Je voudrais à mon tour saluer cette initiative bienvenue et remercier les ambassadeurs de leur présence. Rappelons la phrase de Camus : « Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur de ce monde. » On peut la paraphraser pour dire que bien nommer les situations peut certainement aider à résoudre des problématiques à la fois extrêmement difficiles et complexes.
Je rentre du Forum de Bamako. J'ai pu faire un point précis avec les militaires français, notamment le général Pascal Facon, qui commande Barkhane, ainsi qu'avec notre ambassadeur Joël Meyer et ses équipes, mais aussi avec le président Ibrahim Boubacar Keïta, qui m'a fait l'honneur d'un entretien approfondi.
La démarche actuelle présente des aspects positifs et suscite des questionnements. Le positif, nous l'avons senti à Pau, malgré le scepticisme initial. Le Président de la République m'a fait l'honneur de m'y inviter. Il y a aujourd'hui une nouvelle dynamique. Le président malien s'implique personnellement dans la démarche ; il exige des rendez-vous tous les quinze jours avec tous les acteurs, notamment locaux, pour un suivi, une évaluation, un « monitoring ». C'est positif.
Puisque le diable est dans les détails, il faut aussi préciser les choses. Les militaires français sont les premiers à dire que l'action militaire n'a de sens que si elle est suivie par une démarche de développement. L'Agence française de développement est un outil précieux ; elle a vocation à s'impliquer très fortement dans les différents pays, là où la sécurité revient. Cela ne fonctionne pas toujours comme on le souhaiterait, par exemple à Ménaka : le retour de l'AFD s'est fait alors que les engagements sécuritaires non tenus limitaient l'action de développement.
Je reformule la question de notre collègue Todeschini sur le dialogue avec certains groupes djihadistes terroristes. Cela mérite au minimum certains éclaircissements. Avec qui négocie-t-on ? Et avec qui ne négocie-t-on pas ? Avec quels objectifs ? À quelles conditions ? Avec quelles limites ? S'il doit y avoir discussion, ce qui a été dit sur la nature de certains groupes et le fait que l'on a vocation à les combattre doit être réaffirmé. Il faut être au clair là-dessus. L'ambiguïté serait la pire des choses.
Le diable se situe dans les détails. Les soldats des différents pays sont des soldats courageux qui payent le prix du sang ; ce sont des frères d'armes, nous le savons. Pour qu'ils puissent mieux jouer leur rôle sécuritaire, il faut qu'une série de questions, notamment en termes de commandement, de formation et de solde, puissent être résolues. J'ai connu une époque où le Mali suscitait de grandes espérances. C'était il n'y a pas si longtemps. Ce n'est pas hors de portée que de retrouver cette espérance. Il y a une volonté politique sur place. Il y a des conditions pour y parvenir.
Nous attendons vos réponses. La France est très engagée sur tous les plans, dans ces pays du Sahel si proches de nous.