Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans un contexte de crise qui frappe plus durement encore les territoires défavorisés que les autres, la nécessité de concevoir et de mettre en œuvre des dispositifs permettant de corriger les inégalités de ressources entre collectivités territoriales semble unanimement reconnue. Dès lors, le problème consiste évidemment à trouver des dispositifs adaptés.
Comme certains collègues l’ont déjà bien démontré dans leurs interventions, les mesures qui existent ou qui sont envisagées ne sont manifestement pas à la hauteur des enjeux pour les collectivités territoriales de l’Hexagone. Il importe de se rendre compte qu’elles le sont encore moins pour les collectivités territoriales des départements d’outre-mer.
Tout d’abord, ces territoires ont le triste privilège de figurer parmi les plus défavorisés.
Par ailleurs, dans un contexte de difficultés économiques et sociales croissantes, on assiste à l’inexorable dégradation des finances de leurs collectivités territoriales, notamment celles de leurs communes – mon collègue Serge Larcher l’a souligné – et de leurs collectivités départementales, qui jouent pourtant un rôle proportionnellement beaucoup plus important que leurs homologues de l’Hexagone en tant que moteur économique public et, plus encore, en tant qu’amortisseur social.
C’est pourquoi je tiens à lancer un véritable cri d’alarme, en ma qualité de président de la commission de l’outre-mer de l’Assemblée des départements de France, l’ADF, au nom de l’ensemble des départements d’outre-mer. La question des ressources des conseils généraux d’outre-mer sera en effet à l’ordre du jour de la réunion que je présiderai à la veille du quatre-vingtième congrès de l’ADF.
Mes chers collègues, le problème qui se pose pour les collectivités territoriales des départements d’outre-mer est d’autant plus aigu que la situation de ces derniers est véritablement alarmante. Quelques chiffres peuvent en témoigner.
Le taux de chômage, qui est reparti à la hausse depuis 2008, atteint 21 % en Guyane et plus de 29 % à la Réunion ; la proportion de jeunes dépourvus d’emploi, y compris diplômés, est particulièrement élevée. À la Martinique, par exemple, 61 % des jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans sont au chômage.
Le nombre de RMIstes, qui est d’environ 15 000 en Guyane, avoisine les 29 000 aussi bien en Martinique qu’en Guadeloupe et s’établit à 71 000 à la Réunion. Les dépenses d’aide sociale et de solidarité des conseils généraux d’outre-mer représentent 58, 4 % de leurs dépenses totales contre 44, 2 % pour les conseils généraux de l’Hexagone. Ces quelques éléments sont, me semble-t-il, suffisamment éloquents pour que je ne prolonge pas mon énumération.
Certains d’entre vous se demandent peut-être pourquoi nous en sommes là, après de si nombreux plans de développement, lois de programmation, trains de mesures spéciales qui devraient, pour l’outre-mer, constituer autant d’éléments de péréquation.
Eh bien, mes chers collègues, cette abondance ne doit pas vous leurrer ! En réalité, nous souffrons d’un excès d’effets d’annonce, auquel s’ajoutent des retards fréquents, parfois considérables, dans l’application de certaines mesures, et l’instabilité – parfois l’inadaptation – des dispositifs mis en place.
Actuellement, deux éléments essentiels de la dernière loi de programmation votée au mois de mars 2009 n’ont trouvé quasiment aucune traduction concrète dans nos départements : je veux parler des fameuses zones franches et de la réalisation des programmes de logements sociaux en défiscalisation, dont on a tant parlé dans cette enceinte. Alors que nous prenons la mesure des limites de l’orientation de la défiscalisation en faveur du logement social, c’est tout le dispositif de défiscalisation qui va subir ce qu’on appelle un « coup de rabot »...
Il faut également savoir que, sur les cent trente-sept mesures retenues lors du conseil interministériel de l’outre-mer du 6 novembre 2009, seules une quarantaine ont été mises en application, pour la plupart de nature qualitative, sans réelle incidence sur le développement économique, aucun moyen budgétaire ne leur étant associé.
On comprend, dans ces conditions, les efforts considérables que doivent consentir les collectivités territoriales d’outre-mer pour faire face, dans un contexte de difficultés économiques et sociales croissantes, à d’importants besoins d’équipement et à une demande sociale qui explose. Malheureusement, leur volonté d’agir est de plus en plus contrecarrée par l’insuffisance criante de leurs ressources.