit international que joue l'Union européenne dans le contexte actuel.
Pour conclure, j'ai été marqué par la grande émotion qui régnait lorsque les différents pays sont venus rendre hommage à nos militaires et présenter leurs condoléances à la France. Pour ceux qui auraient tendance à confondre ces deux États, les États-Unis l'ont fait, mais pas la Chine. M. Yannick Vaugrenard est intervenu devant l'ambassadeur chinois et a fini par obtenir que celui-ci les lui présente, je l'en remercie.