Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la répétition des épidémies telles que la dengue ou le chikungunya dans les départements d’outre-mer et l’apparition de nouvelles épidémies, comme celle qui est liée au virus Zika en Polynésie française, font de la sécurité sanitaire un enjeu dont la réalité peut parfois conduire à un véritable traumatisme national.
Compte tenu de la présence de vecteurs d’épidémies en métropole, il est essentiel que nous disposions d’un système de lutte antivectorielle efficient.
Aujourd’hui, l’actualité législative de notre chambre rejoint l’actualité mondiale. Ce dimanche 2 février 2020, le coronavirus a fait un premier mort hors des frontières chinoises, aux Philippines. Au total, on enregistre 491 morts sur 24 300 contaminés dans 27 pays. Pour rappel, on dénombrait 348 morts dues au SRAS en Chine. La semaine dernière, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé l’épidémie comme une « urgence de santé publique de portée internationale » et de nombreux pays, dont la France, ont annoncé des mesures exceptionnelles.
Les personnes à risque, qu’elles soient françaises ou non, ont été isolées sous surveillance militaire à Istres, puis dans un centre de vacances, à Carry-le-Rouet.
Or, puisque l’on ne peut pas laisser l’exception devenir la règle, ces mesures exceptionnelles doivent intégrer un cadre législatif qui corresponde aux nouveaux défis qu’impliquent la mondialisation des transports, le réchauffement climatique et la vulnérabilité accrue de nos systèmes immunitaires. Compte tenu de cette dimension internationale des épidémies, les virus ne connaissant pas de frontières, la France doit travailler en concertation avec les autres États membres de l’Union européenne, ainsi qu’avec les services de l’OMS.
En mars 2017, le périmètre du texte n° 471 déposé par Mme Marisol Touraine, alors ministre des affaires sociales et de la santé, n’allait pas assez loin.
Réunie le mercredi 29 janvier 2020, sous la présidence de M. Alain Milon, la commission des affaires sociales a examiné, sur le rapport de M. Martin Lévrier, la proposition de loi qui nous intéresse aujourd’hui. Celle-ci fait déjà un très large pas dans la bonne direction.
D’emblée, le texte réaffirme la répartition des responsabilités entre l’État et les collectivités territoriales. Il revient à l’État d’élaborer et de mettre en place une politique de prévention et de lutte contre les maladies vectorielles, sans préjudice des missions d’hygiène et de salubrité dévolues aux collectivités.
C’est, je le crois, sur ce sujet de l’articulation des compétences que doit se porter notre attention la plus vive, en tant qu’élus représentant les territoires, en particulier la ruralité. En effet, l’enjeu est l’articulation de la responsabilité de l’acteur qui fonde sa compétence historique sur la proximité de son action – le maire – avec celle de l’acteur qui la fonde sur la spécialité de sa mission – l’ARS. Le rôle du maire en matière de lutte antivectorielle doit être limité à un rôle de signalement auprès du directeur de l’ARS, afin de ne pas alourdir excessivement ses missions.
La commission a supprimé l’instauration d’une compétence obligatoire de lutte contre les moustiques pour les départements, en raison du coût supplémentaire, important et non compensé, qu’elle impliquait.
Elle a également supprimé l’article 3, au motif qu’il présentait un risque de surcharge dans les compétences du maire.
Le médecin et l’ARS sont tous deux de bonne volonté. La difficulté réside dans le diagnostic différentiel et le lien numérique entre les deux : quand un médecin détecte des symptômes chez un patient, il doit pouvoir rapidement évacuer les doutes et, en un clic, faire remonter le signal faible à l’ARS – ces signaux faibles constituent en effet le seul outil crédible face aux super-épidémies de demain et à la propagation accrue par la mutabilité des sources et par l’intensification des déplacements. À cet effet, l’article 5 met à la disposition des professionnels de santé des outils informatiques accessibles.
Cela dit, parfois, le respect du protocole ne suffit pas. Il faut alors mettre en place des mesures d’éviction, voire de maintien à domicile.
En ce qui concerne l’éviction, il faut généraliser la règle de droit à tous les lieux accueillant des enfants ou de très nombreuses personnes.
Pour ce qui est de l’isolement contraint, nous avons décidé de renvoyer à un décret en Conseil d’État ce qui ne relève pas du domaine de la loi. Nous avons garanti la protection des libertés fondamentales par le juge des référés. Nous avons limité dans le temps la période d’isolement contraint à un mois renouvelable. Il faut suivre avec précision le volume d’évolution des cas d’isolement contraint.
Sous réserve de cette prudence, je voterai en faveur de ce texte tel qu’amendé par la commission.