Intervention de Corinne Feret

Réunion du 26 février 2020 à 15h00
Prestation de compensation du handicap — Vote sur l'ensemble

Photo de Corinne FeretCorinne Feret :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, se trouver en situation de handicap, c’est se heurter au quotidien à des obstacles majeurs supplémentaires ; c’est avoir besoin d’aide, d’équipements et d’aménagements. Tout cela représente un coût ; et c’est pour la prise en charge de ces besoins qu’intervient la prestation de compensation du handicap. Cette aide personnalisée versée par les départements constitue l’un des dispositifs importants de la loi du 11 février 2005.

Je tiens à remercier le président de la commission des affaires sociales, Alain Milon : son texte, que nous examinons aujourd’hui en deuxième lecture, vise précisément à améliorer la PCH. Je salue également le travail accompli par notre collègue rapporteur, Philippe Mouiller, quant au financement de l’accompagnement médico-social des personnes en situation de handicap.

Le présent texte s’attache à simplifier et à rendre davantage effectifs plusieurs éléments de la PCH. La suppression de la barrière d’âge de 75 ans, la création d’un droit à vie, les modalités de versement facilitées, le reste à charge de moins de 10 % : toutes ces avancées justifient que, sans hésitation, les élus du groupe socialiste et républicain votent aujourd’hui cette proposition de loi.

Néanmoins, nous n’ignorons pas la réalité vécue par les personnes en situation de handicap et par leurs familles. Les délais d’instruction des demandes et des décisions relatives à l’attribution de la PCH sont encore beaucoup trop longs et varient grandement d’un département à l’autre. En outre, l’on retrouve ces inégalités territoriales dans les critères d’éligibilité des bénéficiaires, très hétérogènes, comme dans les montants versés, trop variables d’un département à l’autre.

Nous n’oublions pas non plus que la PCH ne couvre pas les besoins réels des personnes. À ce titre, je n’invoquerai qu’un seul exemple : l’impossibilité de mobiliser cette prestation pour les interventions au titre de la vie quotidienne.

De surcroît, la PCH répond insuffisamment aux besoins spécifiques des enfants en situation de handicap et des personnes souffrant d’un handicap psychique.

Enfin, les personnes dont le handicap survient après 59 ans ne peuvent prétendre à cette prestation. Il conviendrait de supprimer la barrière des 60 ans : dans les faits, un handicap survenu après cet âge sera traité au titre du vieillissement, donc avec une prise en charge beaucoup moins favorable.

Ces considérations me conduisent à évoquer deux sujets liés à l’actualité récente. Ils préoccupent beaucoup les personnes en situation de handicap, leurs familles et leurs représentants.

Premièrement, la prise en compte des revenus du conjoint pour le calcul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) est depuis longtemps critiquée pour les injustices et les incohérences qu’elle entraîne. Du fait de cette disposition, de nombreux couples renoncent à officialiser leur union, pour continuer à bénéficier normalement de cette aide.

Je ne peux donc que saluer les mesures adoptées, le 13 février dernier, contre l’avis du Gouvernement et de la majorité à l’Assemblée nationale. Il s’agit notamment de supprimer la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l’AAH et de relever l’âge maximal pour bénéficier de la PCH.

Deuxièmement, j’évoquerai le revenu universel d’activité, le RUA. Il y a moins d’un mois, quatre associations représentatives des personnes en situation de handicap, et non des moindres – l’Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh), l’Association des paralysés de France (APF) France handicap, l’Union nationale des familles et amis des personnes malades et/ou handicapées psychiques (Unafam) et l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei) –, ont claqué la porte de ce qu’elles ont appelé « un simulacre de concertation » organisée par le Gouvernement. Elles considèrent, avec juste raison, que l’AAH n’est pas un minimum social comme les autres : ce sont les conséquences des déficiences et des incapacités qui fondent l’accès à cette allocation et non la situation de vulnérabilité sociale.

Le RUA a pour but ultime le retour à l’emploi. Y inclure l’AAH serait une aberration, quand on sait que seuls deux allocataires sur dix ont une activité professionnelle. Cette fusion de l’AAH dans le RUA, si elle était confirmée, dégraderait les droits des personnes en situation de handicap.

Les logiques comptables et de rationalisation des politiques publiques suivies par le Gouvernement vont finir par ériger un modèle de société dans lequel les spécificités du handicap ne sont pas suffisamment prises en compte. Dès lors, la mise à l’écart et l’isolement des personnes seraient encore aggravés.

Ce n’est évidemment pas notre vision de ce que doit être une société inclusive, qui s’enrichit des différences et permet à chacun de choisir sa vie. Aussi, nous continuerons à nous battre pour défendre les droits des personnes en situation de handicap, pour relever ce défi !

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