Intervention de Martin Lévrier

Réunion du 5 février 2020 à 15h00
Sécurité sanitaire — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Martin LévrierMartin Lévrier :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en complément de l’intervention de Michel Amiel, je soulignerai, d’abord, que la commission des affaires sociales s’est montrée soucieuse que les nouvelles mesures de sûreté sanitaire, dont certaines emportent des restrictions de la liberté d’aller et venir pour des motifs d’ordre public, soient assorties de toutes les garanties nécessaires à la protection des droits de nos concitoyens. Elle y a été particulièrement attentive en ce qui concerne la mesure d’isolement contraint, qui, sans terme explicite, présentait un risque élevé d’inconstitutionnalité.

Ensuite, je m’attarderai sur les apports de la commission aux articles 1er à 4, qui renforcent l’efficacité et la pertinence de l’intervention des acteurs publics face aux risques sanitaires émergents que sont les maladies vectorielles, c’est-à-dire transmises par la piqûre d’un moustique porteur d’un agent pathogène.

À notre sens, le maire, échelon local de proximité, doit conserver le premier rôle. C’est à lui que doivent incomber la surveillance des zones de sa commune où les gîtes larvaires sont susceptibles de se développer, mais aussi le signalement de ceux-ci. Si nous nous sommes montrés favorables à l’attribution à l’agence régionale de santé (ARS) de la compétence et de la responsabilité en matière de police des maladies vectorielles, le rôle de signalement reconnu au maire traduit notre souci d’intégrer pleinement celui-ci à la mission de police nouvellement créée, mais à la mesure de ses moyens, c’est-à-dire sans l’investir d’une charge que les réalités du terrain le rendent souvent incapable d’assumer.

En conséquence, la commission a supprimé l’article 3, qui présentait un risque de transfert implicite au maire de la compétence préventive de l’ARS. En effet, nous sommes attachés à ce que l’intervention du maire se limite à une obligation de moyens, que constitue le pouvoir de surveillance et de signalement, sans s’étendre à une obligation de résultat, qu’impliquait la fourniture d’états des lieux.

Par ailleurs, l’article 2 a fait débat en commission, dans la mesure où il menaçait l’équilibre atteint par la loi de 1964 relative à la lutte contre les moustiques, qui distingue nettement la compétence des conseils départementaux selon que la lutte contre le moustique vise la santé publique ou le confort. La démoustication de certaines zones, historiquement laissée à la discrétion des départements soucieux de développer leur potentiel économique ou touristique, a permis l’émergence d’acteurs spécialisés, d’ailleurs peu connus, dont la compétence doit être préservée. En érigeant la lutte de confort contre les moustiques en compétence obligatoire, l’article 2 entraînait une extension manifeste de compétence à la charge des conseils départementaux et menaçait la pérennité financière de leurs opérateurs. C’est pourquoi la commission a préféré en rester à l’état actuel du droit.

S’agissant, enfin, de la protection des droits des personnes contacts évincées, j’ai prévenu en commission que je maintiendrais ma vigilance sur cet enjeu important. Bien que très confiant dans le pragmatisme des professionnels de santé en la matière, je ne suis pas parfaitement convaincu que les dispositions en vigueur assurent une protection satisfaisante de la personne évincée en termes d’indemnisation des jours pendant lesquels elle est contrainte de ne pas travailler.

Vendredi dernier, madame la secrétaire d’État, quelque 200 Français revenus de Chine, dont la plupart ne sont a priori pas infectés par le coronavirus, ont signé un engagement à respecter une quarantaine de quatorze jours, dans un lieu où leur prise en charge administrative et juridique pourrait susciter des inquiétudes. Comment concevoir que cette éviction, à laquelle ces personnes se prêtent pour l’heure sans y être contraintes, ne soit pas assortie de garanties juridiques et financières spécifiques ? La commission présentera un amendement tendant à sécuriser explicitement les risques auxquels les personnes contacts s’exposent, ce qui me paraît le premier devoir d’un législateur averti.

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