Le projet de loi initial comportait 22 articles. L'Assemblée lui a ajouté 10 articles additionnels. Sur ces 32 articles, le Sénat en a adopté 9 conformes, en a modifié 22, en a supprimé un, et non des moindres, et a introduit 4 articles additionnels. Il reste donc 26 articles en discussion. Mais il ne semble pas impossible d'aboutir à un accord, les rapporteurs des deux assemblées étant parvenus à des amendements communs sur la plupart des sujets en discussion.
L'article 20, relatif à l'inspection du travail, constituait la principale pierre d'achoppement. Pour éviter un rejet du texte, qui se serait révélé préjudiciable pour la mise en oeuvre des mesures phares portées par ce projet, notamment en termes de formation professionnelle, le Sénat a choisi d'amputer le texte de ces dispositions, compte tenu de la conjonction d'oppositions fortes mais dissemblables, les partis de droite se faisant les porte-paroles d'une forme d'inquiétude dans certains milieux patronaux, et certains parlementaires de gauche traduisant celle d'une partie des syndicats d'inspecteurs du travail. Je regrette, croyez-le bien, qu'aucun consensus ni accord n'aient pu être dégagés pour adopter ces dispositions. J'ai donc fait le choix de ne pas déposer d'amendement visant à réintroduire cet article afin de ne pas « passer en force ».
Cela étant dit, je me réjouis du travail accompli par le Sénat, qui a complété les améliorations engagées par l'Assemblée nationale. Nous avons souhaité maintenir le coeur de l'Accord national interprofessionnel (ANI) du 19 décembre et je me félicite que l'examen du projet de loi ait permis d'acter ces nouvelles orientations tout en prenant en compte les avancées relatives au secteur dit « hors champ » qu'il convient désormais d'appeler « organisations multi-professionnelles ».
Je ne vais pas revenir sur chacune des dispositions du texte. Aussi, vais-je me borner à souligner ce qu'il conviendrait de modifier pour parvenir à un texte abouti.
A l'article 1er, deux amendements sénatoriaux ont introduit des niveaux supplémentaires de réglementation de la qualité des formations : mais cet objectif de qualité a été satisfait ensuite par l'adoption de l'article additionnel 3 bis A et par une modification de l'article 21. Il me semble donc qu'il convient de revenir sur ces ajouts tout en soulignant qu'à mes yeux, sur le plan de la rédaction, ils étaient mieux traités par l'article 3 bis A. Si la mise en place du compte aura en elle-même un effet positif, les discussions menées au Sénat ont eu le mérite de poser la question de la qualité des formations.
Je me dois également de souligner que la question du maintien, à l'article 3, de l'expérimentation relative aux contrats de professionnalisation conclus par les particuliers employeurs ne me semble pas opportune et nous renvoie à une CMP célèbre que nous avions eue au moment de l'examen de la loi Cherpion, ne serait-ce qu'en raison de l'absence d'éléments de justifications. La prolongation de l'expérimentation, qui avait été supprimée par l'Assemblée nationale à mon initiative, a été rétablie par le Sénat. Bien que défavorable à son maintien, et dans un esprit d'ouverture, je ferai des propositions que nous aurons l'occasion de discuter en temps utile. Nous aurons une discussion et pouvons imaginer de maintenir un système d'expérimentation à terme.
Je me félicite des différentes modifications apportées aux articles 4 et 5 dans le but de faciliter la répartition des sommes versées au titre du CIF ou de sécuriser le versement au FPSPP des excédents des Opca au titre du CPF, une disposition réintroduite à l'Assemblée nationale. Des précisions supplémentaires pourront cependant être apportées afin de sécuriser le dispositif.
S'agissant de la partie relative à l'apprentissage (articles 6 à 9 ter), je pense qu'il peut être utile de préciser que la mobilité internationale des apprentis doit être favorisée dans le cadre des programmes de l'Union européenne, dans un parallélisme des formes avec les dispositifs en place pour les étudiants. Le programme Leonardo notamment permet aux apprentis d'enrichir leur expérience professionnelle par un stage dans une entreprise ou dans un établissement de formation en Europe. Les apprentis doivent être encouragés à faire appel à ces programmes.
