Intervention de Michel Boutant

Réunion du 25 mars 2009 à 14h30
Politique étrangère — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Michel BoutantMichel Boutant :

… pourquoi ce retour, après quarante-trois ans, au sein d’une organisation dont le but était de faire face à un bloc dans un contexte de guerre froide ?

N’aurait-il pas fallu, préalablement à tout engagement, s’interroger sur la définition d’une doctrine nouvelle, d’une stratégie nouvelle, du périmètre rectifié de l’OTAN, sachant que certaines demandes, comme celle de l’Ukraine et de la Géorgie, créent des difficultés par rapport à la Russie ?

A-t-on perdu de vue la position singulière de la France, en retrait de l’OTAN, mais toujours alliée fidèle des États-Unis ?

Rappelons-nous les semaines qui ont précédé les débuts de la deuxième guerre d’Irak et la parole de la France, qui a cristallisé la position de nombreux pays autour d’elle. Rappelons-nous les aveux du président Bush sur cette période précise au moment où il a quitté la Maison-Blanche.

Dans une interview au New York Times, le 24 septembre 2007, le Président de la République déclarait : « Je conditionnerai un mouvement dans les structures intégrées par une avancée sur l’Europe de la défense. »

Quelles sont ces conditions ? Ont-elles été fixées dans la lettre adressée par le Président de la République au secrétaire général de l’OTAN le 20 mars dernier ? S’agit-il de la construction d’une Europe de la défense, mais avec qui et sur quelles bases ?

On peut pousser la réflexion encore plus loin et se demander si, durant la présidence française de l’Union européenne, n’auraient pu être posées les conditions de ce mouvement, notamment les fondements d’une politique étrangère commune à l’Europe, une politique singulière, élément d’un monde multipolaire, une politique sans arrogance mais sans faiblesse non plus à l’égard de tous les obscurantismes, tous les intégrismes, tous les terrorismes.

Bref, on a sans doute gâché là, et pour longtemps, l’occasion d’émanciper l’Europe sur les plans diplomatique et militaire, ce qui la maintiendra toujours dans l’orbite des États-Unis. Est-ce par souci de mutualisation, par habitude ou par confort ? En tout cas, l’Europe sera privée, en même temps que la France, d’une certaine autonomie et d’une certaine liberté de jouer dans le monde un rôle digne de son histoire, elle qui a vu naître la démocratie et qui a su tirer les leçons de ses déchirements meurtriers pour construire la paix et donner l’espoir au monde.

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