Intervention de Olivier Renaudie

Délégation aux collectivités territoriales — Réunion du 20 février 2020 : 1ère réunion
Table ronde : « grand paris : une gouvernance à l'échelle territoriale ? »

Olivier Renaudie, professeur de droit public à l'université Paris I Panthéon-Sorbonne :

Il est envisagé de légiférer de nouveau sur Paris. Faut-il s'en réjouir ? Ce qui est certain, c'est qu'il y a beaucoup de choses à dire.

Sur la forme, je ferai deux constats. Premier constat : que de dispositions législatives sur Paris ces dernières années. La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain, mais également la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique ! Le second constat formel est que le résultat forme un tableau plutôt pointilliste. Assurément, il n'est pas facile d'en identifier les lignes directrices. Bref, c'est un cauchemar légistique !

Première observation, la loi du 10 juillet 1964 portant réorganisation de la région parisienne est un moment raté, qui enserre Paris dans les frontières étroites du boulevard périphérique. C'est un moment où, d'une certaine manière, Paris perd sa communauté de destin.

Deuxième observation, le territoire est indissociable de la question de l'identité. Cela ne vaut pas seulement pour les autonomistes ou les régionalistes. S'agissant du Grand Paris, les pouvoirs publics auraient pu s'appuyer sur deux territoires, chacun à leur manière doté d'une légitimité : le territoire de l'ancien département de la Seine, formé aujourd'hui par Paris et les trois départements de la petite couronne ; et celui de la région Île-de-France. Malheureusement, on a décidé de ne s'appuyer ni sur l'un ni sur l'autre, et on a fait un choix intermédiaire. Le territoire choisi n'est pas bien identifié par la population et son identité reste en construction.

Troisième observation, d'ordre statutaire, l'élaboration des règles applicables à Paris a toujours été délicate. Ces dernières années, on a ajouté une autre difficulté, qui tient au fait que Paris est désormais soumis à deux corps de règles distincts : celles sur le Petit Paris et celles sur le Grand Paris. On ne peut que regretter cette balkanisation, assez unique par rapport aux grandes villes du monde ou aux autres grandes capitales. Peut-on sérieusement envisager le statut de Paris en distinguant en son sein ce qui est à l'intérieur du périphérique et ce qui est à l'extérieur ? Ma faveur irait à un grand texte législatif sur Paris plutôt qu'à une législation par amendements à l'occasion de textes portant diverses mesures relatives à la décentralisation.

Quatrième et dernière observation, la gouvernance. Assurément, le concept de gouvernance est parfaitement adapté pour évoquer des pouvoirs multiples dont il convient d'assurer la coordination. En ce qui concerne Paris, j'insisterai sur trois points. D'abord, on ne peut manquer de relever l'extraordinaire complexité de cette gouvernance. Ensuite, cette complexité contraste avec les compétences relativement limitées de la métropole du Grand Paris. Même remarque s'agissant du budget : 50 millions d'investissements pour faire un schéma de cohérence territoriale, c'est en soi pas mal ! Enfin, quelles sont les pistes de réformes sur cette gouvernance ? Il existe un scénario noir, à savoir la création de nouvelles instances qui viendraient se superposer à celles existantes.

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