Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 21 octobre 2015 à 9h00
Loi de finances pour 2016 — Mission «pouvoirs publics » - examen du rapport spécial

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

La France se caractérise par une fiscalité très élevée de manière générale et qui est corrigée par un certain nombre de dispositifs dérogatoires.

Une étude du cabinet Fidal d'octobre 2014, demandée certes par la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), mettait ainsi en évidence le fait que le poids de la fiscalité sur ce secteur était bien plus élevé dans notre pays que dans les six autres États européens étudiés.

Les taxes et les impôts grevant un appartement à 200 000 euros toutes taxes comprises (TTC) et détenu pendant dix ans représenteraient 56 % de son prix d'acquisition, contre 40 % au Royaume-Uni et 26 % en Allemagne. La seule construction et l'acquisition de ce même bien immobilier correspondraient à un taux d'imposition de 27 %, contre 20 % au Royaume-Uni et 10 % en Allemagne.

La détention serait également plus imposée que dans les autres pays européens. En revanche, en termes de cessions, la France se situerait à un niveau comparable à celui des autres pays analysés.

Bien sûr, cette étude doit être analysée avec prudence car elle a été réalisée sur le fondement d'hypothèses spécifiques et ses résultats ne sont pas nécessairement généralisables. Par ailleurs, tous ces pays ne consacrent pas nécessairement plus de 40 milliards d'euros en faveur du logement chaque année et n'ont pas autant de dispositifs dérogatoires en faveur de l'investissement.

Il est à noter qu'une partie des dépenses publiques en faveur du logement pèse également sur les budgets des collectivités territoriales puisque des exonérations pourtant obligatoires, par exemple de taxe foncière, ne sont pas compensées intégralement par l'État.

En réponse à une fiscalité particulièrement élevée, les dépenses fiscales permettent d'atténuer son poids en soutenant le marché immobilier, par une incitation à l'investissement et à la réalisation de travaux.

Tout ministre essaie de corriger les effets de la fiscalité générale en mettant en place un dispositif d'incitation à l'investissement locatif portant son nom. La réforme du dispositif « Duflot », devenu « Pinel », a ainsi contribué à soutenir la relance des commercialisations. Selon les chiffres de la FPI, les ventes enregistrées au profit de particuliers investisseurs, susceptibles de bénéficier du dispositif « Pinel », ont ainsi augmenté de 60 % au premier trimestre 2015 par rapport au même trimestre de l'année précédente. Cela s'explique essentiellement par le fait que la loi de finances pour 2015 a permis une modulation de la durée de l'engagement locatif ainsi que la possibilité - nous avons débattu en séance de ce point - de louer le bien à un ascendant ou un descendant. Les ventes sont donc beaucoup réalisées sous l'effet de ces dispositifs aidés.

En conséquence, il est apparu au groupe de travail que ces dispositifs d'incitation, qui ont une incidence fiscale considérable puisqu'ils pèsent 1,8 milliard d'euros dans le projet de loi de finances pour 2016, constituent un soutien du marché immobilier aujourd'hui difficile à remettre en cause, compte tenu de son fort effet déclencheur pour les investisseurs privés et même si l'effet d'aubaine ne peut parallèlement être nié.

Par ailleurs, l'avantage fiscal produit par ce type de dispositif est en partie capté par les intermédiaires, avec des marges d'intermédiation qui représenteraient de 5 % à 15 % du prix du bien - ce qui est considérable. Les Français veulent réduire leurs impôts mais, du coup, ils ne regardent pas vraiment le détail du « package » défiscalisant qui leur est proposé. C'est pourquoi le groupe de travail a jugé qu'il serait certainement utile de renforcer les obligations d'information concernant les prix des différents facteurs de production et les frais facturés par les intermédiaires. La fiscalité n'est pas là pour rémunérer des intermédiaires.

Il appartient également au ministère des finances de contrôler ensuite le respect par les bailleurs des engagements qu'ils ont pris, notamment en termes de loyers-plafonds. D'après les informations recueillies par le groupe de travail, il semblerait que ce contrôle ne soit pas réellement assuré s'agissant de dispositifs plus anciens, tels que le « Scellier intermédiaire ».

Ensuite, certains dispositifs fiscaux sont si complexes et si souvent modifiés qu'ils en deviennent difficilement lisibles, y compris dans les objectifs poursuivis. Je confirme également que, comme l'a indiqué Philippe Dallier, la plupart des dispositifs d'incitation fiscale concernent le logement neuf alors que l'essentiel de notre parc est ancien et doit être utilisé. Il n'est pas normal que le taux de logements vacants soit si élevé, en particulier dans les zones tendues.

Vincent Delahaye va nous présenter un premier exemple de complexité, qui concerne l'imposition des plus-values de cessions immobilières, sujet sur lequel il a déjà présenté des amendements l'an dernier dans le cadre de l'examen des projets de loi de finances de fin d'année. Il faut être un grand spécialiste pour s'y retrouver !

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