Intervention de Sophie Cluzel

Réunion du 26 février 2020 à 15h00
Prestation de compensation du handicap — Vote sur l'ensemble

Sophie Cluzel :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, cher Philippe Mouiller, mesdames, messieurs les sénateurs, aujourd’hui nous nous retrouvons afin d’entériner un texte dont l’initiative revient au Sénat, avec le soutien du Gouvernement, et qui va changer concrètement la vie de milliers de personnes en situation de handicap.

Le 3 octobre dernier, vous déposiez, monsieur le président Milon, cette proposition de loi, à l’appui des travaux conduits par le sénateur Philippe Mouiller, avant une adoption en première lecture par votre chambre, à l’unanimité, le 5 novembre.

L’examen de ce texte à l’Assemblée nationale le 15 janvier a ensuite permis d’enrichir celui-ci, en ses articles 2 et 4 – j’en profite pour rendre hommage à votre collègue député Philippe Berta, qui s’était déjà par le passé saisi de cette question. L’adoption de cette proposition de loi à l’unanimité est le signe, je le crois, d’une reconnaissance de sa qualité.

Votre commission des affaires sociales a adopté ce texte modifié, là encore, à l’unanimité, ne laissant plus aujourd’hui place qu’aux explications de vote et au vote.

En cinq mois donc, nous aurons fait évoluer positivement plusieurs dispositions d’importance relatives à la prestation de compensation du handicap (PCH). Je crois que nous pouvons nous féliciter collectivement de cette célérité et de cet esprit qui nous ont animés.

J’ai eu l’occasion de le rappeler la semaine dernière devant un certain nombre d’entre vous, le travail engagé s’est aussi prolongé sur le champ de la compensation du handicap, avec des annonces fortes du Président de la République le 11 février dernier à l’occasion de la Conférence nationale du handicap.

Tout d’abord, nous rouvrons pour la première fois le périmètre des besoins compensés par la prestation avec, au 1er janvier 2021, son élargissement aux besoins attachés aux parents en situation de handicap d’enfants jusqu’à 7 ans. C’est un investissement de 184 millions d’euros que nous réalisons pour que le handicap ne soit plus un obstacle au projet parental, qu’il ne soit plus source de renoncement à une vie à laquelle tout un chacun peut prétendre.

Aussi, il sera bientôt mis fin à la situation ubuesque selon laquelle une personne en situation de handicap peut être accompagnée pour se nourrir, mais, dans le même temps, pas pour laver sa vaisselle.

Enfin, nous allons engager un travail pour identifier concrètement les évolutions qui doivent s’attacher à la prestation de compensation du handicap pour une meilleure prise en compte des handicaps psychiques et du trouble du neuro-développement.

Au-delà de ces annonces, nous parlions, lors de l’examen de ce texte en commission, de l’importance de la nécessaire coconstruction qui doit animer tant l’État que les collectivités territoriales, au premier rang desquelles l’Assemblée des départements de France (ADF).

Je connais, mesdames, messieurs les sénateurs, votre attachement aux départements ; c’est effectivement ensemble que nous réussirons.

L’accord de méthode signé voilà deux semaines entre l’État, l’Assemblée des départements de France, les fédérations et associations gestionnaires de l’offre médico-sociale constitue à ce titre un acte important, et je remercie encore Dominique Bussereau, président de l’ADF, et Frédéric Bierry, notamment de la qualité de notre travail en commun.

Il nous permettra de construire les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) de demain, au plus proche des besoins des personnes et garantes de la maîtrise des délais pour l’attribution des droits. Cette exigence, nous devons nous la fixer collectivement, là où nous nous sommes trop habitués aux difficultés. L’État sera exigeant concernant l’équité de traitement sur le territoire, et soutiendra aussi, y compris financièrement, cette ambition.

Oui, il reste encore à faire, mais je veux croire que le chemin que nous prenons est le bon, à l’image de la proposition de loi qui nous est présentée aujourd’hui et dont je souhaite rappeler les principes.