Par ailleurs, l'article 22 du projet de loi habilite le Gouvernement à appliquer, par ordonnance, ce projet de loi à Mayotte : il n'est donc pas juridiquement souhaitable de faire référence au département de Mayotte à l'article 9 et nous proposons donc, dans un amendement de coordination, de supprimer cette référence.
Enfin un amendement rédactionnel est proposé à l'article 9 ter : malgré sa taille importante, il n'apporte aucune modification sur le fond et se contente de réorganiser cet article pour une codification plus cohérente et plus lisible.
Sur le volet, prévu à l'article 11, du transfert aux régions des compétences en matière de formation professionnelle, trois points me semblent principalement devoir être revus. Il s'agit en premier lieu du champ des formations financées à titre gratuit par la région, pour lesquelles le Sénat a souhaité que soient incluses des formations de niveau III ou plus pour certaines professions : si je comprends bien l'intention d'un tel élargissement, il me semble néanmoins assez difficile à admettre par les régions, et pourrait se révéler contreproductif par rapport aux financements actuels. Si certaines professions nécessitent effectivement des formations de niveau III, prévoir leur gratuité pourrait poser problème aux régions : je proposerai donc de revenir sur cet élargissement.
Ensuite, nous souhaitons, avec mon collègue Jeannerot, proposer de clarifier les choses s'agissant de l'achat coordonné de formations collectives par la région et Pôle emploi : la rédaction actuelle laisse planer des doutes, et nous voulons pouvoir clairement affirmer que dès lors que Pôle emploi souhaite procéder à des achats de formations collectives, il doit le faire dans le cadre d'une convention avec la région. Cette possibilité est bien inscrite dans le texte mais il subsiste des flous qu'il nous faut supprimer.
Enfin, sur le sujet de l'Afpa, nous avons bien avancé, en particulier le Sénat, qui a permis de sécuriser les choses s'agissant du transfert des biens mis à disposition de cet organisme aux régions. Il faut encore aller plus loin en la matière, et faire en sorte que cette sécurisation soit également suffisamment incitative pour les régions : nous aurons donc l'occasion de vous proposer une rédaction commune sur ce point.
A la faveur de l'adoption, par le Sénat, d'un amendement déposé par le groupe CRC, l'intitulé des contrats de plan régionaux relatifs à la formation et l'orientation professionnelles a été modifié dans l'ensemble du texte (articles 11 à 14). Ce changement alourdissant inutilement l'intitulé et rendant imprononçable l'acronyme, il semble plus raisonnable de s'en tenir à la rédaction issue du texte initialement déposé.
Il me semble également opportun de préciser, à l'article 12, que les organismes participant au conseil en évolution professionnelle sont parties prenantes du service public régional de l'orientation, le texte n'étant pas suffisamment explicite.
Ayant suscité de grands débats, la mention explicite des organismes consulaires comme composantes du Cnefop, des comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Crefop) et de leurs bureaux est également source de confusion. L'intention du Gouvernement est parfaitement claire : les organismes consulaires ont vocation à être parties intégrantes de cette gouvernance renouvelée mais il n'est pas envisageable de dresser dans la loi la liste complète des membres sans prendre le risque d'une rédaction illisible et d'omissions. Nous devons bien préciser qu'en tout état de cause, les chambres consulaires ne peuvent être parties prenantes à la concertation nationale organisée par le Cnefop et membres des bureaux des Crefop.
Sur le titre II, relatif à la démocratie sociale, peu de modifications nous semblent devoir être apportées : elles sont, en tout état de cause, toujours consensuelles, puisque nous présentons des propositions communes de rédactions, qui j'espère recevront donc un accueil favorable dans le cadre de cette CMP.