J'ai été nommé rapporteur de ce texte ce matin ! Mais je vous conseille de lire l'exposé des motifs, qui est extrêmement clair. Nous venons d'auditionner la secrétaire d'État chargée des affaires européennes, qui a confirmé nos craintes, s'agissant de cette négociation d'un nouveau partenariat avec le Royaume-Uni. Ce ne sera pas simple. Je reviendrai sur quelques points particuliers.
Sur la politique étrangère et la défense, nous souhaitons un partenariat aussi proche que possible avec le Royaume-Uni, qui reste le partenaire le plus naturel de la France en Europe, du point de vue de sa culture stratégique et de ses ambitions opérationnelles et capacitaires. C'est un partenaire clef aussi en raison de sa place à l'ONU et à l'OTAN. Je suis très optimiste sur ce partenariat bilatéral de défense : il restera excellent.
Notre coopération bilatérale sera marquée cette année par la célébration de l'Appel du 18 juin, et par les dix ans des traités de Lancaster House. La force expéditionnaire conjointe franco-britannique doit bientôt atteindre sa pleine capacité opérationnelle. Notre coopération dans le domaine capacitaire, notamment en matière de missiles et de guerre des mines, est essentielle. Cette coopération bilatérale est structurante pour la défense européenne. Elle doit se poursuivre et se renforcer.
Nous appelons à la mise en place de mécanismes permanents d'échange et de coopération entre le Royaume-Uni et l'Union européenne, mais le gouvernement britannique ne souhaite ni un nouveau traité ni de nouvelles institutions. Cela me convient, mais cela ne risque-t-il pas de fragiliser considérablement la défense européenne ?
Nous craignons aussi l'impact de la révision à la baisse du budget du Fonds européen de la défense. La récente proposition du président du Conseil, Charles Michel, dénote un progrès. Alors qu'on était passé de 13 milliards d'euros à 6 milliards d'euros, il propose 1 milliard d'euros supplémentaires. Ces évolutions risquent toutefois de remettre en cause l'ambition d'autonomie stratégique européenne.
La question des droits des citoyens est supposée réglée par l'Accord de retrait, qui fournit un certain nombre de garanties aux 4,5 millions de citoyens dont le Brexit fragilise le statut : 3,2 millions d'Européens résidant en Angleterre, et 1,2 million de Britanniques installés en Europe. La PPRE insiste sur la nécessité de faire respecter scrupuleusement cet accord, pour sécuriser la situation de ces personnes, alors que des incertitudes demeurent. Nous demandons de la souplesse et une prise en compte des situations particulières. Nous souhaitons aussi, autant que possible, la distribution de documents attestant du maintien des droits des personnes afin de recréer un climat de confiance qui fait actuellement défaut. Pour les citoyens qui souhaiteront s'établir après la fin de la période de transition, soit après le 31 décembre, le sujet n'est pas traité par cet accord, les perspectives sont particulièrement floues et la secrétaire d'État n'est pas parvenue à les éclaircir pour nous.
Le risque d'éclatement du Royaume-Uni est également une source d'inquiétude, comme nous l'avons vu récemment en Écosse. Le gouvernement écossais est entré en campagne en faveur d'un second référendum sur l'indépendance, susceptible, d'après les derniers sondages, d'aboutir à un résultat positif - et Boris Johnson s'est empressé d'indiquer qu'il n'en était pas question. La situation est donc bloquée. En Irlande, la victoire du Sinn Fein aux récentes élections législatives complique la situation, puisque ce parti rejette en bloc le dispositif frontalier prévu.
En définitive, les déclarations récentes du Premier ministre Boris Johnson sont inquiétantes. Il aura à coeur de donner un nouvel élan au Royaume-Uni et ne se privera sans doute pas de jouer sur nos divisions. Il faut donc se préparer à tout, notamment à ne pas aboutir, ou à parvenir à un accord a minima dont les répercussions économiques doivent être anticipées.
Tels sont les éléments que je puis vous apporter pour lancer le débat. J'ai bien compris que ne voteront aujourd'hui que les membres de la commission des affaires européennes. La commission des affaires étrangères se prononcera formellement mercredi prochain mais ses membres sont invités à enrichir le texte dès aujourd'hui grâce à cette réunion commune.