L’article 1er du texte supprime une barrière d’âge. Cette nouvelle rédaction permet aux personnes en situation de handicap n’ayant pas formulé de demande de prestation de compensation du handicap avant 75 ans, mais qui, du fait d’évolutions familiales ou situationnelles, ont désormais besoin de cette aide, de pouvoir enfin l’obtenir ; 10 000 personnes sont concernées.

Cet article a déjà été adopté par votre chambre, mesdames, messieurs les sénateurs ; vous en connaissez le contenu et la portée.

L’article 2 contribue à l’évolution du dispositif relatif aux fonds de compensation. Il ouvrira la voie à un décret, pris dans les six mois suivant l’adoption de la loi – j’ai réaffirmé ce principe devant votre commission la semaine dernière –, qui fixera l’emploi de ces fonds, en concertation avec les associations.

Au-delà de la parole du Gouvernement, l’adoption, lors de la discussion à l’Assemblée nationale, d’un amendement qui tend à proposer au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport dans les dix-huit mois suivant l’application du décret, est un gage de notre volonté commune.

L’article 3 vise à inclure la PCH dans le corpus des droits à vie, dès lors que le handicap n’est pas susceptible d’évoluer favorablement. Il est la continuité de notre objectif de double simplification, à la fois celle – majeure – de la vie des personnes en situation de handicap aux parcours parfois révoltants, mais aussi celle des MDPH, qui pourront se recentrer sur leur mission d’accompagnement et de conseil des personnes en situation de handicap.

J’en viens, enfin, à l’article 4, dont la rédaction initiale a été enrichie lors de la première lecture au Sénat pour englober la question des transports, mais aussi, sur l’initiative de la sénatrice Patricia Schillinger, celle de la compensation du handicap pour les enfants.

De la même manière que le Gouvernement avait été favorable à l’ajout par le Sénat de la compensation pour les enfants, l’extension, concernant les transports, au milieu ordinaire représente un progrès important issu des travaux de l’Assemblée nationale, car il est le prolongement de la cité inclusive que nous souhaitons, de la pleine intégration des personnes en situation de handicap dans le droit commun autant que faire se peut, sans créer de chemins parallèles entre les personnes en situation de handicap et les autres.

Sur la question des enfants, je souhaite, là aussi, rappeler que nous avons pris des engagements nouveaux lors de la Conférence nationale du handicap, qui constituent des éléments de réponse importants aux difficultés plusieurs fois soulevées, notamment dans le rapport récent de Daniel Lenoir.

D’une part, nous étendrons l’année prochaine le forfait d’intervention précoce mis en place au titre de la stratégie nationale pour l’autisme au sein du trouble du neuro-développement à l’ensemble des enfants de 7 à 12 ans. Cela permettra notamment d’apporter une réponse plus rapide et plus structurée aux enfants qui souffrent de troubles dys ou de troubles de l’apprentissage, que nous ne pouvons laisser sans accompagnement.

D’autre part, mais c’est un chantier qui va nous prendre un peu de temps, nous souhaitons, d’ici à 2022, être en mesure de proposer un parcours de soins de rééducation à tous les enfants en situation de handicap ou souffrant de suites de maladies lourdes, avec une prise en charge par l’assurance maladie et une exigence de qualité. Avec cette approche, nous viserons aussi à simplifier l’accès à ces professionnels pour les familles, qui sont aujourd’hui confrontées à des choix complexes entre les dispositifs de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) ou de la PCH sur ces questions de soins.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, sans préjuger le vote à venir, je crois sincèrement que ce jour marquera un changement majeur pour nombre de nos concitoyens.

Monsieur le rapporteur, lors de votre propos introductif la semaine dernière, vous appeliez à la concision, tant nous sommes tous sur la même ligne quant au sujet qui nous réunit aujourd’hui. Je suis tout à fait d’accord avec vous : c’est pourquoi je ne serai pas plus longue et vous appelle, mesdames, messieurs les sénateurs, à adopter définitivement cette belle proposition de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion