Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 27 septembre 2010 à 14h30
Débat sur les mécanismes de péréquation et de répartition des ressources des collectivités locales

Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, à la veille du dépôt du projet de loi de finances pour 2011, vous avez souhaité débattre de nouveau des conséquences de l’une des plus importantes réformes qui aient été conduites par le Gouvernement et par votre majorité. Je veux bien sûr parler de la suppression de la taxe professionnelle et de la réforme de la fiscalité locale que vous avez adoptée l’an dernier au terme de discussions intenses et approfondies.

Ce débat, dont j’espère qu’il ne sera ni futile ni stérile, est l’un des nombreux rendez-vous fixés, sur l’initiative de votre assemblée, pour faire le bilan de cette réforme, en mesurer les conséquences et y apporter les compléments et les ajustements nécessaires.

Cette démarche, relativement inédite, est excellente : elle mériterait d’être appliquée de manière plus systématique pour vérifier les effets des dispositifs législatifs que vous adoptez, pour en mesurer l’efficacité et pour déterminer s’il est nécessaire de procéder à des réajustements ou à des améliorations.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais très rapidement revenir sur le chemin parcouru, la méthode retenue et les diligences entreprises par les uns et par les autres, avant d’examiner si les deux grands objectifs du texte ont été remplis. Ensuite, je tracerai les grandes lignes des améliorations que nous proposons d’ores et déjà dans le projet de loi de finances pour 2011, auxquelles, je l’espère, vos interventions feront écho.

La réforme de la taxe professionnelle compte parmi les plus importantes réformes, en matière de fiscalité, qui aient été adoptées ces dernières années. Voulue par le Président de la République, qui s’était engagé à la mener le 5 février 2009, elle constitue une étape essentielle de notre politique de relance de l’investissement, en particulier au service du secteur industriel, qui, je le rappelle, a perdu nombre d’emplois au cours de la dernière décennie. Nous souhaitions que ce secteur ne soit pas accablé par une fiscalité curieuse, que l’on ne retrouve en l’état dans aucune autre législation, et c’est le travail auquel vous vous êtes attelé.

Cette réforme était un signal fort envoyé en direction des investisseurs. Je souligne au passage que l’investissement des entreprises a crû de 1, 1 % lors du deuxième trimestre de 2010, en augmentation pour la première fois depuis le début de la crise. Ce résultat est un signe extrêmement important, d’une part, de la confiance des entreprises dans notre économie et, d’autre part, de la reconnaissance des efforts que nous avons entrepris pour favoriser leur investissement et pour éviter de leur faire supporter une fiscalité trop lourde. Tel était notre premier objectif.

Le deuxième objectif était de prévoir un financement des collectivités territoriales qui soit plus logique et respectueux des principes constitutionnels et des engagements auxquels chacun est tenu.

Souvenez-vous, nous avions trouvé, au terme d’intenses débats, un accord sur un schéma profondément novateur qui présente trois traits essentiels.

Tout d’abord, il concentre sur le secteur communal l’essentiel du produit des impôts fonciers locaux, et notamment l’intégralité de la taxe d’habitation – j’y reviendrai tout à l’heure en matière d’abattements – rendant ainsi le système fiscal local plus lisible pour nos concitoyens.

Ensuite, il organise un équilibre entre, d’une part, la préservation du lien fiscal entre territoires et entreprises et, d’autre part, la mise en place de mécanismes de péréquation qui contribueront à mieux accorder les ressources et les charges de chaque collectivité.

Enfin, il garantit qu’il n’y aura aucun perdant parmi les collectivités territoriales, ni en 2010, année de transition, ni en 2011, lors de la mise en place effective de la réforme.

Avons-nous réussi ? Nous avons mis en place des moyens pour vérifier que nous atteignions nos objectifs. Certains d’entre vous sont d'ailleurs intervenus, à cet égard, dans le cadre d’une mission.

J’ai chargé une mission conjointe de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale de l’administration d’évaluer les effets du texte. Ses travaux m’ont été remis. Le Gouvernement en a adopté les grandes lignes dans son rapport d’évaluation, qui a été soumis à votre examen à l’occasion d’une audition, le 22 juin dernier, devant la commission des finances. Nous avons pu ainsi, avec mon collègue Alain Marleix, vous exposer en détail les conclusions de ce rapport.

Nous avions également demandé à six parlementaires, dont les sénateurs François-Noël Buffet, Alain Chatillon et Charles Guené, de mener leurs propres investigations en s’appuyant sur les éléments d’analyses statistiques fournis sous l’autorité de Bruno Durieux. Ce rapport a été transmis au Parlement le 5 juillet.

J’ai veillé par ailleurs à mettre à la disposition de tous les acteurs de la réforme des mécanismes de simulation. Ceux-ci continueront à être mis à jour, à la lumière des nouveaux chiffres dont nous disposons au fur et à mesure des déclarations des entreprises et du raffermissement de notre économie. Un simulateur révisé régulièrement est donc destiné aux collectivités territoriales. Un simulateur a également été développé pour les entreprises, afin de leur permettre de calculer très rapidement leur contribution économique territoriale en lieu et place de la taxe professionnelle.

Tous les décrets d’application et toutes les instructions nécessaires à la mise en œuvre de la réforme ont été publiés ou mis en ligne sur le site internet du ministère au cours du premier semestre de 2010.

Enfin, tous les services de l’État sur le terrain se sont mobilisés pour assurer le succès de la réforme. Avec le ministre du budget, nous avons réuni dès le mois de janvier les experts-comptables et les responsables locaux de la direction générale des finances publiques, la DGFIP, pour s’assurer d’une pleine mobilisation des services sur tout le territoire.

À la lumière des éléments d’analyse et de conclusion qui ont été développés tout à la fois par les inspections générales, le Gouvernement et la mission parlementaire, peut-on considérer que nous avons atteint les objectifs que nous nous étions fixés ?

L’objectif principal, à savoir encourager l’investissement, soutenir en particulier le secteur industriel et avantager, dans la mesure du possible, les petites et moyennes entreprises, est atteint. Les chiffres que nous présenterons dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 le confirment.

En régime de croisière, l’allégement de charges fiscales pour les entreprises devrait atteindre 4, 7 milliards d'euros par an, ce qui est conforme aux prévisions ; quant à la « bosse de taxe professionnelle » que nous avions anticipée, elle s’est finalement étalée sur 2009-2010 et sera donc moins importante que prévu en 2010, ce qui est une bonne nouvelle pour la trajectoire de redressement de nos comptes publics.

En moyenne, pour les entreprises, le coût des investissements en biens d’équipements mobiliers est réduit de 20 %. Si l’on considère plus spécifiquement les petites et moyennes entreprises, notamment dans le secteur industriel, l’allégement de charges induit par la suppression de la taxe professionnelle est plutôt de l’ordre de 40 % à 60 %.

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